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29 novembre 2024
Culture
DIARY SOW ENTRETIENT LE MYSTÈRE AUTOUR DE SA DISPARITION
"Coura, ce n’est pas moi". La précision est faite par Diary Sow, invitée de RTL, hier soir. Après ’’Sous le visage d’un ange’’ (L’Harmattan), la romancière est de retour avec ’’Je pars".
"Coura, ce n’est pas moi". La précision est faite par Diary Sow, invitée de RTL, hier soir. Après ’’Sous le visage d’un ange’’ (L’Harmattan), la romancière est de retour avec ’’Je pars". Son deuxième roman est publié, ce 4 novembre, neuf mois après sa disparition volontaire qui avait inquiété la France et le Sénégal.
Le nouveau roman met en scène une héroïne du nom de Coura, qui s’embarque pour Amsterdam en laissant Paris derrière elle. Une histoire qui rappelle étrangement celle de l’étudiante qui avait disparu en janvier 2020, sans donner d’explications avant de réapparaître un mois plus tard.
"J’ai essayé de créer un personnage fictif qui va avoir la même histoire que moi. Je me suis aussi éloignée d’elle pour ne pas qu’on parle de moi. Mais, des disparitions en général. J’ai voulu raconter mes ressentis, sans parler de moi. Je suis malgré tout présente, mais ce livre ce n’est pas le grand déballage, je ne dirai pas pourquoi je suis partie", a-t-elle expliqué, soutenant "avoir hésité jusqu’au dernier moment avant de partir".
Diary Sow, retournée en France, a repris ses études en classes préparatoires au lycée parisien Louis-le-Grand, grâce au riche homme d’affaires, Harouna Dia, le mécène à l’origine des démarches.
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EXPOSITION VISA POUR LA MUSIQUE, LE MAKING OFF
Comme un employé d’aéroport qui vise nos passeports, je tamponne sans cesse et parfois presque machinalement comme un ouvrier vêtu de son bleu
Comme un employé d’aéroport qui vise nos passeports, je tamponne sans cesse et parfois presque machinalement comme un ouvrier vêtu de son bleu. Mais chaque frappe, laisse une trace unique et indélébile comme tous les cycles de la vie. Hey Joe, Unchain my heart, Blue in green, Respect ou encore Soul Makossa… Des titre-mots-concepts qui à la simple évocation nous transportent dans un univers et nous font voyager sans visa à la rencontre de l’autre. La musique n’a jamais eu besoin de visa pour aller toucher les coeurs...
DERRIÈRE LE SACRE DE MBOUGAR, LE DESTIN TRAGIQUE DE OUOLOGUEM
Dans son livre, l’auteur de 31 ans creuse dans les souvenirs et l’histoire mystérieuse d’un auteur disparu des radars. Ce récit, mêlant fiction et vérité, ne vient pas de nulle part, il est inspiré du destin tragique de l’écrivain malien Yambo Ouologuem
C’est une victoire pleine de sens. Ce mercredi 3 novembre, le prix Goncourt 2021 a été remis à l’auteur sénégalais Mohamed Mbougar Sarr pour son quatrième et dernier roman La plus secrète mémoire des hommes, paru aux éditions Philippe Rey au mois d’août dernier.
Son histoire est celle d’un certain Diégane Latyr Faye, un jeune écrivain sénégalais installé à Paris qui, bouleversé par la découverte d’un livre paru en 1938, décide d’enquêter sur le récit qui se cache derrière ce roman. Une quête qui va l’emmener sur les traces de son auteur, T.C. Elimane, au Sénégal, en Argentine, à Amsterdam et à Paris.
Mémoire de la colonisation, de la Première Guerre mondiale, de la Shoah... Dans son livre, l’auteur de 31 ans creuse dans les souvenirs et l’histoire mystérieuse d’un auteur disparu des radars. Ce récit, mêlant fiction et vérité, ne vient pas de nulle part, il est inspiré du destin tragique de l’écrivain malien Yambo Ouologuem.
Décédé en 2017 à l’âge de 77 ans, il est le vainqueur du prix Renaudot en 1968 pour son premier roman Le Devoir de violence. C’est la première fois dans l’histoire de la prestigieuse récompense qu’un homme originaire du continent africain reçoit cette distinction. Mais voilà, le jeune écrivain qu’il est n’a pas longtemps savouré sa victoire.
