HÔTEL SUMA ASSISTANCE, SWEET ET FIN
Ousmane Sonko, Dame Mbodj, Guy Marius Sagna ont assuré le mauvais spectacle en prêtant leur personne à des premiers rôles, dans des navets dignes d’être couronnés aux Razzie Awards
Dans un article du 5 décembre 2022, nous reprenions un propos de l’actrice Valérie Lemercier qui disait «qu’un acteur mauvais au cinéma, ça n’est jamais de sa faute, c’est qu’il a été mal choisi ou mal dirigé». Mais l’actualité, notamment les péripéties du procès opposant le ministre Mame Mbaye Niang au leader du parti Pastef, pour diffamation, tournent au burlesque, au loufoque, et révèlent que si les acteurs peuvent être nuls, ils le sont davantage parce que le scénario est mal écrit. C’est ainsi que Ousmane Sonko, Dame Mbodj, Guy Marius Sagna ont assuré le mauvais spectacle en prêtant leur personne à des premiers rôles, dans des navets dignes d’être couronnés aux Razzie Awards. Chaque année, les Razzie Awards élisent les pires films sortis en salle. Cette sélection, qui tourne en dérision les productions cinématographiques les plus nazes, décerne des navets d’or, d’argent et de bronze. L’avocat attitré des opposants, Me Ciré Clédor Ly, s’arrête au pied du podium.
Le Bonnet d’âne de Bronze à Guy Marius Sagna, le Bonnet d’âne d’Argent à Dame Mbodji
Le 15 mars 2023, à la veille de l’audience qui devait juger l’affaire Mame Mbaye Niang-Ousmane Sonko, Guy Marius Sagna s’était rendu au domicile du leader du parti Pastef. A l’occasion, il a eu des heurts avec un dispositif policier et s’était empressé d’afficher sur les réseaux sociaux des images qui le montraient avec une éraflure. Guy Marius Sagna se fera pourtant hospitaliser, à la clinique Suma Assistance, et se filmera lui-même pour poster des vidéos qui le montraient avec des perfusions. Il a quand même pu prendre le soin de se ceindre de son écharpe de parlementaire pour mieux poser devant les caméras. Au vu des images, on pouvait s’imaginer que le jeune député était mal en point et cela n’a pas manqué d’émouvoir du monde, quelques âmes pleurnichardes qui voulaient sans doute se convaincre de leur propre émotion. Des personnes ont voulu exprimer leur indignation devant les mauvais traitements qui auraient été infligés au député. C’est ainsi qu’on aura noté la réaction particulièrement indignée de sa nouvelle amie, l’ancienne Première ministre, Aminata Touré, qui lui manifestait sa solidarité et criait sa colère de le voir traité de la sorte. Comment peut-on aduler tant, ce qu’on avait le plus abhorré naguère ? C’est peut-être, en psychologie, l’antonymie du dépit amoureux.
Mais la supercherie était manifeste. Et le lendemain matin, on n’a pas été trop surpris de voir le même Guy Marius Sagna, fringant, sans la moindre trace de ses bobos, accompagner Ousmane Sonko qui devait se rendre au Tribunal. Mieux, Guy Marius Sagna avait fait montre de hargne pour houspiller les policiers qui cherchaient à détourner leur cortège vers un autre itinéraire. Lui, le malade et hospitalisé moins de 24 heures auparavant, se battait comme un lion pour protéger Ousmane Sonko. Ces scènes ont fait oublier le prétendu passage à tabac !
Le syndicaliste enseignant, Dame Mbodji, fera découvrir de mauvais talents de bonimenteur en jouant à la victime d’une tentative d’assassinat. Le jeudi 16 mars 2023, dans une vidéo largement diffusée, Dame Mbodj a prétendu révéler qu’il a été victime d’une tentative d’assassinat du fait de sbires du régime de Macky Sall. Il a ainsi montré environ sept impacts de balle sur son véhicule, provoqués par des hommes à moto, armés de fusils à rafales, qui l’auraient suivi la veille, sur la Corniche de Dakar, au sortir d’une émission nocturne sur la chaîne Tfm. L’ancien Premier ministre Abdoul Mbaye, radical et farouche opposant du régime de Macky Sall, se fendit d’une réaction outrée, «exigeant que toute la lumière soit faite dans cette ignoble tentative d’assassinat». Il fallait véritablement vouloir prendre des vessies pour des lanternes que de chercher à donner une once de crédit aux révélations de Dame Mbodji. D’abord qu’est-ce que représenterait Dame Mbodji sur l’échiquier politique ou quel pourrait-être l’enjeu qui justifierait une tentative d’assassinat ? Ensuite, les constatations visibles ne pouvaient tromper la plus crédule des personnes. Les impacts de balle étaient visibles sur tous les côtés du véhicule, et manifestement, les tireurs auraient fait le tour du véhicule plutôt que de tirer sur une cible mouvante, alors qu’aux dires de la cible épargnée comme par miracle, ils seraient eux aussi sur une moto en déplacement. La plus grande aberration restera que les impacts de balle sont de part et d’autre, placés sur les mêmes endroits, et encore sur des zones dont les frais de réparation ne devraient pas trop coûter. De plus, «l’ami» Dame Mbodj, après ce grave incident qu’il relate, était allé dormir tranquillement chez lui, au lieu d’aller se réfugier au premier poste de police ou de gendarmerie pour échapper à ses assaillants. En effet, Abdoul Mbaye a parfaitement raison, une enquête exhaustive doit être diligentée sur cette affaire, pour ne plus laisser prospérer des accusations gratuites de tentative d’assassinat brandies systématiquement et sans la moindre preuve.
