SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
11 décembre 2024
Développement
Par Mamadou Omar NDIAYE
VIATIQUE POUR NOS JEUNES NOUVEAUX MAITRES
il faudra tenir un langage de vérité aux populations dès le départ pour leur faire accepter d’inévitables sacrifices. C’est dès maintenant qu’il faut poser des actes forts pour la réussite du quinquennat
Vox populi, vox dei. Voix du peuple, voix des dieux. Le peuple souverain sénégalais s’est donc rendu massivement aux urnes dimanche dernier et, dans son écrasante majorité, a porté à la magistrature suprême de notre pays Bassirou Diomaye Faye.
Venu de Ndiaganiao, en pays sérère, issu d’un milieu extrêmement modeste mais propulsé dans la haute administration sénégalaise grâce à de brillantes études rendues possibles par l’école publique avant d’accéder à la présidence de la République, Bassirou Diomaye Faye est un pur produit de l’ascenseur social sénégalais. Lequel fonctionne à merveille 64 ans après l’indépendance de notre pays, ce dont il convient de se féliciter.
Les Sénégalais doivent conserver jalousement ce modèle social de méritocratie républicaine qui donne leurs chances à tous les citoyens de ce pays d’accéder aux responsabilités les plus élevées et à toutes les charges indépendamment de leur fortune ou de leur naissance. Pourvu que l’on travaille dur, à la force du poignet on peut y parvenir aux plus hautes cimes. De ce point de vue, la success story de Bassirou Diomaye Faye et celle de son prédécesseur Macky Sall sont à inscrire en lettres d’or dans la saga de notre jeune Nation. Sans écouter les Cassandres mais aussi les sarcasmes de ceux qui raillaient voire parlaient avec mépris de ce « petit Sérère », de ces « aventuriers » et autres « inexpérimentés », les Sénégalais ont choisi parmi les 19 candidats en lice celui qui leur semblait le meilleur sous tous rapports c’est-à-dire le plus intègre, le plus humble, le plus sincère étant donné que de sa compétence ainsi que sa capacité à bien diriger ce pays, ils n’en ont jamais douté.
Personnellement, c’est les yeux fermés que j’ai voté pour le nouveau président parce qu’il m’a convaincu et parce que le combat mené par son parti depuis sa création, sous la houlette d’Ousmane Sonko, m’était sympathique. Il me rappelait en tous points celui qu’en 1988, des idéalistes comme moi (mais aussi Me Cheikh Koureyssi Ba, Me Ousmane Ngom, Pape Samba Mboup, Cheikh Tidiane Touré, feu Abdoulaye Faye, Mody Sy, Clédor Sène et autres) avions mené dans les années de braise du « Sopi » contre le pouvoir socialiste.
L’injustice subie par ce parti (Pastef), les complots contre son principal dirigeant, la répression sanglante dont il a été l’objet, sa dissolution pure et simple…tout cela a contribué à me révolter.
Bassirou Diomaye Faye a été élu et bien élu mais c’est maintenant seulement que le boulot commence pour lui. Il n’aura pas droit à un état de grâce tellement les attentes sont nombreuses, pressantes et les urgences multiples. Au premier rang de ces problèmes, l’économie qui se trouve presque en cessation de paiement malgré les belles statistiques sans cesse exhibées par le régime sortant.
Dette stratosphérique, recettes en berne, dépenses qui explosent, masse salariale exponentielle, subventions ruineuses…Le tableau est effrayant. Il faudra effectuer des coupes claires pour ne pas dire qu’à court terme, un ajustement structurel nous paraît inévitable. Pour cela, il faudra tenir un langage de vérité aux populations dès le départ en leur faisant une présentation sans fard de l’héritage en matière économique pour leur faire accepter d’inévitables sacrifices. Un des moyens de faire accepter la pilule, ce sera bien sûr de prêcher par l’exemple et de diminuer immédiatement le train de vie de l’Etat en supprimant des institutions budgétivores et inutiles comme le CESE, le HCCT, la Commission pour le dialogue des territoires et autres machins destinés à caser une clientèle politique parasitaire. Cela tombe bien et bonne nouvelle puisqu’il paraît que cela fait partie des priorités de nos nouveaux dirigeants. Il leur faudra aussi faire subir une cure d’amaigrissement au parc automobile de l’Etat en roulant modeste.
Fini, les véhicules 4x4 ou 8x8 à 60 millions, 80 millions voire 100 millions de francs ! Dans un pays parmi les plus pauvres au monde, rouler dans de tels carrosses, c’est assurément insulter le peuple. Pour le reste, c’est bien beau de vouloir réaliser la réconciliation nationale mais elle ne devrait pas se faire au détriment de la reddition des comptes et de la justice. Quelques têtes de voleurs du régime sortant devront donc absolument être offertes en offrande au peuple sous peine de voir les nouveaux dirigeants accusés de complicité avec des criminels économiques. Ce ne sont là bien sûr que quelques exemples de ce qu’il conviendra de faire dès les premiers jours étant donné que Pastef dispose d’un excellent projet sur la base duquel les Sénégalais ont plébiscité son candidat. Au vu de la maestria avec laquelle ce parti à mené son combat contre le régime maffieux de Benno Bokk Yaakar, de la manière admirable (à bluffer les old fashioned comme moi !) avec laquelle ses jeunes maîtrisent le numérique, principalement les réseaux sociaux, de la cohorte de cadres très bien formés dont il dispose, de son excellent programme sur lequel ont cogité de brillants cerveaux, je ne doute pas un instant que ce parti sache ce qu’il a à faire. N’étant pas moi-même un consultant de Pastef, je me contenterai donc de quelques généralités en guise de viatique.
