DES IDÉES À REVENDRE ET DE L’AMBITION CHEVILLÉE AU CORPS
AMY MBENGUE, LAURÉATE 2014 DU CONCOURS "GREAT ENTREPRENEURS"
Lauréate de la première édition du Concours « Great entrepreneur » organisé par l’ambassade de Grande Bretagne et le British Council qui met en compétition des entrepreneurs de 18 à 35 ans en récompensant le projet le plus innovant et durable, Amy a des idées plein la tête et l’ambition chevillée au corps
Quand on vient de gagner haut la main, parmi une centaine de candidats au départ, un concours diffusé sur le petit écran, on n’est plus maître de son emploi du temps. Les sollicitations, elles viennent de partout. On est entre deux rendez-vous.
On l’aura compris, Amy Mbengue, la grande gagnante de la première édition du concours « Great entrepreneur » organisé par le British Council et l’ambassade de Grande Bretagne au Sénégal et diffusé sur la Rts, n’a plus de temps à elle.
Imaginez, au moment où, veille de la Tabaski, la plupart des femmes sont en train de se faire greffer la dernière touffe de mèche ou pressent le tailleur du coin de leur livrer leur tenue d’apparat pour bien paraître le jour de cette fête, Amy, elle, file à Keur Massar pour s’assurer du bon fonctionnement de son unité industrielle de revalorisation des déchets plastiques.
Du coup, caler l’heure de l’entrevue devient une véritable équation. 12 heures ? 15 heures ? Non finalement ce sera 20 heures après son retour de Keur Massar.
On la retrouve à la maison familiale, un cadre cossu niché dans le quartier de Liberté 6. Sur la table du salon, des coupures de presse sur la lauréate du concours.
« C’est mon père qui les collectionne. Il a toujours été très regardant sur ce que ses enfants font surtout à l’école. Il n’est pas milliardaire mais il s’est toujours donner les moyens de nous mettre dans les meilleures conditions pour bien étudier. J’en profite pour le remercier », confie-t-elle à l’égard de ce père, ancien directeur des aéroports du Sénégal.
Taille moyenne, teint d’ébène, sourire affable, Amy Mbengue s’est révélée au grand public il y a de cela quelques jours quand, sur le petit écran, on la voit s’avancer et récupérer un chèque de 10 millions de FCfa des mains de l’ambassadeur de la Grande Bretagne. Un pactole qui récompense le meilleur projet de création d’entreprises innovantes et durables au Sénégal.
Loin de considérer cette distinction comme une consécration, cette titulaire d’un BTS en action commerciale, d’une Licence en économie et gestion option administration et gestion des entreprises et d’un master en marketing à l’université de Montpellier l’entrevoit plutôt comme « une porte ou- verte » vers d’autres défis.
« Malgré la médiatisation et les appels de toutes parts que je reçois, je reste toujours moi- même. Je prends cela de la manière la plus naturelle et la plus simple possible. J’ai beaucoup galéré avant d’arriver là où j’en suis et je sais également qu’il me reste beaucoup de choses à faire », confie-t-elle d’un ton plein d’assurance.
Révoltée par l’insalubrité de la capitale
Du chemin, Amy Mbengue en a fait. Comme en atteste ces deux poncifs accrochés sur les murs du salon. Sur le premier cliché, on la voit, haut comme trois pommes, remettre une gerbe de fleurs au président Abdou Diouf à l’occasion de la cérémonie de changement de nom de l’aéroport de Dakar Yoff en aéroport Léopold Sédar Senghor en 1996.
Sur l’autre image, la jeune femme est côte à côte avec Ségolène Royale sur le présidium de la salle de conférence de l’Ucad. Une photo prise lors de l’assemblée générale de l’association internationale des régions francophones où Amy était invitée à déclamer un speech. Après donc un baccalauréat série S2 décroché en 2003, elle s’envole pour la France.
Huit ans plus tard, auréolée de trois diplômes, elle revient au pays natal et intègre le cabinet de consultance de son père. Plus tard, le poste de représentante au Sénégal d’une firme indienne s’activant dans le matériel électrique et un passage à la Direction des Petites et moyennes entreprises gonflent son Cv.
Des envies d’ailleurs la prennent.Enfermée dans un bureau entre quatre murs, ce n’est pas son dada, d’autant plus que sommeillait en elle depuis longtemps, Lauréate de la première édition du Concours « Great entrepreneur » organisé par l’ambassade de Grande Bretagne et le British Council qui met en compétition des entrepreneurs de 18 à 35 ans en récompensant le projet le plus innovant et durable, Amy a des idées plein la tête et l’ambition chevillée au corps. le même niveau de propreté qu’en France et aux Etats-Unis. Même si je sais que c’est un défi qui sera difficile à surmonter, mais il faut essayer ».
