BASSIROU DIOMAYE FAYE AUX URNES DE L’OPINION PUBLIQUE
Trois jours seulement après l’appel de Ousmane Sonko à parrainer Bassirou Diomaye Faye, une bataille d’opinion entre ses partisans et ceux de la mouvance présidentielle fait rage.
Alors que le débat sur la participation de Ousmane Sonko à la prochaine élection présidentielle n’est pas encore vidé, un autre s’installe. C’est celui relatif au choix de Bassirou Diomaye Faye comme candidat de substitution de Pastef. Il fait rage, ce nouveau débat. Aussi bien sur les réseaux sociaux, à travers la presse qu’à l’Assemblée nationale, les partisans de Pastef et ceux de BBY se livrent une bataille de communication sur l’éligibilité ou la non éligibilité de Bassurou Diomaye Faye (actuellement en prison) à la prochaine élection présidentielle. Arguments politiques, juridiques et religieux sont convoqués par les deux parties pour conforter leurs thèses.
Trois jours seulement après l’appel de Ousmane Sonko à parrainer Bassirou Diomaye Faye, une bataille d’opinion entre ses partisans et ceux de la mouvance présidentielle fait rage. Chacun des deux camps a investi les supports médiatiques soit pour vendre l’image de son candidat et le défendre soit pour attaquer bille en tête le nouveau porte-étendard des pastéfiens pour l’élection présidentielle de février prochain. Dans cette confrontation, tousles canaux sont utilisés pour rallier les Sénégalais aux thèses de l’une ou de l’autre partie. Mais c’est à travers les réseaux sociaux que la bataille est la plus acharnée. La prédiction des charlatans, les images de la campagne de parrainages, les discours d’attaque ou de contre-attaques, les plateaux, lesimagessur Tik Tok, les appels pour éveiller les consciences — c’est du moins comme ça qu’ilsles appellent — , les vidéos montées, lesinsultes, la désinformation... tout y passe. Et chacun y va de ses arguments selon le camp auquel il appartient. Une chose est sûre : depuis que son nom a été annoncé comme étant le plan B de Ousmane Sonko, l’essentiel des commentaires prend les allures d’un débat juridique portant sur la validité de la candidature de Bassirou Diomaye Faye. A côté de ce débat juridique, celui faisant état de l’appartenance du candidat de Pastef au salafisme bat son plein. Un débat qui risque malheureusement de noyer celui plus attendu par nos compatriotes sur les offres programmatiques de Pastef et du candidat du pouvoir. Le débat juridique sur l’éligibilité ou la non éligibilité de Bassirou Diomaye Faye étant déjà tranché par le code électoral ou par la Constitution, le sujet le plus grave est celui ayant trait à la question religieuse quis’est aussi invité à l’Assemblée nationale lors de la session budgétaire tout en étant également évoqué aussi par un ministre de la République au cours d’une émission télévisuelle. Les réseaux sociaux s’en sont saisis et bonjour les dérapages !
Quand la bataille d’opinion fait rage...
Sitôt le mot d’ordre de parrainer Bassirou Diomaye Faye donné, les militants et sympathisants de Pastef ont investi le terrain pour l’exécuter. A travers une opération de sensibilisation relayée sur les réseaux sociaux, ils comptent obtenir le maximum de parrainages malgré le retard accusé par rapport aux autres, mais surtout montrer leur forte adhésion au choix de leur leader, Ousmane Sonko, porté sur son second Bassirou Diomaye Faye. Sur un autre plan, ils se sont engagés à apporter la riposte à tous ceux qui seraient tentés de remettre en cause l’éligibilité de leur candidat. Au plan politique, un membre de BBY, invité sur un plateau de télévision, a soutenu que les Sénégalais ne sauraient accepter qu’un candidat poursuivi pour des crimes et délits aussi graves que ceux qui valent à Bassirou Diomaye Faye d’être en prison les dirige. Une réponse à cette attaque a été très vite apportée pour la qualifier de diversion et de tentative de décourager les « pastéfien » dans leur élan visant à obtenir des millions de parrains pour leur candidat. Pour eux, quels que soient les chefs d’accusation pour lesquelsil est emprisonné, Bassirou Diomaye Faye est toujours présumé innocent dès lors qu’il n’a encore fait l’objet d’aucune condamnation. Et encore, même