Dream team et banquet de la République
Le président Bassirou Diomaye Faye devra démarrer au quart de tour. Pour cela, il lui faudra choisir des ministres immédiatement opérationnels car les Sénégalais ne leur donneront pas le temps d’apprendre. C’est au pied du mur qu’on reconnaît le maçon et ces ministres devront faire très vite leurs preuves. Il lui faudra donc choisir les meilleurs, constituer une dream team pour s’attaquer immédiatement à la résolution des problèmes des Sénégalais. Certes, des centaines voire des milliers de militants ont investi dans le « projet », que ce soit sur le plan intellectuel, sur le plan matériel ou surtout financier, s’ils ne se sont investis physiquement. D’aucuns parmi eux ont payé leur engagement par l’emprisonnement, la perte de leur emploi ou la privation de revenus. Je ne parle évidemment pas de ceux qui ont été tués. Tous ces gens veulent donc un retour sur investissement et leur part du gâteau. Ils exigent leur place au banquet de la République. C’est normal, légitime puisqu’ils ont misé et gagné. Ce n’est donc que justice qu’ils soient rétribués. Seulement voilà, il faudra faire la part des choses et trouver le juste équilibre entre la nécessité de récompenser les militants et les alliés, d’une part, l’impératif de produire des résultats au niveau de l’Etat de l’autre ! Une des choses qui ont le plus perdu le président Macky Sall c’est sa fâcheuse propension à politiser toutes les directions des ministères, toutes les directions générales de sociétés nationales et des agences, toutes les régies financières, toutes les ambassades…bref tout. Qu’importe que l’on soit incompétent pourvu que l’on ait la carte de membre de l’Apr ou que l’on soit estampillé Benno Bokk Yaakar ! Avec les piètres résultats que l’on sait. Si le président Bassirou Diomaye Faye pouvait systématiser l’appel à candidatures pour les fonctions les plus importantes, cela l’aiderait grandement à obtenir de bons résultats ! Mais là aussi pas de panique, ça figure dans son programme.
Encore une fois, cinq ans ça passe très vite et c’est dès maintenant qu’il faut poser des actes forts pour la réussite du quinquennat. L’on sait que généralement les présidents disposent des 100 premiers jours suivant leur accession au pouvoir pour mettre en œuvre les grandes réformes de leur magistère parce qu’après c’est très compliqué. Pour ne pas prêter le flanc à leurs adversaires de l’Apr-Benno, qui voudront très vite instruire leur procès en incompétence, les nouvelles autorités devront agir vite et donner des résultats. Ils devront démentir l’adage selon lequel il n’y a jamais deux sans trois. Après le désastre du passage au pouvoir des islamistes d’Ennahda chassés du pouvoir par les Tunisiens au vu de leur incompétence manifeste, de celui des Frères musulmans du Caire où la révolte du peuple égyptien contre le président Mohamed Morsi a entraîné la prise du pouvoir par les militaires, nos nouveaux maîtres taxés de salafistes par leurs adversaires devront avoir à cœur de réussir.
Créer des centaines de Sedima et ne surtout pas supprimer les fonds politiques !
Oh certes, encore une fois, en cinq ans il n’est pas possible de faire des miracles quand on sait le temps nécessaire pour réaliser un bon projet, de sa conception à sa mise en œuvre en passant par la recherche de financements (il faudra compter avec les procédures bureaucratiques des institutions ou organismes de financement !) surtout qu’au bout de la quatrième année il faudra déjà se mettre en campagne pour une éventuelle réélection. Créer des centaines de milliers voire un million d’emplois durant un quinquennat, ça relève de la légende et il faudra faire des promesses réalistes à nos compatriotes. Leur dire surtout que tout le monde ne pourra pas accéder à l’emploi salarié. C’est surtout dans l’agriculture — n’en déplaise au nouveau président de la République mais il lui faudra encourager la création de dizaines de Sedima à travers le pays car les Prodac ne sont que des variantes tropicales Sovkhoz, ces fermes d’Etat de l’ère soviétique. Autrement dit, des gouffres à milliards. Dans l’agriculture stricto sensu, donc mais aussi dans l’artisanat, la pêche, l’auto-emploi qu’il sera possible d’insérer les milliers de jeunes qui arrivent chaque année sur le marché de l’emploi. Encore qu’il faudra bien oser briser le tabou de notre démographie galopante dont aucun taux de croissance au monde n’arrivera à neutraliser les effets.