De la même façon qu’une enquête est en cours pour élucider les circonstances de l’hospitalisation de Ousmane Sonko à la clinique Suma Assistance. Des personnalités publiques candides (?) avaient cherché à acculer les autorités de l’Etat, reprenant la thèse d’une tentative d’empoisonnement de Ousmane Sonko, et surtout préconisaient son évacuation à l’étranger. Cependant, on peut se demander si cette demande ne relève pas d’une certaine perfidie pour pousser à mener ces investigations afin de mettre à nu la supercherie. Epargnez-moi de mes amis !
Le Bonnet d’âne d’Or à Ousmane Sonko
«Il est rare quand on ment, que tout s’accorde : le regard, la voix et l’attitude.» (Madeleine Ferron). Ousmane Sonko et son conseil Me Ciré Clédor Ly ont réussi à faire prospérer leur demande de renvoi du procès, qui devait se tenir le 16 mars 2023, à la date du 30 mars 2023. On a découvert par la suite, avec les vagues d’arrestations opérées par la police dans les rangs du «commando de Pastef», que la demande de renvoi ne cachait pas moins qu’une volonté sournoise de donner du temps à des fauteurs de troubles pour mieux se préparer à semer le chaos toujours annoncé. Mais là n’est pas le propos !
Ousmane Sonko avait affirmé à l’audience être pris d’un malaise, pour affirmer avoir été victime d’une tentative d’empoisonnement avec un liquide toxique qui lui aurait été versé par un élément des Forces de sécurité. Sur le coup, des images, qui ne pouvaient permettre d’identifier le coupable, avaient fait le tour des réseaux sociaux et, dans les rangs du parti Pastef, on se promettait une chasse à l’homme. C’était sans savoir que la personne qui avait versé un liquide sur Ousmane Sonko avait immédiatement été interpellée. Il s’avéra paradoxalement que le quidam est un de ses proches et, pour essayer d’expliquer son geste, il affirma aux enquêteurs qu’il avait juste voulu asperger son leader d’une substance pour le protéger des inhalations des gaz lacrymogènes. Il est à noter que l’avocat qui était assis aux côtés de Ousmane Sonko ne s’est jamais plaint d’inhalations toxiques ou de tentative d’empoisonnement. En prenant l’avion le lendemain même des événements, Me Ciré Clédor Ly avait embarqué à l’aide d’un fauteuil roulant, mais on le retrouvera arrivé à Paris, après un vol de 5 heures, sur ses deux jambes, pour aller prendre tranquillement un café.
Par ailleurs, personne d’autre dans le véhicule (Guy Marius Sagna, le chauffeur ou les agents de sécurité) n’a eu à déplorer une inhalation toxique. Qu’à cela ne tienne, Ousmane Sonko se fera admettre à la clinique Suma Assistance. Mais le plus stupide est à venir. L’enquête ouverte par la police établira qu’aucun acte médical n’a été posé sur le patient.
Le Docteur Ousmane Cissé, médecin personnel et de famille de Ousmane Sonko, du reste encarté militant de son parti, et qui avait été appelé en urgence au Palais de justice pour établir un diagnostic de l’état de santé du prévenu qui disait être pris de malaise, confiera aux enquêteurs n’avoir posé aucun acte médical sur le «patient», depuis son hospitalisation à Suma Assistance.
Selon lui, c’est une équipe de spécialistes dont il n’a pas révélé les identités, qui s’occupe de l’interné. Il a renseigné qu’il a juste accompagné Ousmane Sonko à la clinique, mais ne s’occupe pas de son état.
Ainsi, il dit ignorer la pathologie dont il souffrirait, encore moins s’il avait été exposé à une substance toxique. D’autres membres du personnel médical de Suma Assistance, entendus par la police, ont pour leur part déclaré qu’ils n’ont pas accès à lui, suite aux instructions du patron de la clinique, le Docteur Babacar Niang. Ce dernier, urgentiste de son état, suite à un avis de recherche émis par la police, s’est fait alpaguer, bien loin de sa clinique, au village de Médina Ndiathbé, à plus de 500 kilomètres de son lieu de travail et de sa résidence habituelle. L’enquête n’a pas encore dit où le Docteur Niang cherchait à se rendre mais, transféré à Dakar, il a déclaré que c’est à la demande du patient qu’une ambulance était allée à son domicile, le chercher pour le conduire à la clinique Suma Assistance. Seulement, il précisa que Ousmane Sonko était suivi par son propre staff médical, en l’occurrence les docteurs Cissé et Ndoye ainsi que leur infirmier.
