LES SYNDICALISTES EBERLUES PAR L’ANNONCE DU MINISTRE DES FINANCES
ANNONCE DU GEL DES SALAIRES DE LA FONCTION PUBLIQUE EN 2015
La décision de l’Etat du Sénégal, annoncée à l’Assemblée nationale, avant-hier, par le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, Amadou Ba, de geler les salaires de la Fonction publique en 2015 en n’octroyant aucune augmentation, est très mal accueillie, comme il fallait s’y attendre, par les fonctionnaires. Et ce sont les syndicalistes qui s’en offusquent les premiers.
Interpellés sur l’annonce du gel des salaires annoncée, avant-hier, à l’Assemblée nationale par le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, les syndicalistes, pensent que ce ne sont pas les salaires qu’il faut geler, mais plutôt les recrutements «sauvages» dans la Fonction publique. C’est le cas de Waly Diouf Bodian, le secrétaire général du Syndicat autonome des agents des impôts et des domaines (Saaid). Selon lui, il y a une contradiction majeure dans la déclaration de l’argentier de l’Etat qui annonce qu’on va geler les salaires et les actes posés par le gouvernement. «On ne va pas augmenter les salaires pour l’année 2015 et parallèlement, aujourd’hui, le gouvernement a une politique presque sauvage de recrutement. C’est-à-dire qu’on recrute à tout bout de champ», déclare Waly Diouf Bodian qui ajoute que «dire que je n’augmente pas les salaires, mais je vais augmenter les salariés, c’est parvenir toujours au même résultat». «Le problème d’ailleurs, c’est quoi ? Les 5000 agents qu’on prend chaque année ne correspondent pas à un besoin particulier de l’administration. Ce sont des recrutements politiques. On prend toute la clientèle politique et on l’envoie dans l’administration.
Des gens sans aucune formation, qui, entre guillemet, ne servent à rien, qui viennent alourdir la charge fiscale et la masse salariale et ils ne servent pas à grand chose», peste-t-il en soulignant qu’il ne «comprend pas l’Etat sur ce dossier. Et c’est une contradiction que d’annoncer une chose et de faire son contraire».
Sur un autre registre, le fonctionnaire du fisc de soutenir que «du point de vue même de la forme de la déclaration, je ne comprends pas. Parce que je pense qu’aujourd’hui, pour annoncer ce genre de mesure, il faudrait une large concertation avec les différents acteurs pour arriver à une sorte de trêve sociale pour expliquer aux uns et aux autres les raisons pour lesquelles l’Etat entend ne plus augmenter les salaires dans la Fonction publique». Aussi, dit-il, «encore que je trouve que l’Etat à tous les leviers pour pouvoir diminuer ses dépenses et ça, eux ils le savent. On ne peut pas d’un côté augmenter le budget de la présidence de la République et d’un autre côté décider de geler les salaires de la Fonction publique, ça n’a aucun sens».
En effet, le patron du Saaid estime qu’une politique économique doit avoir une certaine cohérence qui commence d’abord par la transparence. «Il faut être transparent et que les efforts soient faits à tous les niveaux. Il ne faut pas donner l’impression aux Sénégalais que les tenants du pouvoir vont diminuer la rémunération des uns et laisser la classe politique hors de la diminution des charges publiques», martèle t-il en précisant, par rapport à la masse salaire, que «de ce point de vue également, on se trompe. Les salaires qu’on paye on ne les paye pas juste pour faire plaisir aux salariés. On les paye parce qu’ils ont exécuté un travail».
Pour Waly Diouf Bodian, «aujourd’hui, l’Etat contourne le système classique de recrutement qui est un recrutement par voie de concours pour faire des recrutements massifs, des contrats qui sont là et qui crèvent de façon très importante le budget de l’Etat. Les contractuels de l’Etat, c’est 115 milliards par an», affirme-t-il, en notant que les reste, c’est les autres. Dès lors, est-il d’avis qu’avec l’étude annoncée par le ministre de l’Economie et de Finances sur les salaires, il vaut mieux réfléchir sur les salariés. «Car, moi, le problème ce n’est pas les salaires, mais les salariés. Aujourd’hui, ce qu’il faut geler d’abord, ce n’est pas les salaires, mais les recrutements. Il faut réfléchir en profondeur sur les recrutements dans la Fonction publique, pour qu’on sache qui on prend et pourquoi on le prend».
SEYDI ABABACAR NDIAYE, SECRETAIRE GENERAL DU SAES :- «SI LES SYNDICATS JUGENT QU’ILS DOIVENT LUTTER POUR UNE AUGMENTATION DE SALAIRES, ILS LE FERONT»
Le secrétaire général du Syndicat autonome des enseignants du supérieur (Saes), Seydi Ababacar Ndiaye, pense que le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, qui a annoncé qu’il n’y aura pas de hausse de salaires dans la Fonction public en 2015, va trop vite en besogne. «Je suis étonné que le ministre réponde à des questions non encore posées», déclare M. Ndiaye pour qui, «le ministre doit comprendre que les syndicats ne sont pas des excroissances du gouvernement et que si les syndicats jugent qu’ils doivent lutter pour une question, en particulier pour une augmentation de salaires, ils le feront. En ce moment-là, c’est le rapport de forces qui règne».
Poursuivant son analyse, Seydi Ababacar Ndiaye d’ajouter : «On comprend le ministre quand il dit cela, parce que quand ils sont incapables de payer à temps les salaires des fonctionnaires, on comprend très bien qu’un ministre puisse dire effectivement qu’il n'y aura pas d’augmentation de salaires en 2015 pour la Fonction publique».
Sauf que, pour le responsable du Saes, cette déclaration reste «une déclaration qui est, de (son)point de vue, ridicule. Parce que encore une fois, cette question à laquelle répond le ministre, n’a pas été posée». Pour dire que le moment venu, si les syndicats le jugent nécessaire, ils poseront cette revendication et agiront en conséquence.