Pour le reste, Bassirou Diomaye Faye bénéficie d’atouts non négligeables dont le moindre n’est pas le fait d’avoir été élu sans le soutien des marabouts qui ne pourront donc pas prétendre que ce sont leurs prières qui l’ont porté au pouvoir. Il ne leur doit absolument rien et c’est tant mieux ainsi. Il devra aussi se méfier des griots, communicateurs traditionnels et autres courtisans — bref des « toog muy dokh — qui vont lui tisser une légende tellement dorée, changer ses louanges à un point tel qu’il pourrait croire être un demi-dieu ! S’il ne serait pas Dieu le Père lui-même. Sa porte devra être hermétiquement fermée aux transhumants qui ne pourront que polluer sa gouvernance et le fâcher avec le peuple qui l’a plébiscité. Avec le pouvoir arriveront de nouveaux amis, des lobbyistes de tout poil, des investisseurs tenant des mallettes remplies d’argent. Les signatures de quelques-uns d’entre nos nouveaux maîtres vaudront des milliards, tout le monde sera à leurs pieds, le tapis rouge sera déroulé partout au président Bassirou Diomaye Faye qui, par un décret, un acte, un coup de fil pourra changer radicalement la vie de ses sujets. Difficile de résister à toutes les tentations surtout à l’argent dans un pays où c’est le président de la République qui doit régler tous les problèmes avec des fonds politiques qui ne pourront même pas tenir un mois tellement les sollicitations sont nombreuses. De ce point de vue, je me demande si la promesse de supprimer les fonds politiques n’est pas un peu trop démagogique. Que le nouveau président de la République y réfléchisse à deux fois avant d’appliquer cette promesse ! Surtout, on est tenté de donner à son excellence Bassirou Diomaye Faye ce conseil que donna Mohamed Ali, le grand champion de boxe, à son adversaire Ken Norton qui lui avait cassé la mâchoire au cours d’un combat mémorable. Ce dernier étant venu le voir à l’hôpital les jours suivants, Ali lui avait dit en serrant les dents: « méfie-toi des croqueuses de diamants » ! Eh oui, Bassirou Diomaye, Ousmane Sonko et autres devront se méfier des putains de la République mais de toutes façons elles sont dans les allées de tous les pouvoirs du monde !
Personnellement, tant qu’ils seront dans une ligne de défense absolue de la souveraineté nationale sur tous les plans, mais aussi de relative intégrité, je les accompagnerai inch’Allah tout en priant Dieu de veiller sur eux et de leur permettre de toujours garder leur lucidité afin de ne jamais dévier de leur cap ! Mes vœux de réussite accompagnent le président Bassirou Diomaye Faye et son équipe…
Mamadou Omar NDIAYE
À NDIAGANIAO, BERCEAU DE BASSIROU DIOMAYE FAYE, LA FIERTÉ ET LES ATTENTES SONT GRANDES
Dans ce petit village du centre-ouest, la population rend hommage à l'enfant du cru devenu président. Ndiaganiao se remémore le parcours exceptionnel d'un des siens, de l'enfance studieuse aux défis qui l'attendent désormais
(SenePlus) - À Ndiaganiao, petit village reculé du centre-ouest du Sénégal, l'atmosphère est à la fête depuis la victoire de Bassirou Diomaye Faye à l'élection présidentielle. Dans la maison familiale où il est né, son père Samba Faye, 84 ans, reçoit les hommages des villageois en boitant avec son aide. "Je suis content et fier de mon fils", déclare-t-il au Monde, assurant lui avoir demandé de "satisfaire les Sénégalais" face à leurs "grands espoirs".
Dix jours après sa sortie de prison où il avait été incarcéré pour trouble à l'ordre public, le candidat du parti Pastef a créé la surprise en remportant le scrutin dès le premier tour avec 54,28% des voix, grâce à "la promesse d'un changement radical", selon le journal. Dans son village natal, son score a atteint 80,6%.
L'oncle du nouveau président, l'enseignant-chercheur Diomaye Faye, estime qu'il devra "rester lui-même, être humble et à l'écoute". Il le décrit comme "connecté aux réalités", ayant côtoyé le leader panafricain Thomas Sankara au Burkina Faso.
Son ami d'enfance et de faculté, Mor Sarr, secrétaire du Pastef local, se souvient d'un jeune homme "proche de sa mère pour les tâches ménagères", qui fut aussi "petit berger" et "grand sportif, fan de Zidane".
Dans le village dépourvu d'infrastructures, la commerçante Fabienne Dione affirme : "Nous attendons de lui des changements, comme un hôpital. Il doit investir dans l'éducation". Tous expriment ici leur fierté envers celui qui porte désormais les espoirs du Sénégal.
ZEMMOUR DE NOUVEAU CONDAMNÉ EN FRANCE POUR INJURE RACISTE CONTRE HAPSATOU SY
Les faits remontent à septembre 2018, lors de l'enregistrement d'une émission télé. Eric Zemmour avait alors lancé à l'ancienne chroniqueuse Hapsatou Sy: "C'est votre prénom qui est une insulte à la France. Votre prénom n'est pas dans l'histoire"
(SenePlus) - Le polémiste d'extrême droite Eric Zemmour a été condamné jeudi 28 mars par la cour d'appel de Paris pour injure à caractère raciste, confimant ainsi le jugement de première instance rendu en janvier 2024.
Les faits remontent à septembre 2018, lors de l'enregistrement de l'émission "Les Terriens du dimanche" sur C8. Eric Zemmour avait alors lancé à l'ancienne chroniqueuse Hapsatou Sy: "C'est votre prénom qui est une insulte à la France. Votre prénom n'est pas dans l'histoire, vous êtes dans les tréfonds de la France". Il avait ajouté que sa mère aurait dû l'appeler "Corinne".
Lors du procès en appel, l'avocat général a estimé que s'attaquer au prénom de Mme Sy en raison de son origine étrangère supposée est "un irrespect voire du mépris pour la France", le prénom étant un "attribut essentiel" de l'identité, rapporte l'AFP..
Hapsatou Sy a quant à elle déclaré recevoir "3 à 4 000 messages de haine par jour" et faire l'objet de "harcèlement en ligne" et de "menaces de mort" depuis cette affaire, selon elle rapportée par Le Monde.
Dans son arrêt, la cour d'appel a confirmé la culpabilité d'Eric Zemmour pour "insulte publique en raison de l'origine" et l'a condamné à verser 3 000 euros supplémentaires de frais de justice à la plaignante. Le polémiste devra en outre s'acquitter d'une amende de 4 000 euros et de 3 000 euros de dommages et intérêts.
