LA GRANDE EPINE DANS LES PIEDS DES FEMMES
Ziguinchor- Problème d’accès a la terre - Seules 2% des femmes ont accès au foncier dans la région de Ziguinchor
Seules 2% des femmes ont accès au foncier dans la région de Ziguinchor. Un faible niveau d’accès des femmes au foncier qui illustre toutes les difficultés que rencontrent ces femmes dans leurs activités agricoles. Les principales contraintes qui freinent l’accès des femmes au foncier tournent autour de considérations coutumières. Une problématique que tentent de transcender ces femmes dans une région où les pesanteurs socioculturelles ne plaident pas souvent en leur faveur.
Elles sont dans les rizières, dans les champs. Mais elles sont confrontées au problème du foncier. Elles, se sont ces femmes de la Casamance, actrices du développement, qui vivent une disparité dans l’accès au foncier. «Nous travaillons dans ces terres ; mais nous n’avons aucun droit sur celles-ci», se désole Madame Sadio Thioune, présidente régional des Groupements de Promotions féminines qui étale les difficultés qu’ont les femmes de la Casamance à disposer de ces terres. «Les pesanteurs socioculturelles restent des contraintes majeures. Nous n’avons pas le droit d’hériter de ces terres, ni d’en être les propriétaires. Ces terres nous sont léguées, juste le temps de nos activités…», lance avec dépit Madame Thioune.
STEREOTYPES ET AUTRES PESANTEURS SOCIOCULTU- RELLE ET ECONOMIQUE, EN STATISTIQUES
Seuls 2% des femmes disposent de terre ; une disparité que déplore cette actrice au développement qui fait porter le chapeau de la responsabilité aux hommes et aux autorités. Des réalités coutumières qui plombent le développement des activités culturales dans plusieurs localités de la Casamance. Dans le Kassa, les femmes qui s’illustrent dans la riziculture peinent à s’approprier les terres qu’elles exploitent... Les hommes héritent des terres de leur père qu’ils s’approprient. Par contre, les femmes exploitent les rizières que leur attribuent leurs belles-mères, mais elles n’en deviennent pas effectivement propriétaires. Ces rizières restent en leur possession, aussi longtemps qu’elles demeurent dans le ménage, nous confie une dame habitante d’Oussouye. Toutefois, le phénomène d’accès au foncier des femmes est moins sévère dans le Blouf. A Thionkessyl, certaines femmes ont pu transcender cette difficulté, disposant de terres à la faveur d’une «lutte». Les résultats d’une Etude, finalisée dans un Rapport sectoriel, sont formelles. Les femmes sont réellement confrontées à ces difficultés, même si 48,7% des enquêtés de cette zone ont répondu que les femmes n’ont pas de contraintes d’accès à la terre. Les principales contraintes qui freinent l’accès des femmes au foncier, sont coutumières : 26,3% (persistance des tenures traditionnelles), économiques (8%) et les contraintes relatives au manque d’équipements agricoles (7%).
A CAUSE DE L’HERITAGE, LES FEMMES ONT UN ACCES INDIRECT AU FONCIER, PAR LE MARI OU LE FRERE OU LEURS ENFANTS OU PAR LE GROUPEMENT
En instaurant une disparité entre homme et femme, l’héritage, qui est le mode d’appropriation du foncier le plus courant, est une des principales contraintes à l’accès au foncier identifiée par les acteurs. Même si les femmes ne sont pas exclues ipso facto de l’héritage, elles n’ont généralement qu’un accès indirect, par l’intermédiaire du mari ou du frère ou par l’héritage de leurs enfants etc. ou un accès collectif par le groupement. C’est ce que souligne cette femme leader d’organisation de groupement féminin. «La femme n’hérite pas de terres (…). Ce sont les frères qui héritent, ils peuvent décider ou non de prêter à leurs sœurs (…) La femme travaille dans les champs de son mari, mais une fois qu’elle quitte le ménage, abandonne temporaire son domicile conjugale ou si elle divorce, elle n’y a plus accès», précise Mme Thioune, qui fait un plaidoyer aux allures de cri de cœur : «Nous demandons à nos maris, à nos frères de nous céder ces terres. Les pesanteurs socioculturelles ne nous permettent pas d’avoir la terre. Les hommes doivent avoir pitié des femmes, pour disposer de terres», plaide-t-elle.
LA SALINISATION DES TERRES RIZICOLES, L’AUTRE FREIN
Cependant, ces femmes ne sont pas exemptes de reproche sur cette situation. La majorité des femmes ignorent leur droit sur le foncier, un véritable handicap pour l’accès au foncier de ces femmes. D’où l’urgence d’une sensibilisation accrue pour inverser la tendance et permettre à ces femmes de disposer des mêmes droits que les hommes. A cette panoplie de difficultés liées à l’accès au foncier, il faut adjoindre d’autres difficultés liées à la salinisation des terres. Une véritable contrainte qui freinent le développement agricole et les ambitions de ces femmes à la fois mère et actrices de développement dans une région où les considérations culturelles, coutumières continuent de peser sur la question de l’accès des femmes au foncier.