IL PLEUT SUR GALSEN
L’évolution politique de notre pays depuis l’accession de Macky Sall au pouvoir en 2012 est marquée par l’apparition ou l’aggravation de symptômes fortement évocateurs d’une autocratie en gestation
On raconte que le coup d’État chilien du 11 septembre 1973 consécutif à une vaste entreprise de déstabilisation du pouvoir de l’Unité Populaire par la CIA, aurait été déclenché par un message codé "il pleut sur Santiago", diffusé sur ordre des putschistes à la radio et destiné aux militaires. Au tour du peuple sénégalais de poser la question : menace-t-il de pleuvoir sur Galsen ?
À la lumière de la gouvernance du régime de Benno-APR caractérisée par une judiciarisation quasi-caricaturale de la vie politique et une instrumentalisation des forces de défense et de sécurité, il n’est pas du tout incongru de se demander, si notre pays n’est pas tout simplement en train de devenir une dictature.
Cette question est d’autant plus pertinente que l’élite au pouvoir regroupée autour d’un clan familial a fini de domestiquer les pouvoirs parlementaire et judiciaire, accentuant le déséquilibre institutionnel caractéristique de notre République, au moins depuis l’éviction de Mamadou Dia, en 1962. De fait, l’évolution politique de notre pays depuis l’accession de Macky Sall au pouvoir en 2012 est marquée par l’apparition ou l’aggravation de symptômes fortement évocateurs d’une autocratie en gestation.
Il s’agit, d’abord de cette impunité scandaleuse dont jouissent les membres de l’élite politico-bureaucratique au pouvoir contrastant avec la persécution dont sont victimes les personnalités de l’opposition. L’objectif clairement annoncé de réduire cette même opposition à sa plus simple expression, en utilisant divers procédés comme les nominations de complaisance, l’intimidation par des dossiers compromettants ou la corruption entretient le phénomène honni de la transhumance. La finalité sera bien entendu de faire disparaître tous les partis autres que celui de l’autocrate en chef, comme le prouve amplement la traque impitoyable dont le Pastef fait l’objet ainsi que la dégénérescence de tous les partis alliés de l’APR au sein de Benno Bokk Yakaar, qui semblent avoir perdu jusqu’á leur instinct de survie.
La coupure récente du signal de Walfadjri consécutive à l’interdiction arbitraire du meeting de Mbacké concomitante à l’invasion débridée de la capitale du Rail par des hordes de militants de la coalition présidentielle convoyés pour servir de figurants au Conseil des ministres décentralisé, traduit non seulement une atteinte aux droits et libertés mais aussi une volonté farouche de contrôle total sur tous les médias.
Quant au processus électoral, qui depuis 1992, faisait la fierté de notre classe politique, avec l’adoption d’un Code consensuel élaboré par une commission cellulaire sous la férule de Kéba Mbaye, il est devenu méconnaissable et déstructuré en facilitant la manipulation du fichier électoral et l’éviction des adversaires politiques.
Il est clair que le régime de Benno Bokk Yakaar, qui est allé acquérir des armes pour prétendument lutter contre un danger djihadiste certes de plus en plus menaçant en a profité pour renforcer l’équipement des forces dévolues à la neutralisation des luttes populaires enclenchées par ceux que l’impérialisme et ses laquais désignent sous le vocable d’ennemis intérieurs, suivez mon regard !
Au rythme où la police et la gendarmerie nationales procèdent à des arrestations arbitraires et abusives, il va bientôt falloir ouvrir des centres de détention, comme dans le Chili de Pinochet.
Si un putschiste n’est pas forcément un dictateur et peut même initier une phase de transition aboutissant à la restauration de la démocratie, un dirigeant démocratiquement élu peut bel et bien se transformer en dictateur, s’il refuse de convoquer des élections libres et démocratiques.
Cela suppose, pour les prochaines présidentielles, le respect de la limitation des mandats à deux, la convocation à temps du corps électoral, la renonciation à l’inscription frauduleuse de ses propres militants ainsi qu’à la volonté d’écarter les primo-votants et enfin la suppression de tous les obstacles pour tous les citoyens sénégalais désireux de se présenter, à commencer par le parrainage citoyen, sous sa forme actuelle.