"C'est une grande victoire qui me dépasse", s'est félicité Hapsatou Sy auprès de l'AFP, y voyant "le bout d'un long calvaire". Son avocat Me Antoine Vey s'est également réjoui de cette décision rappelant "qu'il n'existe pas de prénoms de deuxième zone".
Eric Zemmour a d'ores et déjà fait part de son intention de se pourvoir en cassation. Dénonçant dans un communiqué des "juges politisés", il maintient sa ligne de défense et sa remise en cause de la loi sanctionnant les injures racistes.
PAR Seydoux Barham Diouf
LA POIGNÉE D’ÉPAULE QUI DIT TOUT
Lors de sa rencontre avec Macky Sall, le langage corporel de Diomaye Faye a révélé une communication habile, empreinte de continuité. Au-delà des apparences, son attitude illustrait l'importance de la communication non verbale dans le monde politique
Par opposition à la communication verbale, la communication non verbale représente l’ensemble des interactions entre des interlocuteurs sans l’usage de mots. Et lorsque l'on parle de « non-verbal », il s'agit d'établir une relation avec autrui sans parole. Elle se construit alors de silences, de gestes, de positions, d'attitudes, passe par les expressions faciales et la tenue vestimentaire pour compléter le message auditif. Ce langage corporel peut être conscient ou inconscient, mais s’y attacher permet de mieux faire passer un message, de le crédibiliser, de lui apporter en puissance, et donc de l'influencer. Mais attention, si la communication non verbale peut engendrer un apport de sens positif, elle peut aussi bien produire le contraire et ainsi décrédibiliser les propos de son émetteur. Ce qui justifie son importance dans la communication.
Ainsi, ce chiffre va peut-être étonner plus d'un, mais Albert Mehrabian, chercheur en psychologie, conclut de ses études que seulement 7% de notre communication passe par le langage verbal. Selon lui, 55% de la communication entre individus est issue de l'expression de nos visages et de nos mouvements corporels. 38% de nos échanges dépendent de la voix, ajoute-t-il. On peut donc comprendre pourquoi il faut y prêter attention, et avoir une bonne lecture de la communication non verbale et des émotions.
Candidat élu dès le premier tour à l'élection présidentielle du 24 mars au Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, a été reçu jeudi au Palais de la République par le président sortant, Son Excellence Monsieur Macky Sall. Lors de cette rencontre, le nouveau président de la République s'est encore illustré de différentes manières dans sa communication, surtout verbale. Vêtu d'un beau boubou africain, Son Excellence Monsieur Bassirou Diomaye Faye s'est présenté à son prédécesseur avec une gestuelle bien maîtrisée. Posture, gestuelle et accoutrement ; tout était donc au rendez-vous.
Cependant, un geste a attiré toute mon attention : la main de Son Excellence Bassirou Diomaye Faye sur l'épaule de son prédécesseur, Son Excellence Macky Sall. Contrairement à ce que beaucoup auraient pensé, ce geste n'est pas anodin. En effet, lorsque quelqu'un serre la main de son interlocuteur, il lui arrive de placer une main sur son épaule. Un geste qui peut paraître anodin, et pourtant, la place de cette main peut permettre de définir la personnalité de la personne et de déterminer quels sont ses sentiments envers son interlocuteur.
Ici, Son Excellence Bassirou Diomaye Faye pose sa main gauche sur l'épaule de son interlocuteur, lui regarde droit dans les yeux avec un petit sourire aux lèvres. Ce geste est chargé de significations dans le contexte de la communication politique. Il exprime un profond respect et une affection sincère du président Bassirou Diomaye Faye envers son prédécesseur, marquant ainsi une continuité harmonieuse dans la transition du pouvoir. Ce contact physique entre les deux présidents, associé au regard direct et au sourire, symbolise également un soutien et un encouragement mutuels, renforçant ainsi les liens interpersonnels et favorisant une collaboration constructive.
De plus, ce geste peut être perçu comme une manifestation de confiance et de connexion émotionnelle, renforçant ainsi la crédibilité et l'authenticité de Son Excellence Bassirou Diomaye Faye aux yeux du public. Enfin, il pourrait également servir de stratégie de communication habile pour projeter une image de calme, de contrôle et de coopération, illustrant ainsi son aptitude à naviguer avec grâce et diplomatie dans les interactions politiques.
Il faut donc noter que la communication non verbale joue un rôle crucial dans la façon dont les messages sont perçus et interprétés, surtout dans le contexte politique. Son Excellence Bassirou Diomaye Faye, par son geste délicat de poser sa main gauche sur l'épaule de son prédécesseur, Son Excellence Macky Sall, lors de leur rencontre au Palais de la République, illustre parfaitement cette notion. Ceux/celles qui le critiquaient lors de sa première sortie doivent donc garder le calme et rester silencieux.ses car il maîtrise bien l'art de la communication visuelle, ou non verbale si vous voulez.
Seydoux Barham Diouf est politiste en formation à l'UCAD.
LES DESSOUS DE LA FORMATION DU PROCHAIN GOUVERNEMENT
L'équipe devrait compter dans ses rangs de nombreux technocrates et moins de personnalités politiques connues. Des figures 'neutres', sans engagement politique, ainsi que des personnes venues de la diaspora pourraient avoir leur place
(SenePlus) - Cinq jours après sa victoire à l'élection présidentielle du 24 février 2022, les sénégalais attendent de connaître la composition du futur gouvernement de Bassirou Diomaye Faye. Élu dès le premier tour avec 54% des voix, selon les résultats provisoires communiqués par la Commission nationale de recensement des votes, le nouveau chef de l'État sera investi le 2 avril, date de fin de mandat de son prédécesseur Macky Sall. Son premier gouvernement devrait être formé dès le lendemain de la fête nationale, le 5 avril.