Et pour cause, de nombreuses voix s’élèvent presque aussitôt pour dénoncer ses écrits, estimant que le texte de Yambo Ouologuem, une saga fictionnelle sur huit siècles sur des seigneurs féodaux africains du nom des Saïfs, insinue que des chefs locaux ont contribué au colonialisme en Afrique. On lui reproche d’être un traître, surtout au regard du contexte international des années 1960, période des indépendances.
L’affaire du “plagiat”
La colère à son égard ne désemplit pas. Pis, elle est accompagnée d’une polémique parallèle. Au même moment, des auteurs reconnaissent dans les lignes de Yambo Ouologuem leurs propres textes. Certains, comme André Schwartz-Bart, sont flattés. D’autres portent plainte, à l’instar de l’auteur anglais Graham Greene.
Yambo Ouologuem ne s’est jamais caché de ces emprunts. Ils s’inscrivent dans sa pratique littéraire. Cependant, comme se remémore la Radio télévision Suisse, “il n’est pas encore question d’intertextualité [terme désignant l’ensemble de textes mis en relation dans un seul et unique texte, NDLR] à l’époque et les emprunts nombreux et avérés à Maupassant, Flaubert, la Bible ou le Coran font scandale”.
A travers lui, c’est son pays natal , le Sénégal, et au-delà du pays de la Teranga, toute l’Afrique au sud du Sahara qui s’enorgueillissent de compter parmi leurs fils un tel talent.Et on espère que le meilleur est à venir pour lui
On ne sait pas s’il caressait ce ...secret espoir, mais depuis hier mercredi 3 novembre 2021, Mohamed Mbougar Sarr est entré dans l’histoire de la littérature francophone. « La Plus Sécrète Mémoire des hommes», son quatrième roman, publié aux éditions Philippe Rey/Jimsaan, lui a valu en effet le prix Goncourt 2021 qui lui a été remis au restaurant Drouant, dans le quartier de l’Opéra à Paris, comme le veut la tradition.
Avec cette distinction, c’est une performance exceptionnelle que vient d’accomplir l’écrivain de 31 ans, non seulement du fait de son jeune âge, mais aussi parce qu’il a été vainqueur dès le premier tour avec six voix sur les dix que compte le jury.
On comprend donc sa joie et sa fierté légitime dans la mesure où le Goncourt est le plus ancien et le plus prestigieux des prix littéraires décernés en France. Attribué pour la première fois en 1903, comme l’avaient souhaité les frères de Goncourt ( Edmond et Jules) dans leur testament, il récompense chaque année «le meilleur ouvrage d'imagination en prose paru dans l'année». Si le vainqueur ne reçoit qu’un chèque symbolique de dix euros, soit environ 6500 franc CFA, une grande notoriété et un succès commercial l'attendent généralement.
Avec ce prix, Mohamed Mbougar Sarr trône désormais à côté de monuments de la littérature française et francophone tels Georges Duhamel, Marcel Proust, André Malraux, Simone de Beauvoir et René Maran, le premier Noir a obtenir le Graal il y a exactement cent ans avec son œuvre Batouala, publiée en 1921.
Autant dire qu’il a beau être tout petit, il est entré dans la cour des grands, ce que jusqu’à présent aucun de nos écrivains d’expression française n’est parvenu à faire. Dieu seul sait pourtant si l’Afrique subsaharienne a produit d’immenses talents, parmi lesquels Léopold Sédar Senghor, Ahmadou Kourouma, Mongo Beti, Amadou Hampâté Bâ, Biraogo Diop, Cheikh Hamidou Kane, Camara Laye, Bernard Dadié, Ferdinand Oyono et Nazi Boni.
MBOUGAR SARR, DANS LA PLUS SECRÈTE MÉMOIRE DES AUTEURS DE GÉNIE
Le Goncourt du Sénégalais est une consécration pour un auteur noir qui survient 100 ans après celle du Martiniquais René Maran qui fut le premier noir à obtenir le prix Goncourt pour son livre «Bataoula».
Les pronostics de la critique littéraire se sont avérés justes. Le Sénégalais Mouhamed Mbougar Sarr a remporté hier le prestigieux prix Goncourt pour son roman «La plus sécrète mémoire des hommes». Une consécration pour un auteur noir qui survient 100 ans après celle du Martiniquais René Maran qui fut le premier noir à obtenir le prix Goncourt pour son livre «Bataoula».