En d’autres termes, il a soutenu que Suma Assistance n’a pas diagnostiqué le malade et n’a posé aucun acte médical sur sa personne. D’ailleurs, le Dr Niang affirme que sa clinique est ouverte à des spécialistes indépendants qui peuvent y amener leurs patients et les traiter sur place, sans que la clinique n’ait le moindre contrôle sur le patient. On ne savait pas jusqu’ici que Suma Assistance pouvait servir en quelque sorte d’hôtel ! En tout état de cause, Suma Assistance ne pourra lui délivrer un certificat médical car ne l’ayant pas traité au plan médical. Au cours de son troisième interrogatoire, le Dr Niang a quand même pu en dire un peu plus sur les circonstances de l’hospitalisation. Il a pu expliquer que le fameux patient avait été reçu et examiné par le Docteur A. Bangbola, de nationalité béninoise, qui a procédé à son hospitalisation. Or, il se trouve que ce médecin est une gynécologue. (Le sujet est trop sérieux pour qu’on en rie à gorge déployée !). Prise de panique pour avoir été entraînée à son corps défendant dans une histoire rocambolesque, Dr Bangbola a vite couru au consulat du Bénin à Dakar, pour demander la protection consulaire, expliquant avoir juste reçu un patient qui lui affirmait se plaindre de contusions multiples et qu’elle ne lui aurait administré qu’un vulgaire sédatif, du paracétamol. Assurément, on est bien loin de la thèse de l’empoisonnement qui nécessiterait une évacuation sanitaire à l’étranger comme l’avaient demandé, à cor et à cri, les responsables du parti Pastef et le «droit-de-l’hommiste», Alioune Tine, ainsi que de nombreux autres leaders de l’opposition. Il reste que tout ce beau monde est subitement devenu circonspect ou même habité par un silence gêné, depuis qu’ils ont vu le «patient», qu’on présentait comme mourant, faire un «live» de plus d’une heure, trois jours après son hospitalisation, pour continuer, avec verve et vigueur, d’accuser le régime de Macky Sall de toutes les forfaitures et d’haranguer le peuple de militants du parti Pastef à se mobiliser pour lui servir de bouclier. D’aucuns s’étaient d’ailleurs amusés, en se demandant si Ousmane Sonko aurait emprunté à Guy Marius Sagna sa drôle de perfusion pour s’en parer. Mais la supercherie était encore plus visible aux yeux des spécialistes des actes de santé. Nombre d’entre eux ont réagi après avoir visionné la déclaration, pour se gausser que «la solution dans le flacon est de l’hydrosol poly-vitaminé, raison de sa couleur jaunâtre, et que si la perfusion était normale, la tubulure qui relie le flacon à la veine devait avoir la même couleur. En conclusion, la perfusion est fausse, le liquide jaunâtre est absent de la tubulure et, pour une première dans l’histoire de la médecine, une perfusion est faite sur un patient sans cathéter veineux». Il n’y a plus de doute, encore une fois, Ousmane Sonko s’est fait confondre dans ses mensonges et actes de manipulation. Les personnes qui exigeaient son évacuation sanitaire à l’étranger se sont résignées à crier au scandale, qu’une enquête soit ouverte et que des médecins soient ainsi entendus par la police. Maintenant elles invoquent le secret médical !
Au demeurant, Ousmane Sonko est désormais assigné au silence, d’autant que chacune de ses sorties devient catastrophique et ruine ce qui lui resterait de crédibilité. Il reste à savoir pendant combien de temps pourra-t-il supporter le supplice du silence ? Des nouvelles de Me Ciré Clédor Ly ? Un communiqué censé provenir de sa famille affirme qu’il irait bien mieux et on croit savoir par ailleurs qu’il devrait, cette semaine, être à Nouakchott pour plaider dans l’affaire des poursuites pénales intentées contre l’ancien Président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz. Quid de sa participation au procès de Ousmane Sonko prévu le 30 mars 2023 ?
Une plainte est également instruite contre l’équipe de Suma Assistance pour non-assistance à personne en danger. Doudou Fall, agent municipal, a succombé à ses graves blessures lors des échauffourées du 16 mars 2023 et le maire de la Medina soutient que son collaborateur n’avait pas été convenablement pris en charge par les équipes médicales, du fait qu’il n’était pas du parti Pastef. Dans des pays démocratiques, les cas du Dr Niang et de Me Ciré Clédor Ly auraient interpellé leurs corporations respectives qui s’assureraient, à tout le moins, du respect des règles éthiques et déontologiques.
*Le titre est emprunté du titre du film, excellent celui-là, «Hôtel Rwanda», tourné en témoignage du génocide de 1994. Paul Rusesabagina dont l’histoire a inspiré ce film, vient d’être libéré de prison par le Président Paul Kagame.