Selon des sources au sein de son parti, le Pastef, cité par RFI, "l'essentiel est de se mettre rapidement au travail pour plancher sur les priorités du nouveau président", à savoir l'économie, le coût de la vie et la souveraineté alimentaire. Pour y parvenir, le gouvernement devrait compter dans ses rangs de nombreux technocrates et moins de personnalités politiques connues. "Des figures 'neutres', sans engagement politique, ainsi que des personnes venues de la diaspora pourraient avoir leur place", précise-t-on.
Bassirou Diomaye Faye devrait également s'appuyer sur les membres de la coalition "Diomaye président", qui regroupe une centaine de petits partis et mouvements comme celui de l'ancien syndicaliste Dame Mbodj ou de l'ex Première ministre Aminata Touré. "L'essentiel est la rupture et le projet porté par le nouveau président", insiste-t-on au sein du Pastef.
Quant au rôle d'Ousmane Sonko, figure de proue du parti et soutien de la première heure à la candidature de Bassirou Diomaye Faye, celui-ci a déclaré au Monde qu'"aucun poste ne lui a été promis". "Toutes les options sont ouvertes, que ce soit un rôle ministériel, de proche conseiller ou de président de l'Assemblée nationale", a-t-il ajouté.
Enfin, les grands partis traditionnels pourraient-ils participer à ce nouveau gouvernement ? Le PDS, qui a apporté son soutien à quelques jours du scrutin, se dit ouvert aux discussions. Selon son porte-parole Maguette Sy, "on ne ferme pas de cloisons mais si discussions il y a, ce sera avec les leaders du parti", Abdoulaye Wade et Karim Wade.
LE PUR, UNE PERCÉE SIGNIFICATIVE DANS LA SCÈNE POLITIQUE
Fort de ses récents succès électoraux, le parti a créé la surprise en plaçant son candidat Aliou Mamadou Dia à la troisième place. Pourtant jusqu'alors peu connu, ce dernier a su tirer son épingle du jeu et mettre en avant son expérience internationale
Le PUR, créé en 1998, est l’un des partis politiques les plus actifs de la vie politique sénégalaise des six dernières années. Seul, il a fait élire des députés en 2017. En 2022, allié au Pastef-Les patriotes d’Ousmane Sonko et à d’autres partis, le PUR a obtenu plusieurs sièges à l’Assemblée nationale. Le parti du guide religieux serigne Moustapha Sy réputé pour la discipline, l’organisation et la fidélité de ses militants continue de percer sur la scène politique.
A l’issue de l’élection présidentielle du dimanche dernier, le candidat du PUR, le parti de l’unité et du rassemblement, Aliou Mamadou Dia a crée la surprise en ce classant troisième avec 2, 80 % parmi les 19 candidats à la présidentielle. Une prouesse devant des ténors de la scène politique comme Khalifa Ababacar Sall, Idrissa Seck entre autres qui ont moins de 2%. Durant la présidentielle de 2019 le candidat du PUR le professeur Issa Sall s’était classé à la quatrième position derrière Ousmane Sonko 15,67%, Idrissa Seck 20,5%, et le président Macky Sall réélu avec 58,27%.
Alors que tous les esprits étaient tournés vers Cheikh Tidiane Youm, Secrétaire général national du PUR, le patron de la formation vert-blanc Serigne Moustapha Sy a porté son choix sur Aliou Mamadou Dia, très peu connu du grand public.
‘’J’ai toujours été un militant du PUR depuis 2018, mais mes fonctions internationales ne me permettaient pas de m’afficher’’, fait-il savoir en précisant que même dans l’ombre, il donnait des conseils.
Aliou Mamadou Dia a eu plusieurs contrats avec le système des Nations unies, ce qui lui a permis de travailler dans une trentaine de pays africains. M. Dia a débuté sa vie professionnelle à la direction des travaux géographique et cartographique entre 1997-1998 à Dakar, notamment sur la partie géomatique.
Candidat à l’élection présidentielle du 24 mars sous la bannière du Parti de l’unité de rassemblement (PUR), Aliou Mamadou Dia, a tiré son épingle du jeu par son parcours historique durant cette campagne présidentielle inédite dans l’histoire du pays. Désormais le parti aura son mot à dire dans la sphère politique avec cette nouvelle configuration. Plus de 7, 3 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes pour élire un cinquième président de la République. Dix-neuf candidats étaient en lice. La Commission nationale de recensement des votes a avancé un taux provisoire de participation de 61, 30 %.
VIDEO
QUAND OBTENIR UN VISA VIRE AU RACKET
Déjà confrontés à une procédure d'obtention de visa complexe, de nombreux Sénégalais doivent aussi faire face à la cupidité de certains. Des intermédiaires monnayent désormais l'accès aux rendez-vous. Enquête sur un trafic organisé
Déjà confrontés à une procédure d'obtention de visa complexe, de nombreux Sénégalais doivent aussi faire face à la cupidité de certains. En effet, des intermédiaires monnayent désormais l'accès aux rendez-vous, pourtant gratuits, pour déposer un dossier. Comment est né ce système peu scrupuleux et quelle en est l'ampleur ?
