"IL Y A DES JOUEURS QUI PARLENT ET D’AUTRES QUI JOUENT..."
ALAIN GIRESSE, SÉLECTIONNEUR DU SÉNÉGAL
De retour de la France près de deux semaines après la défaite des Lions à Monastir face à la Tunisie (1-0), Alain Giresse a bien voulu se prêter aux questions de EnQuête. Le match contre la Tunisie, l’Egypte, Diafra Sakho, et ses rapports avec les journalistes, le technicien français s’explique.
Avec le recul, comment analysez-vous la défaite des Lions (1-0) face à la Tunisie à Monastir ?
Elle s’analyse assez facilement. La défaite est d’abord un coup du sort. Il y a eu des fautes d’inattention et tout d’un coup, les Tunisiens nous ont mis hors de position sur un double corner. C’est la finalité cruelle et injuste car lorsqu’on voit le contenu du match, ce que l’équipe a fait, on peut dire qu’on a été coupable de ne pas avoir concrétisé la maîtrise du jeu qui était en notre faveur. Pour traduire sa supériorité, il faut la faire par des buts, ce qu’on n’a pas pu faire.
Comment expliquez-vous que contre l’Egypte, le Botswana (2-0), l’équipe a été très réaliste, mais sur les deux matches face à la Tunisie, beaucoup d’occasions et pas de but ?
Contre la Tunisie, à l’aller, on a eu un match hyper compliqué, très fermé avec une attitude négative de la part des Tunisiens. Et nous n’avons pas eu un arbitrage, non pas favorable mais un arbitrage qui aurait dû siffler ce qu’il y avait à siffler ou ne pas siffler ce qu’il y n’avait pas à siffler. C’est un élément important. En plus, c’était un match crispant par rapport à l’approche de l’équipe tunisienne. A l’arrivée, on n’est pas récompensés. A Monastir, on se retrouve dans des situations de gestes individuels non concrétisés. Comment expliquer que Sadio Mané marque contre l’Egypte et face au Botswana, et il ne marque pas devant la Tunisie sur les mêmes similaires face-à-face avec le gardien adverse. Celui qui tire des enseignements autre que ce sont les gestes individuels qui sont réussis dans les deux premiers matches et qui ne sont pas réussis de l’autre est très fort.
Vous avez opté face à la Tunisie pour un 4-2-3-1
(Il coupe). Quand je vois et j’entends la façon dont les gens lisent les systèmes, c’est impressionnant. Même à la télé. Contre la Tunisie, on a joué en 4-3-3 à Dakar et en 4-2-3-1 à Monastir ; mais qu’est-ce que vous voulez que je vous dise si les commentateurs de télé se trompent sur les systèmes utilisés.
Qu’est-ce qui a vous a poussé à opter pour ce système
Parce que j’avais décidé d’introduire Pape Kouly Diop et à un moment donné, il faut tenir compte du poste des joueurs pour bâtir une équipe. Donc il me semblait plus opportun de le mettre à la pointe des hommes de base du milieu, accompagnés sur le côté par deux autres joueurs pour avoir un équilibre.
Ce n’était pas risqué, si l’on sait que Pape Kouly Diop n’a pas joué en meneur depuis ses jeunes années et qu’en club, il joue comme milieu défensif ?
Je ne le considère pas comme un milieu défensif comme on le conçoit. Et là, ce n’était pas véritablement un 10, mais un milieu plus avancé offensivement. Le risque fait partie des choix que l’on fait. Quand on connaît sa maîtrise technique, il n’y a pas trop de risque. Il ne faut pas oublier non plus la capacité qu’il a sur les coups de pied. Sur ça, on était nettement meilleurs à Monastir qu’à Dakar.
Est-ce que, comme beaucoup d’observateurs, vous considérez que votre capitaine Mohamed Diamé a fait un de ses meilleurs matchs contre la Tunisie ?
Il a fait un bon match, oui. Un de ses meilleurs matchs ? Oui peut-être. Ce qui est sûr, c’est qu’il a fait un bon match. Après, le comparer avec d’autres matches, je ne veux pas rentrer dans cela. Ce qui m’intéresse, c’est le match qu’il a fait.
