FADA DANS LE VISEUR DE ME WADE
PARTI DÉMOCRATIQUE SÉNÉGALAIS
L'air de rien, Me Wade contrôle plus que jamais son parti. Depuis sa retraite dakaroise de Fann-Résidence, qui ne peut pas encore être tranquille en raison des déboires judiciaires de son fils, il est aux manettes et reste sur le qui-vive. Peu de libéraux ont ramé contre la décision de faire de Karim Wade le candidat du Pds lors de la prochaine présidentielle, mais la question reste la place même de "Gorgui" au sein de l'appareil, avec les regards braqués sur le poste de secrétaire général national qu'il occupe depuis 1974.
Me Wade contrôle son parti et surveille ses arrières avec un œil sur son fils spirituel Modou Diagne Fada dont les partisans ne se cachent plus pour dérouler leur programme. Preuve de leur vitalité, une récente réunion qui a eu lieu avant-hier dans la soirée et réunissant son "étatmajor" s'est terminée dans une chaude atmosphère en raison de divergences. Pas sur le fond (truster le poste de secrétaire général du parti), mais sur la stratégie. Ce ne sera pas une première dans le vécu de celui qui fut benjamin du Parlement.
Déjà, lors des législatives de 2007, en rupture avec le président Wade au faîte de sa gloire, Modou Diagne Fada avait obtenu deux postes de député après avoir mené la coalition "Waar-Wi". Les actuels parrains de l'Ujtl et le mouvement des cadres (Fncl) sont les deux attractions dans un subtil réseautage et d'alliances avec la particularité que maintenant, les deux structures ont pratiquement les mêmes groupes à leur tête.
Cela tourne autour de moins d'une dizaine de personnalités, mais qui compensent leur faible nombre par leur talent à communiquer et à concevoir des schémas pour le moyen terme. Mais ils n'entendent pas attaquer tête baissée. Qui est fou ? En face, ils ont la même garde prétorienne qui surveille l'édifice avec un code moral centré sur la bataille pour la libération des nombreux cadres libéraux actuellement en détention. Cette situation est favorisée par "l'inertie" notée depuis des mois et le silence de ceux qui ont choisi de ne pas quitter le navire après la défaite de 2012.
Comment en est-on arrivé là ? "Officiellement", le dernier comité directeur avait dit la messe en avril dernier : plus de congrès, Karim Wade candidat donc et le président Wade secrétaire général national du Pds jusqu'après ce scrutin. Message ne pouvait être plus clair, circulez, il n'y a plus rien à voir ! C'était pour freiner l'élan d'une frange importante du Pds qui a posé sur la table le débat de la succession du "vieux", un vrai…"Sopi".
Trois cas de figure
L'intitulé du poste a changé avec le temps, avec l'introduction de la dimension "nationale", mais le contenu reste le même : c'est du fauteuil de numéro un du Pds dont il s'agit. La candidature à la présidentielle est, bien sûr, différente de la désignation du nouveau patron de la formation, et celle qui cristallise le plus les passions entre les deux dans le parti libéral n'est pas celle que l'on croit. En effet, Me Wade surveille comme du lait sur le feu le principal frein à son planning : Modou Diagne Fada, actuel président du groupe "Libéraux et Démocrates", à l'Assemblée nationale.
Fada, dont les partisans s'emballent en rappelant que l'influent ancien dirigeant de l'Ujtl et plusieurs fois ministre est "déjà le chef de l'opposition parlementaire ". L'enfant de Darou Mouhty, ancien personnage du mouvement étudiant et de l'opposition au Ps, formé à l'école de Wade mais qui veut aujourd'hui "tuer" le père comme dans les bonnes tragédies au théâtre, grecques de préférence. Mais l'entreprise sera parsemée d'embûches.
Batailles homériques en perspective. Car, loin de jouer sur les planches, les partisans (toujours majoritaires dans le parti) de Me Wade ne vont pas laisser prospérer l'affaire et comme toujours, rien n'est exclu : menaces d'exclusion après un mélodrame dont les partis politiques sénégalais ont le secret, refondation autour des "retrouvailles de la famille libérale", ou acceptation (enfin) de courants forts menés par des personnalités, en général des "présidentiables". Dans tous les cas de figure, le président du groupe libéral à la Place Soweto, silencieux comme jamais, a pris date. Pour l'avenir.