VIDEO
LES GRANDES AMBITIONS SOUVERAINISTES DE BASSIROU DIOMAYE FAYE
Abandon du franc CFA, renégociations commerciales dans le gaz et le pétrole, départ des troupes françaises du territoire... Le nouveau chef d'État pourrait déclencher une vague de réformes majeures dans les prochains mois
(SenePlus) - Dans un entretien accordé à RFI, Pape Ibrahima Kane, chercheur sénégalais, a décrypté les principales ambitions du nouveau président sénégalais Bassirou Diomaye Faye en matière de souveraineté économique, monétaire et diplomatique.
Tout d'abord, M. Kane souligne que « la première souveraineté » que vise M. Faye est « la souveraineté de l'État sur ses ressources naturelles », à savoir le gaz, le pétrole, les phosphates ou le zircon. Son projet électoral, qui mentionne à 18 reprises le mot « souveraineté », prévoit de « renégocier les contrats » signés avec les compagnies internationales comme BP ou Kosmos Energy dans le secteur énergétique.
Sur les contrats gaziers et pétroliers offshore déjà existants, le chercheur estime qu'il « n’y a pas l'information qui permet de vérifier » les affirmations du président sortant Macky Sall selon lesquelles « l'État sénégalais est déjà majoritaire ». Il souligne que de nouvelles négociations pourraient avoir lieu, notamment avec le voisin mauritanien avec lequel le Sénégal partage ces ressources.
Dans le secteur de la pêche, Pape Ibrahima Kane juge que le nouveau président a aussi « la possibilité de remettre en cause beaucoup de ces contrats » accordés à des entreprises étrangères par des Sénégalais qui les ont ensuite sous-loués. Il s'agirait de satisfaire les demandes des pêcheurs locaux qui déplorent la raréfaction des ressources halieutiques.
Sur le plan politique, l'ambition affichée de « sortir du néocolonialisme » pourrait se traduire par le départ des bases militaires françaises installées au Sénégal depuis l'indépendance en 1960, estime M. Kane. Il s'attend aussi à une renégociation des accords de défense liant le pays à la France.
Concernant la monnaie commune CFA, le chercheur note que M. Faye a adopté un discours « plus réaliste » en évoquant d'abord l'éco, future monnaie de la CEDEAO, avant d'envisager une monnaie nationale. Néanmoins, un changement au Sénégal fragiliserait davantage le franc CFA, dont la Côte d'Ivoire est désormais le principal soutien.
Sur la scène internationale, M. Kane juge improbable un « shift » vers la Russie, le Sénégal entretenant déjà d'« excellents rapports » économiques et une politique de non-alignement. En revanche, le nouveau président pourrait use de son influence auprès du Mali pour le ramener dans le giron de la CEDEAO.
En conclusion, Pape Ibrahima Kane estime que la conduite de la politique étrangère reviendra au président Faye, tandis qu'Ousmane Sonko, allié de poids dans sa victoire, pourrait se voir confier des responsabilités au niveau national.
UN AVENIR EN DÉBAT
Amadou Ba se retrouve à la tête de l'opposition après sa performance présidentielle. Une occasion à saisir pour refonder l'opposition et reconquérir le pouvoir. Il lui faudra toutefois d’abord se débarrasser des scories que lui aura laissées Macky
Débarrassé de l’hypothèque Macky Sall, qui pense déjà à ses délices de Marrakech, le nouveau chef de l’opposition sénégalaise a tout un vaste chantier à déblayer s’il veut conquérir enfin le fauteuil présidentiel dans 5 ans. Il lui faudra d’abord se débarrasser des scories que lui aura laissées le chef de l’Etat sortant dont il a compris qu’il n’a jamais souhaité sa victoire. Et refonder autour de sa personne, avec ses alliés de Benno, un véritable parti d’opposition, uni pour reconquérir le pouvoir.
Les résultats provisoires de l’élection présidentielle du 24 mars, tels que publiés hier par la Cour d’appel de Dakar, révèlent que Amadou Ba, le candidat de la Coalition Benno bokk yaakaar (Bby), a obtenu 1 million 605 mille 86 voix, soit 35, 79% des suffrages exprimés ce jour-là. Ce qui le place en seconde position des candidats. Si l’on se fie à la logique qui avait été appliquée en 2019, quand Macky Sall avait gagné haut la main devant 4 autres candidats, Idrissa Seck, qui avait obtenu un peu plus de 22% en s’étant classé second, Amadou Ba devrait revendiquer le statut et les privilèges de chef de l’opposition. Si du moins, il s’en sent l’envie et la disposition.
Il faut dire que M. Ba, comme Bassirou Diomaye Faye, a été un candidat délégué. Ils ont tous les deux été portés par un mouvement dont ils ne sont pas les dirigeants. Une fois élu, BDF a eu l’intelligence de rendre tous les mandats qu’il détenait dans son mouvement politique, et devient donc plus libre pour mener la politique qu’il entend conduire à la tête de l’Etat.
Pour Amadou Ba, les choses ne devraient pas être plus compliquées. Nous avons ici un candidat qui, dès sa désignation, a été contesté par des caciques de son parti. Il se dit même que le leader-même, qui avait porté sa candidature, ne cachait plus l’animosité qu’il portait à son égard et souhaitait secrètement sa défaite. Les choses en ont été au point où ce sont les leaders des partis alliés, membres de la coalition Bby qui ont pesé de tout leur poids pour que Macky Sall ne lâche pas son poulain en rase campagne. Mais il l’a fait du bout des lèvres, en sachant que Amadou Ba allait connaître son Waterloo. Toutefois, si sa défaite a plusieurs causes, les perspectives d’avenir de Amadou Ba sont entre ses propres mains.