«Ce livre est un vertige, c’est une prouesse, c’est un très grand livre. Et je pense que l’unanimité de la critique en saluant ce livre ne fait que rendre justice à un texte qui va être fondateur, un texte qui constitue le tournant des lettres africaines», soutenait, il y a quelques semaines, le journaliste et écrivain Elgas sur le roman de Mouhamed Mbougar Sarr avant d’ajouter de manière prémonitoire que c’est un magnifique prix Goncourt. En effet, cet ancien enfant de troupe de 31 ans devient ainsi le plus jeune auteur à gagner le prix Goncourt depuis 1976 et le deuxième écrivain noir, succédant ainsi à René Maran pour son livre «Batouala», 100 ans après. Fils de médecin, Mouhamed Mbougar Sarr a fait ses humanités au prytanée militaire de Saint-Louis-du-Sénégal. Beaucoup de métiers lui venaient en tête à cette époque, médecin, footballeur, militaire, journaliste, avocat, professeur... Et à l’heure des études supérieures, il choisit une autre filière d’élite, les classes préparatoires littéraires en France, dans un lycée de Compiègne, au nord de Paris.
UNE DECLARATION D’AMOUR FAITE A LA LITTERATURE
Dans le livre, le narrateur du roman, Diégane Latyr Faye, jeune écrivain sénégalais, mène l’enquête pour savoir ce qu’est devenu l’auteur d’un livre mythique et introuvable, “Le Labyrinthe de l’inhumain”. Écrit des décennies plus tôt par un certain TC Elimane, l’ouvrage a connu un immense succès avant d’être descendu en flammes, son auteur accusé de plagiat .Voilà pour le roman. Mais c’est une histoire vraie, très proche, qui l’a inspiré : celle de l’écrivain malien Yambo Ouologuem. En 1968, son “Devoir de violence” reçoit le prix Renaudot, attribué pour la première fois à un écrivain noir. Le livre remporte un énorme succès, jusqu’à ce que le supplément littéraire du «Times» l’accuse de plagiat en 1972. Le scandale poursuit Yambo Ouologuem jusqu’à sa mort, en 2017. Plus qu’une enquête,“La Plus Secrète Mémoire des hommes” est une réflexion sur le métier d’écrivain. C’est pourquoi, Elgas, qui est aussi l’un des auteurs actuellement à avoir le vent en poupe, trouve que ce livre est un texte qui renoue avec la littérature sans facilité, sans produits industriels, sans une manière en quelque sorte de courir derrière le lecteur. «Ce livre chante la littérature. On y voit tous les sentiments humains décrits. Il y a de l’amour, il y a de la fulgurance, il y a parfois de la colère, il y a le rapport à la mémoire qui se trouve dans le titre. Il y a la quête, le polar, presque la mort, la rivalité. Ce livre est une porte d’entrée pour aimer la littérature », affirme l’auteur de «Un dieu et des Mœurs».
A en croire Elgas, c’est un livre qui chante la littérature. Il sérine que ce livre, par sa son ambition, par sa force, par son style, par sa construction, par sa complexité, s’impose comme l’ouvrage qui domine dans la rentrée littéraire française. «Que ce soit le pouvoir, que ce soit la religion, que ce soit l’homosexualité... C’est quelqu’un qui aborde tous ces sujets avec beaucoup d’aisance », affirme le président de l’association des écrivains du Sénégal. Pour lui, l’auteur de «Terre Ceinte» est un jeune qui vient faire découvrir une nouvelle écriture.
PAPE ALIOU SARR, JOURNALISTE CULTUREL : «C’EST 459 PAGES DE DELECTATION LITTERAIRE»
Pour le journaliste culturel Pape Alioune Sarr, ce livre représente 459 pages de délectation littéraire. «Où l’écriture est un peu à la recherche d’un homme qui a été oublié dans l’histoire. On fait un clin d’œil à Yambo Ouologuem. Et c’est cette quêté-là, cette conquête qui part d’un rien, du vide et finit par un polar. C’est ce qui fait un peu le charme de ce livre salué par toute la critique littéraire du Sénégal et d’ailleurs », explique l’animateur des «Belles Lignes» sur «Itv». Pour lui, tout le monde savait que Mbougar Sarr était au-dessus.