si c’était le cas il faudrait que cette condamnation soit définitive pour qu’il soit disqualifié. D’autres ont fait état d’une « impopularité » et d’un « manque de charisme » du plan B de Pastef en convoquant le fait qu’il a été battu à Ndiaganiao lors des élections locales de 2022. Selon ces pourfendeurs de BDF, quelqu’un qui ne peut pas gagner une commune aussi petite que Ndiaganiao ne peut prétendre présider aux destinées de la Nation ! Sur ce point, la réplique fournie par les « Sonk boys » est que la personne importe peu, l’essentiel, pour eux, c’est le « projet » en tant que tel et quel que soit celui qui le porte. Et de rajouter avec humour et dans un style très inspiré que «Sonko Moy Bassirou, Bassirou Moy Sonko. 6 Moy 9»
A l’Assemblée nationale, où se tient actuellement la session budgétaire annuelle, un député de BBY a profité de son temps de parole pour dire que Bassirou Diomaye Faye est un pur salafiste qui ne croit pas aux confréries avant d’ajouter qu’il n’a jamais mis les pieds ni à Touba ni à Tivaouane pour célébrer les évènements religieux. Cette partie de son intervention a été captée et publiée sur les réseaux sociaux faisant réagir plusieurs internautes. Parmi eux, de nombreux partisans de Ousmane Sonko selon qui, au Sénégal, le choix du président de la République ne se fait pas sur la base d’une appartenance religieuse ou confrérique. Sinon, d’après eux, le président Léopold Sédar Senghor, un catholique, ne serait jamais élu et pourtant il a été soutenu en son temps par de grandes figures religieuses. Mieux, il a dirigé le Sénégal pendant 20 ans. Toujours dans l’Hémicycle, le parlementaire Abib Daffé n’a pas manqué, devant ses collègues, de tresser des lauriers à Bassirou Diomaye Faye qui, selon lui, a toutes les qualités requises pour diriger le Sénégal.
Les craintes de la jurisprudence Sonko...
Mais le vrai débat, celui qui suscite le plus de commentaires est juridique. En effet, s’il y a des voix qui s’élèvent pour dire que Bassirou Diomaye Faye ne peut passe présenter à l’élection présidentielle du fait de son emprisonnement ou de son appartenance à un parti dissous, Pastef en l’occurrence, d’autres, en revanche, estiment qu’aucun de ces éléments ne remet en cause son éligibilité. Deux positions divergentes alors que les articles du code électoral qui traitent de cette question sont on ne peut plus clairs. Ce que regrettent des militants de Pastef accusant le régime d’être derrière toutes ces manœuvres allant jusqu’à utiliser des groupes de presse qui tirent les ficelles, semant le doute dans la conscience des Sénégalais. Pour eux, cette démarche, assise sur des fondements très légers, ne saurait en aucun cas prospérer. Et le fait de vouloir associer les cas Sonko et Diomaye relèverait de la pure manipulation. Si le premier a été déjà jugé et condamné, concernant le second aucune condamnation définitive ne peut se faire d’ici la date retenue pour les élections. C’est pour lever toute équivoque à ce niveau que les pastéfiens ont peaufiné à leur tour une stratégie de communication comme moyen de riposte face à leurs adversaires pour démonter leurs arguments. Pourtant à ce niveau une bonne interprétation du code électoral en son article L 57, aliéna 3 permet de clore le débat sur l’éligibilité de tout candidat issu d’un parti dissous. Toutefois malgré ces dispositions sans équivoque, des personnes appartenant au camp d’Ousmane Sonko émettent des réserves. Pour elles, le régime, ayant peur d’affronter un candidat issu de leur parti, peut à tout moment déclencher la machine judiciaire à l’encontre de Bassirou Diomaye Faye. Et une fois jugé en première instance, le Conseil constitutionnel, après avoir reçu son dossier de candidature, peut s’appuyer sur le même motif opposé par la DGE au mandataire de Sonko lorsqu’elle a refusé de lui remettre les fiches de parrainage du leader de Pastef. Ce motif, c’est le dépôt d’un recours par les avocats du pouvoir. Ce qui va encore déclencher un autre débat juridique sur le caractère suspensif ou non de cet éventuel recours. D’où la possibilité de voir réapparaître une nouvelle «jurisprudence Sonko», d’après toujours les souteneurs de l’opposant en prison.