La première option pour lui, serait de faire une Opa sur la Coalition Benno. Ses plus de 35%, qui font de lui le chef de l’opposition, le placent ipso facto comme le leader de son mouvement. Et puisque Macky Sall est sur le départ, tous ses lieutenants, qui se dressaient contre l’ancien Premier ministre, n’auront plus de moyens pour s’opposer à sa mainmise. Une emprise qui sera d’ailleurs favorisée par des personnes comme Aminata Mbengue Ndiaye, Moustapha Niasse ou Abdoulaye Saydou Sow, entre autres. Toutes ces personnes ont une revanche à prendre, et auront à cœur de constituer une opposition forte et déterminée, qui va se positionner en alternative à Pastef. Faute de quoi, Barthélemy Dias va repositionner Taxawu autour de lui, pour se préparer à la Présidentielle de 2029. Les opposants dans l’Apr n’auront qu’à se taire ou partir.
S’il est gêné de porter l’héritage de l’Apr, Amadou Ba pourra se débarrasser de ce nom, et le laisser aux héritiers de Macky Sall. Ces derniers auront d’ailleurs d’eux-mêmes, du mal à se regrouper derrière un leader incontestable, maintenant que leur chef leur aura tourné le dos. L’Apr n’a jamais été un parti structuré, mais plutôt une machine électorale, façonnée pour l’intérêt et les ambitions d’un seul individu. Maintenant qu’il n’en a plus besoin, il leur laissera la coquille qu’ils auront du mal à remplir. Et ce n’est pas au candidat choisi malgré eux qu’ils vont demander de leur servir de guide.
Par contre, tous ceux qui lui auront été fidèles dans les durs moments de cette campagne assez particulière, pourraient l’aider, avec l’appui des partis alliés, à constituer le noyau du plus grand parti de l’opposition, qui pourra devenir une force de proposition face à Pastef. Si vraiment Amadou Ba s’en sent l’étoffe. On sait qu’il peut être déterminé s’il est convaincu du but. L’autre solution serait pour lui, de se contenter de profiter des énormes richesses qui lui sont prêtées, et de s’éloigner de la politique. Ce ne serait pas bête non plus.
Par Ibou FALL
DU FOND DES URNES, LA REVOLUTION
Dimanche passé, le 24 mars 2024, le peuple du Sénégal, sans distinction de sexe, de race, de confession, est allé voter sans fanfaronner, comme il le fait régulièrement depuis 1848, en dépit de bien des émotions
Dimanche passé, le 24 mars 2024, le peuple du Sénégal, sans distinction de sexe, de race, de confession, est allé voter sans fanfaronner, comme il le fait régulièrement depuis 1848, en dépit de bien des émotions. Chacun, selon son intime conviction, exprime alors son sentiment sur ce que doit devenir notre République, le temple des futurs Sénégalais, c’est-à-dire nos enfants, nos petits-enfants et leurs descendances, qui sont les nôtres.
Sauf que, cette fois, parler d’alternance relèverait de l’euphémisme : quand bien même le sang ne gicle pas sur les murs, cette Présidentielle est une authentique révolution… C’est aussi cela, être Sénégalais : on ne fait rien comme tout le monde.
Rien de nouveau : chaque élection, comme à l’accoutumée, avant le jour fatidique, charrie son cortège d’incertitudes, de crises de nerfs, de clowneries et de tragédies. La route est longue, depuis le premier métis député du Sénégal, l’avocat François Carpot, né à SaintLouis en 1862 et élu en 1902, que remplaceront à la suite, Blaise Diagne, Galandou Diouf, Lamine Guèye, Léopold Sédar Senghor…
Comme une curieuse tradition, ils s’allient les uns aux autres, puis se séparent, s’affrontent, se combattent et se succèdent. Ils sont tous de la même engeance.
Malgré les apparences, l’alternance, au Sénégal, est une vieille tradition…
A partir de 1963, la principale élection n’est plus celle du député du Sénégal au Parlement français, mais celle du président de la République. Les alternances font une pause : Léopold Sédar Senghor rempile encore et encore, en 1963, 1968 (après avoir repoussé l’élection prévue en décembre 1967 quand le mandat était de quatre ans), 1973 avec des scores qualifiés de soviétiques.
Seul candidat possible, compte tenu des conditions légales de soumission d’une candidature à la Présidentielle, il finit par se faire une raison : à chaque élection qu’il remporte les doigts dans le nez, quand ce n’est pas le bain de sang, comme en 1963, c’est le séisme social. Les grèves de 1968 et 1973 mènent la République au bord du gouffre...
Il faudra toute la culture républicaine de l’Armée sénégalaise, à laquelle le pouvoir est proposé en 1968, pour que notre démocratie vogue à nouveau vers son destin si tumultueux. Pourtant, partout en Afrique, et même sur bien d’autres continents à travers le monde, guerre froide oblige, c’est la mode des putschs militaires et des forcings totalitaires.
Quand je vous dis que le Sénégal est une perle rare…
Certes, arrive le pluralisme démocratique après 1974, la création du Parti démocratique sénégalais, Pds, sous la houlette de Me Abdoulaye Wade, fait sensation. Mais cela relève plutôt de la cosmétique institutionnelle.
Le «parti de contribution» est bien trop gentil : il demande juste à entrer dans un gouvernement pour réparer les frustrations d’un ancien militant, Abdoulaye Wade, battu dans sa ville natale, Kébémer, par Djibril Ndiogou Fall. Mauvais perdant, Wade claque la porte de l’Ups quand, en plus, le ministère des Finances, sur lequel il fait alors une fixation, revient à Babacar Bâ, qui y remplace Jean Collin, ministre des Finances sept années durant.