PRIX GONCOURT, LES RETOMBEES POUR LE LAUREAT
A 31 ans, Mohamed Mbougar Sarr est le premier écrivain d’Afrique subsaharienne à être consacré par le plus prestigieux des prix littéraires
A 31 ans, Mohamed Mbougar Sarr est le premier écrivain d’Afrique subsaharienne à être consacré par le plus prestigieux des prix littéraires. Il est également le plus jeune lauréat depuis Patrick Grainville en 1976. « Il n’y a pas d’âge en littérature. On peut arriver très jeune, ou à 67 ans, à 30 ans, à 70 ans et pourtant être très ancien », a commenté l’heureux élu. « Avec ce jeune auteur, on est revenu aux fondamentaux du testament du Goncourt, a indiqué Philippe Claudel. 31 ans, quelques livres devant lui. Espérons que le Goncourt ne lui coupera pas son désir de poursuivre. » « Ça s’est fait au premier tour. C’est écrit de façon flamboyante, a ajouté Paule Constant, autre membre du jury. C’est un hymne à la littérature. »
Outre la reconnaissance des pairs et le prestige que rapporte une telle réponse, sur le plan financier, pas grand chose ou presque ! Le prix Goncourt, décerné par un jury de sept hommes et trois femmes, rapporte un chèque de 10 euros symbolique à son lauréat.
Toutefois grâce à l’exposition qu’il permet au roman primé, les ventes peuvent être décuplées. Le prix garantit des ventes en centaines de milliers d’exemplaires. À titre d’exemple, Hervé Le Tellier, qui a remporté ce prix en 2020, a même dépassé le million d’exemplaires en moins d’un an avec son roman l’Anomalie.
PRIX GONCOURT, LE MINISTRE DE LA CULTURE CONGRATULE MBOUGAR SARR
Le jeune écrivain Sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du Prix Goncourt 2021, a fait honneur au Sénégal et à l’Afrique, a salué, mercredi le ministre de la Culture et de la Communication.
Dakar, 3 nov (APS) - Le jeune écrivain Sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du Prix Goncourt 2021, a fait honneur au Sénégal et à l’Afrique, a salué, mercredi le ministre de la Culture et de la Communication.
’’En remportant, ce mercredi 03 novembre 2021, le très convoité Prix Goncourt, le jeune écrivain Mohamed Mbougar Sarr a fait honneur au Sénégal et à l’Afrique’’, a déclaré Abdoulaye Diop.
Dans un communiqué transmis à l’APS, le ministre a rappelé qu’il y a exactement un siècle, ‘’un Noir, René Maran, alors administrateur de colonie en Oubangui Chari, remportait ce Prix prestigieux pour son inusable Batouala’’.
’’Si nous nous réjouissons de cette distinction, elle ne nous surprend guère de Mohamed Mbougar Sarr qui, dans l’humilité et la ténacité souriante, des fils de la Terre, nous a toujours et régulièrement servi des œuvres d’une exquise qualité tant par la démarche et le mouvement de l’écriture que par la richesse des thèmes puisés dans le vécu et dans la mémoire, et richement encadrés par un intertexte assis sur une impressionnante culture littéraire’’, a souligné Abdoulaye Diop.
Il a exprimé ’’la fierté de tout le Sénégal à travers l’exploit de ce fils d’une terre, celle de Léopold Sédar Senghor et de Cheikh Moussa Ka, où la littérature, sous toutes ses formes, a élu domicile depuis les temps anciens’’.
’’Au nom du chef de l’Etat, et de tout le peuple sénégalais’’’, Abdoulaye Diop a adressé ’’nos très vives félicitations à Mohamed Mbougar Sarr (…) pour avoir élevé si haut l’image de notre littérature et de notre créativité’’.
LE PRIX GONCOURT DE MOHAMED MBOUGAR SARR FAIT LA FIERTÉ DU SÉNÉGAL
À la librairie des Quatre Vents, à Dakar, l’ouvrage s’est vendu comme des petits pains dès l’annonce de la nouvelle. « On a été dévalisé, ça s'est vraiment vendu en moins de dix ou quinze minutes »
Le prestigieux prix Goncourt a été attribué à l’écrivain sénégalais Mohamed Mbougar Sarr ce mercredi pour son livre La plus secrète mémoire des hommes. Le président Macky Sall a salué une « belle consécration qui illustre la tradition d’excellence des hommes et femmes de lettres sénégalais ». Un prix qui fait aussi la fierté de l’Association des écrivains du Sénégal.
Coincidence : au moment de la remise du prix, les membres de l’Association des écrivains du Sénégal étaient justement réunis pour préparer la journée internationale de l’écrivain africain, qui sera célébrée dimanche.
Alioune Badara Bèye est le président de l’Association. Pour lui, Mohammed Mbougar Sarr a osé abordé dans ses ouvrages des sujets délicats. « Que ce soit le pouvoir, que ce soit la religion, que ce soit l'homosexualité... C'est quelqu'un qui aborde tout ces sujets avec beaucoup d'aisance, explique-t-il. C'est un jeune qui vient faire découvrir une nouvelle écriture ».