L’ambition d’Amy est de proposer, à la place des sachets plastiques qui enlaidissent le décor de nos rues, des sacs bio-dégradables. Mais ça, c’est dans le long terme, mais pour le moment, elle se focalise sur le ramassage et le recyclage du plastique dur dégradé (chaises, seaux, bi- dons, etc.).
« Pour l’instant, on collecte ces déchets, on les transforme, on les revalorise en produit semi-finis et que l’on revend aux unités industrielles », confie- t-elle. Fonctionnelle depuis deux mois seulement, cette unité industrielle emploie 2 permanents et 2 journaliers.
Au-delà des retombées économiques auxquelles Amy Mbengue peut s’attendre (selon des chiffres, le marché du recyclage, en 2011, faisait plus de 4 milliards de FCfa), son souhait le plus ardent est de parvenir à établir un système de collecte des déchets performants au Sénégal, à sensibiliser les gens aux valeurs environnementales, au tri sélectif, faire en sorte que le tourisme sénégalais ne souffre pas de cette mauvaise image...
« Ma philosophie, c’est que si j’utilise un sachet que je garde après usage et que 10.000 autres personnes font de même, on aura 10.000 sachets de moins dans la rue et c’est déjà un bon départ ».
Mais encore, faudrait-il qu’on ait des poubelles dans les rues de Dakar, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui. Il n’empêche, cette jeune femme, qui n’a pas encore trouvé le prince charmant, reste optimiste quant au changement de comportement des Sénégalais.
« Rien n’est acquis du jour au lendemain, c’est un processus. Certes, nous n’avons pas la culture de trier les déchets chez nous, mais si nous offrons aux populations des systèmes de collecte et continuons à les sensibiliser, nous y parviendrons », soutient Amy. Avant d’inviter les autorités à soutenir l’auto-emploi et à aider les jeunes entrepreneurs à viabiliser leurs entreprises. Dans un contexte de chômage accru, c’est l’une des pistes de solutions, croit-elle.
l’idée d’un projet de création d’une unité de revalorisation des déchets plastiques. Elle la réactive et fonce. Qu’importe si son entourage et notamment le papa, n’y croyait pas trop.
« Mon père m’encourageait plutôt à déposer mon Cv pour trouver un bon emploi. Je sais qu’avec mes diplômes, je pouvais prétendre à un bon poste parce qu’ici, au Sénégal, les gens ont le complexe des diplômes européens ou américains. Mais moi, j’avais d’autres ambitions. Je croyais fermement à mon projet. Cette hargne, cette volonté d’aller au bout de mes idées, m’a toujours habité. C’est ma nature, quand je m’engage, j’y vais à fond », dit-elle.
Pour ne pas passer pour une petite outrecuidante, elle s’empresse de tempérer : « Cependant, je n’avais pas la prétention que j’allais gagner le concours. On était plus d’une centaine de candidats au départ, donc loin de moi l’idée de dire que j’allais remporter le concours. Mais je savais que j’avais ma chance parce qu’il y avait des projets que mon projet regroupait à lui seul ».
Ce projet en question jugé « innovant et durable » et qui a permis à Amy Mbengue de se faire une petite notoriété, c’est Ecobag, « Eco » comme écologie et « bag » comme sac, en anglais. Pourquoi le créneau de l’environne- ment ? Effet de mode où réel souci de préserver la nature ?
Amy tranche, nette : « Je ne suis pas dans le suivisme, dans l’effet de mode.J’ai eu tellement d’obstacles depuis le début que si c’était seulement une affaire de mode, je crois que j’aurais arrêté depuis longtemps. C’est quelque chose qui me passionne, cela ré- pond à mes aspirations et j’ai envie de faire quelque chose, et je sais que je peux beaucoup apporter dans ce domaine. J’ai vraiment envie de faire partie de ceux qui, aujourd’hui, mettent en place des solutions pertinentes et durables dans le domaine de l’environnement pour régler la problématique des déchets au Sénégal », c’est entendu.
Amy a les mots plein la bouche et les idées plein la tête, le tout auréolé d’un halo de détermination à les traduire en actes.
Donner de l’éclat à notre environnement
Ecobag est donc née d’une préoccupation environnementale. C’est le fruit d’un amer constat qui a suscité en elle un sentiment de révolte et de honte : le Sénégal est sale. Son séjour en France et un voyage aux Etats-Unis lui ont permis de remarquer et de prendre conscience du niveau de propreté qui sépare le Sénégal et ces pays.
« A chaque fois que venais en vacances au Sénégal, on avait l’impression que l’environnement était toujours sombre, toujours sale. C’est un sentiment de révolte qui m’anime à la vue de cette image. Alors, j’ai commencé à réfléchir sur comment faire pour avoir