Excusez du peu
Dans la foulée des réformes institutionnelles, le Sénégal ayant besoin de siéger aux tables des grandes familles idéologiques mondiales, le fameux concert des nations si cher au Président Senghor, d’autres courants sont tolérés
Le gauchiste repenti Majmouth Diop, revenu de son exil malien, ressuscite le Parti africain de l’indépendance, Pai, au prix d’une gentille pharmacie dans le centre-ville
Le tableau de famille politique sénégalais en est presque touchant lors des élections générales de 1978, qui combinent Présidentielle et Législatives : ça y distingue comme dans un vieux western, le bon, la brute et le truand…
Côté underground, bien sûr que ça grenouille dans la clandestinité…
Ça décompte dans cette sombre smala, un peu n’importe qui : de l’indigné gauchiste, de l’obtus islamiste, du simplet raciste, du terroriste borné, du crétin patenté.
Il faut de tout pour déconstruire une planète, n’est-ce pas ?
Senghor, le timonier de la barque Sénégal, ça fait bien des années qu’il n’en peut plus. L’âge, à n’en pas douter, certes ; la médiocrité ambiante, à mon sens, le pousse davantage à la retraite. Réélu en 1978, il a en tête de céder la place à mi-mandat, début 1981
C’est finalement fin 1980, le 31 décembre, qu’il rend le tablier, élégamment, avec cet art du beau geste que seul le savoir-vivre inspire. Ce n’est pas une alternance, juste une transition.
Son successeur, l’interminable Abdou Diouf, du haut de sa splendeur, croit avoir tout compris : Senghor, ce poète (comprenez, ce rêveur), est un coincé de la démocratie qui demande plus de hauteur. Deux mètres, sans doute. L’administrateur civil à l’esprit simplet, qui se croit démiurge, ouvre les vannes d’un art majeur et complexe que seuls les esprits supérieurs et raffinés devraient exercer : la politique…
Abdoulaye Wade, persuadé de n’en faire qu’une bouchée à la Présidentielle de 1983, ne comprend pas vraiment que le patron de l’époque se nomme Jean Collin. Grave erreur… Il s’y casse les dents en 1988 également.
Comme dit le Wolof, «balâ ngay khàm, khamadi khaw lâ rèy»… Traduction : à force de se planter, on finit par comprendre ce qui se passe.
Le 19 mars 2000, lorsque les chiffres du scrutin tombent, les Sénégalais sont soulagés : enfin, on change de monde… Wade n’est pas Diouf, le destin du pays empruntera donc une nouvelle trajectoire.
Ça fera illusion quelque temps…
C’est juste une nouvelle bande de profitards qui s’installe ; à la différence qu’ils ont plus faim que leurs prédécesseurs. Ceux qui grignotaient peureusement à coups de millions leur font pitié : eux, les nouveaux maîtres du pays, ils le dévorent à grands coups de milliards…
Il faudra douze interminables années pour que la supercherie de l’alternance, la première, soit démasquée. Le panache de Wade sur la scène mondiale, l’aventure des «Lions» en 2002, les rendez-vous planétaires comme l’Oci, le Fesman et autres rencontres mondiales, en plus des autoroutes, échangeurs, immeubles et autres faits glorieux, font croire que le Sénégal est un pays riche…
Sauf que le Sénégalais moyen se sent de plus en plus pauvre tout ce temps. Les milliards dont on parle, il n’en sent même pas l’odeur. Dans les chaumières, ça commence à parler «d’alternoce» dont jouissent les marabouts et pontes politiques.
Le 26 mars 2012, une nouvelle alternance survient.
Arrive un nouveau venu, qui promet d’être sobre et vertueux. Il a une bonne tête de Sénégalais sans aspérité, et son épouse est d’une convivialité touchante. Une «darling kôr» à la simplicité légèrement sophistiquée, dont la générosité est trop exubérante pour être innocente.
Après un calvaire de douze années à supporter des caprices, des lubies qui ne les ont pas rendus plus riches, ni plus heureux, en dépit des nombreux éléphants blancs du Plan Sénégal émergent, les Sénégalais ont décidé de tourner cette page que l’on a surnommée «une deuxième alternance».
Cette fois, ce n’est plus une «alternance», comprenez un acteur de la scène publique qui a fricoté avec tout le monde, selon les saisons, aux affaires comme dans l’opposition
Les Sénégalais ont voté sans trembler pour le candidat qui leur ressemble. Personne ne prend soin de lui, alors qu’il est depuis dix-sept ans dans la Fonction publique et qu’on ne lui reproche rien. Juste qu’il n’a pas le bras long. Comme tous ceux qui se disent qu’ils ont du mérite mais pas de «badiene».
Bassirou Diomaye Faye, banal inspecteur des Impôts, a le plus mince Cv de tous les candidats. Même pas directeur de quoi que ce soit… Il fait pitié, face à un candidat dont le cursus laisse penseur : directeur des Impôts, Dg des Impôts et domaines, ministre des Finances, ministre des Affaires étrangères, Premier ministre.
BDF, pour faire simple, n’a même pas de pédagogie pour expliquer le «Projet».
Ça tombe bien, les Sénégalais s’en foutent comme leurs premières couches.
Ils demandent juste de faire table rase de tout ce qui précède : des politiciens versatiles, qui s’arrangent avec leur bonne conscience tant que leurs privilèges sont saufs depuis une cinquantaine d’années
Dans les pays où les frustrations se règlent à coups de pistolets, ça s’appelle une révolution…
Mais nous sommes au Sénégal, une République pas comme les autres.