De l’audace, du renouveau, par celui qui fut un brillant élève rappelle l’auteur et metteur en scène Pape Faye. « Il est jeune c'est vrai. Déjà il avait remporté dans le cadre du concours général le premier prix de philosophie, d'histoire-géographie... Très tôt, il a été décoré et élevé au grade de chevalier national de l'ordre du mérite par le président de la République ».
CONFLUENCE, SUR LES DESTINS CROISÉS DE CHEIKH IBRA FALL ET CHEIKH ANTA DIOP
EXCLUSIF SENEPLUS - Alpha Youssoupha explore à travers son livre, ce chantier, que d’aucuns pourraient qualifier de saugrenu, du rapprochement de deux fortes personnalités du 20e siècle, qu’en apparence rien ne permet de mettre en parallèle (1/2)
Ousseynou Bèye de SenePlus |
Publication 03/11/2021
Un nouveau livre, au titre fort évocateur, va paraître (Editions Omayal) en deux tomes : Confluence,Spiritualité et sciences dans l’action de Cheikh Ibrahima Fall et la pensée de Cheikh Anta Diop (1). On l’aura remarqué, la maison d’édition est également un nouveau-né. Son auteur ? Un écrivain qui vient frappe fort à la porte des grands, avec sa belle plume. Il se nomme Alpha Youssoupha Guèye.
Mais laissons plutôt nous le présenter, le préfacier qui n’est personne d’autre que Boubacar Boris Diop, l’écrivain émérite (récemment lauréat du Prix international de littérature Neustadt) :
… À peine la quarantaine entamée, Alpha Youssoupha Guèey qui totalise dix-huit années d’expérience professionnelle, est membre de l’Ordre National des Experts-Comptables et des Comptables Agréés du Sénégal (ONECCA) tout en étant chercheur universitaire en sciences de gestion.
L’auteur de Murambi, le livre des ossements n’a pas été peu impressionné lors de sa première rencontre avec son futur confrère :
Je découvre surtout très vite qu’il est depuis toujours habité par une réelle passion pour les grands débats d’idées qui agitent depuis le siècle dernier l’Histoire universelle et que même la familiarité avec le maniement des chiffres ne l’en a heureusement pas « guéri ». Guèye n’en fait d’ailleurs pas mystère : “ Je suis, dit-il, attentif depuis mes 18 ans aux questions de l’Islam et des autres religions et à la cause noire, à celle de l’Afrique et à leurs interactions.”
Pourquoi cette œuvre ?
A la lumière de ces éclairages, on comprendra aisément qu’Alpha Youssoupha explore (le premier à s’y essayer ?) ce chantier, que d’aucuns pourraient qualifier de saugrenu, du rapprochement de ces deux fortes personnalités du 20e siècle, qu’en apparence rien ne permet de mettre en parallèle, Cheikh Ibrahima Fall et Cheikh Anta Diop. Entreprise certes, d’une exceptionnelle ambition.
L’auteur de l’essai est conscient du défi qui se présente à lui, et dès les premières lignes de son introduction, nous en fait l’aveu :
“Évoquer deux personnalités de l’histoire du Sénégal connus dans deux différents domaines cloisonnés des hommes du commun, pour en observer une confluence peut sembler une gageure.”
Pourtant le lecteur aura le plaisir de lire une plume alerte lui narrer la vie et l’œuvre de deux illustres acteurs de l’Histoire du Sénégal. D’abord de Cheikh Ibrahima Fall, un maître spirituel célèbre certes au Sénégal, mais très peu connu quant au fond de son action et de sa pensée. De Cheikh Anta Diop aussi, qui partage avec Cheikh Ibra d’être paradoxalement une célébrité mal connue quant à la signification profonde de son oeuvre. Alpha Youssoupha Guèye comble ici, avec bonheur, ces lacunes à travers une érudition remarquable et une écriture des plus fines.
Ainsi, pour schématiser, le Tome 1 de l’œuvre sera consacré au disciple de Cheikh Ahmadou Bamba et le Tome 2 au savant universellement connu, avant que la « confluence » ne soit mise en exergue. Mais ne nous y méprenons pas : il ne s’agit point d’études cloisonnées de personnalités qui n’auraient rien à voir entre elles ; au contraire, l’auteur navigue souvent de l’un à l’autre, et vice-versa. Du reste, Boris, à sa manière habituelle, nous aura prévenus dans sa préface :
Alpha Youssoupha Guèye…ne se contente pas de superposer deux posters géants : il les fait au contraire se rencontrer en plein mouvement à l’image du Nil bleu et du Nil blanc de l’Égypte si chère à Cheikh Anta Diop.