Cette défaite permet à l’Egypte de se rapprocher du Sénégal...
(Il coupe). Même si on avait match nul, c’était pareil parce qu’il serait à 2 points. Et cela ne changerait rien dans le désir de nous battre. Pour nous, non plus. On a une équipe adverse, défaite ou pas défaite, qui part avec l’intention de nous battre.
Vous vous attendez à un match chaud au Caire ?
Sur le terrain ?
Oui sur le terrain, l’ambiance, l’environnement, etc...
L’ambiance, c’est l’ambiance. C’est sur le terrain que cela se passe. On ne joue pas sur les tribunes, mais sur le terrain. Chaud veut dire violent, engagé, ce n’est pas le style de l’Egypte de pratiquer ce genre de jeu.
Comment vont se passer la préparation, le regroupement ?
On va se préparer à Paris, après on descendra directement en Egypte. Il y a la logistique, les attentes de finalisation sur les transports. Pour le moment, j’attends les confirmations et je ne les ai pas. Après, si on s’appuie sur tout ce qui a été fait jusqu’à présent en termes d’organisation, on a été très bons.
Le regroupement au Sénégal se fera à Saly ?
Oui.
On avait avancé le King Fahd Palace
Demandez à ceux qui l’ont dit. Moi, je n’ai jamais dit cela. Je n’ai pas dit cela une seule fois. Il faut peut-être demander à ce qui ont dit cela et dites-leur pourquoi il y a eu changement, comme apparemment ils savent tout.
Pour la liste contre l’Egypte et le Botswana, peut-on s’attendre à une convocation de Diafra Sakho de West Ham ?
Il peut être convoqué. Il n’est pas mis au banc des accusés. Il fait partie des joueurs susceptibles d’être appelés.
Que vous inspirent ces déclarations dans la presse ? (Ndlr : Dans le journal français l’Equipe, le joueur avait déclaré : "Giresse manque de courage")
Je ne les ai pas lues, mais j’en ai entendu parler.
Et...
Il a dit ce qu’il avait à dire. Il y a des joueurs qui parlent et d’autres qui jouent. Il faudrait qu’il fasse un des deux.
Vous pensez qu’il est allé loin ?
Je ne sais pas. J’en pense ce que j’en pense.
Il ne risque pas d’être sanctionné ou boycotté ?
Si c’est un joueur performant avec du potentiel, il est comme les autres joueurs susceptibles d’être intégrés ou pas. Il sera soumis à la même condition que les autres.
Vous avez eu des bisbilles avec les médias qui vous reprochent d’être allergiques à la critique...
Rien de particulier avec les médias. Vous préférez que l’on parle de vous en mal ? Je vous retourne cette question, mais après je ne rentrerai pas dans le débat car je trouve que c’est systématique. Le négatif, c’est moi, le positif, ce n’est pas moi. Moi, je n’ai pas de bisbilles avec eux. C’est eux qui estiment qu’ils ont des bisbilles. Je ne passe pas ma vie à me battre contre eux.
Alors ils peuvent venir avec leurs micros faire leur travail ?
Non.
Pourquoi ?
Je suis libre non ! J’ai le droit de choisir et ils sont libres de leurs commentaires. Pourquoi cela ne marche que d’un côté ? Ils peuvent commenter, écrire de leur côté et moi je n’ai pas cette liberté. Pourquoi ?
Vous trouvez les critiques injustifiées ou mal faites ?
Je ne parle pas des critiques, mais du traitement. Je ne rentre pas dans le sens des critiques. Dans le traitement et la présentation des choses, je trouve que ce n’est pas correct.
Ne craignez-vous pas une crise journalistes-sélectionneur qui pourrait nuire à l’environnement de la sélection ?
Vous savez très bien que c’était open à mon arrivée. Les gens assument leurs attitudes. Il ne faut pas réclamer des choses, si tout d’un coup on a eu un comportement pas net. Il y a même des choses qui se sont passées et qui étaient fausses. Et je ne vois pas le lien. Je ne suis pas en bisbilles encore une fois. C’est eux qui ne sont pas contents. C’est tout.