LES DESSOUS D’UN CHANGEMENT D’ADMINISTRATEUR INDEPENDANT
COMITE EXECUTIF DE L’ITIE
Les critiques des Ong sur le premier rapport Itie 2013, réalisé par le cabinet franco-britannique Fair Links, pour le compte du Comité national de l’Initiative pour la transparence des industries extractives (Itie), semblent avoir toucher leurs cibles. En effet, 18 mois après avoir obtenu le statut de «Pays candidat», le débat refait surface. Et cette fois-ci, c’est sur le changement d’administrateur indépendant que porte le débat.
Le cabinet franco-britannique Fair Links qui avait fait l'audit très controversé, en ce sens que le rapport contenait beaucoup de données non fiables, allant même jusqu’à susciter l’indignation de certaines Ong comme Lumière synergie pour le développement, a été remplacé par le cabinet Moore Stephens. La raison est très simple : «C’est parce que les autorités ne sont pas contentes des erreurs commises par ce cabinet. Surtout sur l’existence d’écarts importants entre les déclarations des organismes collecteurs de l’Etat et celles des entreprises extractives. Donc, on s’est précipité pour choisir un autre cabinet».
Ces révélations sont faites par des membres de la société civile qui ne se retrouvent pas dans la Coalition nationale des organisations de la société civile sur la gouvernance des ressources minérales. Mais ce qui les irrite, c’est surtout la légèreté dont a fait montre le Comté exécutif de l’Initiative pour la transparence des industries extractives (Itie) dans le suivi des travaux du cabinet Fair Links. Cette frange de la société civile reste pessimiste quant à la production d’un autre rapport, dans les délais requis, pour permettre au Sénégal de décrocher le statut de «Pays conforme».
«Le temps des omelettes pour la société civile»
Ce pessimisme est d’autant plus grand que la société civile, réunie au sein de la Coalition nationale, «ne remplit pas correctement son rôle de veille et d’alerte pour la promotion de la transparence», regrette certains experts des mines qui se démarquent de ladite Coalition. Mais ce qui leur donne de l’urticaire, c’est quand des membres de cette même société civile ont tenu, lors l’atelier d’évaluation du premier rapport Itie Sénégal organisé par le Forum civil, sur financement de Oxfam, les propos selon lesquels, «on a cassé des œufs quand il allait le faire. Maintenant, c’est le temps des omelettes». «C’est comme si on était là pour se partager un gâteau», se désolent-ils.
Une information que confirme le président du Leadership, Ethique, Gouvernance et Stratégies pour l’Afrique (Legs-Africa), Elimane Kane. Ce dernier qui a manifesté son inquiétude d’entendre de tel propos, déclare: «Ce n’est pas ça l’engagement militant». Pour lui, il faut de nouvelles forces pour défendre les intérêts des Sénégalais, on ne peut plus compter sur cette société civile».
Revenant sur le changement de cabinet, M. Kane a souligné: «Les travaux du cabinet ont été médiocres et il y avait même dans le premier rapport du copier-coller. Il a aussi regretté le fait que la Banque mondiale nous impose des cabinets». Il informe que depuis 10 ans, au Ghana, le rapport est fait par un consultant local, qui est présenté comme modèle.
Les explications du Secrétaire permanent de l’Itie
Le Secrétaire permanent de l’Itie, Cheikh Tidiane Touré, que nous avons interpellé sur ces questions a réagi en ces termes : «Fair Links est un cabinet basé à Paris qui avait été sélectionné à l’issue d’une procédure d’appel d’offres international encadrée par la Banque mondiale. Son mandat se limitait à produire les rapports de 2012 et de 2013. Les termes contractuels ont été respectés et la collaboration a pris fin dans les meilleures conditions. Pour le rapport de 2014, le Comité national a décidé de relancer l’appel d’offres, toujours en utilisant les procédures de sélection prévues par la Banque mondiale».
Poursuivant, il a ajoute qu’«à l’issue de cette procédure, le cabinet Moore Stephens a été sélectionné. Je précise que lorsque vous utilisez les procédures de la Banque mondiale, il y a toujours des validations qui sont effectuées sous forme d’avis de non objection. Ensuite, faudrait-il rappeler que la sélection des consultants est effectuée par une Commission de passation de marché dans laquelle tous les collèges sont représentés».
«A présent, nous sommes uniquement préoccupés par la production d’un rapport de qualité qui permettrait au Sénégal de présenter un bon dossier de validation, pour l’obtention du statut de ‘Pays conforme’. Nous invitons d’ailleurs l’ensemble des acteurs, en particulier la presse, à accompagner le travail du Comité national l'Itie pour la réussite de cet exercice», a-t-il conclu.