Mais qu’est-ce donc que la confluence ?
On s’en doute bien, le scientifique ne pouvait manquer dès le départ, de camper le contexte et de définir ses concepts :
…Dans la matière scientifique qu’est la géographie, la confluence se manifeste par un point où un cours d’eau, appelé affluent, se jette dans un autre.
En géologie, elle est la rencontre de deux vallées glaciaires.
En informatique, la confluence revêt la propriété d'un système de réécriture qui est convergent.
Dans le Coran, la notion de confluence est souvent utilisée pour désigner la réunion d’eau salée et d’eau douce observable par exemple en Irak ou à Saint-Louis et Dakar, au Sénégal. La confluence est également citée en Égypte pour l’endroit situé entre le Nil bleu et le Nil blanc.
Dans les sourates 18 (la Caverne) et 55 (le Tout-Miséricordieux) du Coran, la confluence est donnée comme preuve de la miséricorde divine et objectif d’une quête spirituelle déterminée à travers le prophète Moïse et son serviteur (Josué)…
Et l’auteur de nous préciser :
Ces définitions nous amènent à l’idée générale qui sous-tend ce travail, à savoir : examiner les relations possibles que la spiritualité et la science sont susceptibles d’entretenir, dans une confluence, au bénéfice de l’homme. Notre étude porte sur Cheikh Ibrahima Fall et Cheikh Anta Diop pour leurs contributions respectives majeures.
Il montrera aussi comment le concept est né dans l’œuvre de Cheikh Anta Diop, notamment dans Nations Nègres et Culture et dans L’Unité Culturelle de l’Afrique Noire.
Qui était Cheikh Ibrahima Fall, et quel a été son apport à l’Islam et à l’Histoire ?
La réponse de l’auteur à cette question coule de source :
Cheikh Ibrahima Fall a donné une lecture nouvelle de la soumission connue depuis le prophète Abraham (Ibrahim_AS) ; ce qui avait valu au père des prophètes son titre de premier soumis. Cheikh Ibrahima Fall a traduit en actes la prière sur le prophète Mouhamed (PSL) ; démontré par sa conduite l’humilité assignée aux hommes ; donné l’effet de la demande de soumission ou de prosternation indiquée aux Anges vis-à-vis d’Adam. Dans son action, il est observé comment il a eu à surmonter l’épreuve de Iblis [Satan] qui était pratiquant et sachant, même si son savoir teinté de vanité et d’orgueil ainsi que son rang l’ont perdu devant l’apparente imperfection d’Adam. En effet, dans cet épisode coranique crucial absent de la Bible, Iblis a refusé d’exécuter l’ordre divin de se prosterner devant Adam.
Dans son action, Cheikh Ibrahima Fall a rappelé la relation du Prophète avec ses compagnons, de même que la révérence due au Prophète et applicable à son héritier spirituel légitime.
Cet ‘héritier spirituel légitime’ à qui ‘la révérence est due’, aux yeux de Cheikh Ibrahima Fall, n’est autre que Cheikh Ahmadou Bamba. Mais Alpha Youssoupha prend bien soin de nous préciser que : “Nous ne parlons pas de la soumission à tous les guides sans distinction qui est en passe de devenir un fléau au Sénégal… » Du reste, il ne manquera pas, par ailleurs, de nous révéler le contenu spirituel de cette soumission au Guide.
Mais auparavant, il se fera le devoir de nous entrainer dans la biographie envoûtante de celui que l’on appellera avec affection et dévotion LàmpFaal. Son lieu de naissance et de jeunesse, avec une monographie précise de ce qui deviendra la contrée Mouride ; son appartenance familiale, avec une riche documentation sur la généalogie du chef spirituel ; la rencontre sublime avec son futur guide : moment historique, moment émotionnel, moment d’une haute portée spirituelle…
Cheikh Moussa Ka, le poète très présent dans l’œuvre de Cheikh Anta Diop, s’épanchera dans des vers pour célébrer l’événement :
Seriñ ba naa ko Cheikh Ibra Faal
Ndigal foo fëqe
Mu wax ko tektal ya fa moom
Seex Bamba wax ko la fa moom
Mu xam ni gis na ka ko moom
Mu daadi fab mbirem joxe
Ainsi, le maître de la pensée et de la parole, le poète immortalisa l’instant fugitif, fugace. Mieux, en chroniqueur de l’actualité, en historien, il prend date pour la postérité :
Ma wax la bis ba ndax mu wóor
Ñaar fukki fan ci weeru koor
Bisub dibéer la mbir ma woon
Seex Ibra yaa réyi pexe.
L’essayiste nous donne la traduction française de ce témoignage poétique :
Cheikh Bamba lui demande l’objet de sa venue
Cheikh Ibra lui donne des indices sur le maître qu’il cherche
Cheikh Bamba lui répond
Cheikh Ibra le reconnaît comme son maître et lui prête allégeance.
Que je te dise le jour de cet événement pour que ça soit sûr
c’est le 20e jour du mois de ramadan
un jour de dimanche que l’événement a eu lieu
Cheikh Ibra, tu es très intelligent.
Sur les pas du maître spirituel, l’auteur nous mènera également à Saint-Louis du Sénégal, étape importante dans l’ascension de Cheikh Ibrahima Fall vers les sommets ; ville où il affirmera son modèle économique, son entregent diplomatique, en particulier dans ses relations avec les colons français ; son rôle dans le retour d’exil de Khadimou Rassoul, ses relations avec les autres guides religieux d’autres obédiences… seront mis en exergue.
Évidemment, la mission de Cheikh Ibra Fall, n’aurait eu aucun sens s’il ne s’était pas adossé au socle de la pensée de son guide et de la voie qu’il avait tracée, la voie Mouride. C’est pourquoi, Alpha Youssoupha consacre un long et riche chapitre à cette confrérie ainsi qu’aux ‘apports fécondants’ que Cheikh Ahmadou Bamba recevra des autres maîtres spirituels de son époque, notamment des preux chevaliers Cheikh Oumar Foutiyou Tall et Maba Diakhou Bâ.
L’auteur à l’érudition remarquable (encore une fois) nous aidera aussi, tout au long de ses développements, à décrypter le message du Maître spirituel des Baay Faal.
De la ‘tarbiya’ de Cheikh Ibra au culte de l’humilité et celui de l’environnement, en passant par ’l’opérationnalisation de la valeur Travail’ – ‘valeur cardinale du Mouridisme’ -, à son ’expérience spirituelle, son ‘njebelu’ - notion de soumission au Guide - … l’essayiste décortique méticuleusement les fondamentaux de la Voie Baay Faal.
Cette voie est sous-tendue par une philosophie qui se fonde sur la source islamique, le mysticisme de Cheikh Ibrahima Fall, les notions de fidélité au Guide et de vénération du Guide, et aussi sur les concepts de morale et de discipline reconnus sous le vocable du ndigal.
Enfin, Alpha Youssoupha n’a pas manqué de tirer les enseignements qu’il a relevés de l’œuvre de Làmp Faal. Son ouverture d’esprit et son humanisme, sa qualité d’artisan et de sage de l’Islam, ses théories économiques, sa conception du pluralisme religieux… et tout le contenu de son ouvrage intitulé Jazboul Mourid.
La revue ainsi esquissée relativement à la vie et à l’œuvre de Cheikh Ibrahima Fall, est loin d’épuiser la très riche teneur du Tome 1 de Confluence… dont le second tome est en grande partie consacré, comme nous l’avons déjà indiqué, à un autre valeureux fils du Sénégal et de l’Afrique, le savant, professeur Cheikh Anta Diop.
Pour projeter le débat dans sa continuité, l’auteur, dans la partie introductive du tome 2, revient sur sa quête de l’identité et de la philosophie de Cheikh Ibrahima Fall, avant de faire le lien avec son filsadoptif, Cheikh Anta Diop :
L’action du fondateur de la Voie Baay Faal qui s’inscrit entièrement dans le cadre islamique a d’emblée posé de fortes interrogations puisque sa posture était nouvelle. Il a souffert de rejets et d’incompréhensions persistants. C’est par une quête aux confins de la vérité ontologique que nous avons pu arriver à percevoir la cohérence et le sens profond de son action. La place du Noir dans toutes les traditions et en définitive dans l’Islam, une part importante de la revivification de la dernière religion révélée en acte, le don de soi, le positionnement dans la période coloniale pour faire émerger une voie née en Afrique qui pose les jalons d’un universel, sont les différents versants de son action. Cette action estmontée à un niveau où son fils adoptif Cheikh Anta Diop l’a rejoint avec d’autres engagements, d’autres pensées et d’autres découvertes. Cette frontière de retrouvailles en hauteur, ce sommet du Kilimandjaro pourrait simplement s’appeler la Vérité.
La jonction initiale ainsi amorcée, en attendant l’approfondissement des liens qui sous-tendent la Confluence, la présentation du savant et de son œuvre peut être entreprise.
Bravo Mbougarr ! Tu as rehaussé et ton pays et les écrivains de ton pays. Tu as gagné non pour tous, mais pour les meilleurs, ceux qui travaillent et se respectent en prenant le temps de bien travailler
Puisse le Sénégal ne pas passer sous silence cette haute distinction d’un jeune écrivain sénégalais devenu si Grand et qui honore un pays qui ne s’est jamais lassé de donner au monde une créativité prodigieuse !
Mbougar l’a fait !
Il a écrit, et pas au charbon, une page d’histoire. Celle-ci est de celles qui restent.
Boris aussi l’a fait ! J’ai eu à saluer ce grand frère génial, rebelle et têtu, comme si c’est de cette manière que l’on accède aux étoiles ! Il n’a pas tort ! Un écrivain, çà gueule, refuse, interpelle, condamne.
Boris, on aime ou on n’aime pas, mais c’est Boris avec son flegme et cela fait du bien !
Oui, Mbougar l’a fait et il l’a fait au pays des Grands Blancs dans une langue qui ne leur appartient plus. Senghor l’a prouvé, il y a bien longtemps !
Je suis si heureux !
Heureux pour la littérature sénégalaise qui battait de l’aile pour sa relève, côté « roman », même si nous avons eu sans beaucoup parler d’eux, de Mamadou Samb, Pape Samba Kane, Sokhna
Mbenga, Ramatoulaye Seck Samb, Abdoulaye Fodé Ndione, pour ceux que j’ai eu à lire.
Je lis peu de romans, sauf les auteurs majeurs qui m’ont laissé une forte impression ou ceux que l’on me recommande de lire et qui sont, dans leur majorité, de fabuleux écrivains d’autres pays.
Disons-le également sans peur : la qualité des maisons d’édition, compte !
Comme président du jury littéraire des Jeux de la Francophonie à Abidjan, j’ai découvert et rencontré le « jeune » Mohamed Mbougar Sarr. Il avait obtenu la médaille littéraire de bronze. Voilà ce bronze mué en or massif avec le Prix Goncourt 2021 !
J’espère que Zemmour et Marine enverront à Mbougar un bisou… pas empoisonné ! Passons !
Bravo Mbougar ! Bravo ! Désormais ce pays te doit une stèle ou quelque chose d’autre qui lui ressemble.
Tu as rehaussé et ton pays et les écrivains de ton pays. Tu as gagné non pour tous, mais pour les meilleurs, ceux qui travaillent et se respectent en prenant le temps de bien travailler, pour apporter autre chose que ce qui existe depuis Kourouma, Dadié, Ousmane Socé, Sembene, Mariama Ba, Cheikh Hamidou Kane, pour ne citer que ceux-là !
On sentait que tu venais, pas à pas, comme un lumineux pèlerin et avec une modestie si touchante. Tu es arrivé ! Mais fais de cette halte de pourpre un gîte à vite quitter pour encore le meilleur. Vole encore plus haut que Le Goncourt.
Le Goncourt passera, mais il ne s’oublie jamais.
Mbougar, étonnes-nous encore et encore !
Je ne demanderai pas au ministre de la Culture encore moins au président de la République de te féliciter bien haut et de te recevoir pour l’honneur fait au Sénégal. Ils le feront bien avant le dessert.
Ils ont un respect monumental pour tout ce qui touche les arts et les lettres ! Je le sais et il ne pourrait en être autrement, malgré l’envahissement politique qui oblitère tout et fait sourire quand on parle de nos hommes politiques face aux lettres et aux arts.
« Le fond de la pirogue, n’est pas toujours le fond de l’eau … » La culture, n’est-ce pas « … la blessure la plus proche du soleil ? »
Je souhaite que le président et le ministre te lisent surtout. Cette œuvre couronnée de ce Prix doit être lue.
Il est bon de parler et de chanter Mouhamed Mbougar Sarr, mais le plus important est d’aller le lire et de garder ainsi en mémoire, comme une récitation d’école, ce qu’il a dit et conté.
L’œuvre parle plus que l’écrivain.
À votre tour, vous le peuple sénégalais, de saluer ensemble un fils qui, au cœur de la France, de l’Europe, de la Francophonie, a planté le drapeau national et celui de l’Afrique.
J’allai dire encore un Sérère, comme l’autre ! Mais le « Mbougar Sarr « m’inviterait à croire que c’est bien encore un Sérère qui nous fait ce coup !
Ce pays est si beau quand il porte le visage de la Culture. Un visage poli et racé comme l’esprit sait l’être. Un visage de conquête, de paix, de joie, de sérénité, d’avenir.