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29 novembre 2024
International
par Fatoumata Sissi Ngom
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GEEJ GI — LE VIEIL HOMME ET LA MER
EXCLUSIF SENEPLUS - Dialogue avec les hommes et femmes de la mer de Mboro. Ces discours édifiants convoquent l’élaboration urgente de politiques publiques au service des communautés (Échanges en Wolof, avec sous-titres)
Fatoumata Sissi Ngom dialogue avec les hommes et femmes de la mer de Mboro. Leurs discours sont édifiants. Ils convoquent l’élaboration urgente de politiques publiques au service des communautés. Échanges en Wolof, avec sous-titres.
Je suis partie à la rencontre des pêcheurs de Mboro, avec mon ami Ndiaga Ndiaye, leader politique. Ces échanges s’inscrivent dans le cadre du projet de co-création organique Une Proposition nommée Désir, que j’ai initié à Mboro et les villes environnantes comme Darou Khoudoss. Les discussions vont nourrir l’Observatoire de la plateforme du projet.
“Le vieil homme et la mer”, car ce jour-là, en écoutant le vieux doyen, les pêcheurs et les enfants, et en les imaginant en pleine mer, remplis d’espoirs, ou en train de se mesurer à plus grand qu’eux - le gros bateau européens ou les déchets chimiques - j’ai senti que l’esprit d’Hemingway, de Santiago et du petit Manolin était avec nous. C’est l’histoire de la dignité humaine et du courage. C’est aussi l’histoire de pêcheurs courageux, d’enfants qui apprennent des ainés, et de femmes qui partagent une même condition. La littérature universelle et la création organique peuvent se mettre au service des politiques publiques et de la condition humaine.
L’urgence pour le nouveau chef de l’Etat de mettre en place des politiques publiques tranchantes au service des populations
La situation de l’économie de l’Océan au Sénégal et particulièrement à Mboro est représentative des graves distorsions économiques et sociales au Sénégal, et qu’il faut urgemment réparer. Le nouveau président élu, Bassirou Diomaye Faye, et son gouvernement, doivent prioriser une transition juste et inclusive au service réel des populations.
Mboro-sur-mer est un important hub de pêche, dont le potentiel est noyé à cause de l’absence d’infrastructures de pêche adéquates, la pollution industrielle notamment par les Industries Chimiques du Sénégal, et les accords de coopération internationale qui sont défavorables voire dangereux à la survie des communautés locales. A Mboro-sur-mer, le “gros bateau” provenant d’Europe et pêchant à outrance est devenu une entité à part entière. Dans l’imaginaire de ce village de pêcheurs, ce gros bateau aux moyens et dimensions disproportionnés est un racketteur autorisé par l’État.
Considérer encore plus les femmes et les enfants
Lors de cette rencontre, j’ai pu observer en direct que les inégalités hommes-femmes et le modèle patriarcal sont profondément ancrés dans les imaginaires. Aucune femme n’était présente dans l’assemblée. Ni aucune petite fille et aucune jeune fille, alors que beaucoup de garçons étaient présents. Éternelles fourmis invisibles ? Cela a été un peu étrange d’être la seule femme entourée d’hommes et de petits garçons. À un moment, j’ai demandé pourquoi les femmes n’étaient pas là, et si je pouvais les entendre, elles aussi. Les dignitaires ont alors appelé une femme transformatrice qui a bien voulu se montrer et prendre part à la discussion.
Mais le plus émouvant, ce sont les enfants, ces petits bouts du divin. Déjà tout petits, ils se préoccupent de la rentabilité de la pêche, nourrissent un profond ressentiment envers le gros bateau et les ICS, et portent sur leurs frêles épaules les problèmes des adultes. Je suis un peu dépassée et submergée en les écoutant.
Il va être urgent pour le nouveau chef de l’État sénégalais de réviser en profondeur les accords de pêche avec les partenaires internationaux, et d’instaurer un vrai cadre d’application de normes environnementales pour les entreprises extractives. Cela passe par l’élaboration de politiques publiques conscientes et tranchantes qui mettent l’humain au centre.
UNE UNION À RÉINVENTER
Elgas salue l'exploit de Pastef tout en invitant à la prudence. Si la victoire donne lieu à l'euphorie, le journaliste appelle à examiner ce séisme politique avec recul. Car il a révélé les divisions à panser pour renouer avec la cohésion nationale
(SenePlus) - La démocratie sénégalaise vient de vivre un événement majeur avec la victoire surprise de l'opposant Bassirou Diomaye Faye à l'élection présidentielle du 24 mars, selon l'écrivain et journaliste Elgas dans une tribune publiée samedi 30 mars 2024 dans Le Monde.
"C'est une longue et éprouvante séquence politique qui vient de s'achever", souligne Elgas. En effet, malgré "le mérite" du nouveau président Diomaye Faye, "la figure centrale de cette victoire reste son mentor, Ousmane Sonko", leader charismatique du parti d'opposition Pastef empêché de se présenter lui-même en raison de son incarcération politique.
Pour Elgas, "la démocratie sénégalaise balbutiante, récemment rudoyée par l'entêtement coupable de l'ancien régime, a tenu". Mieux, elle en sort "renforcée" par cette élection où l'opposition l'a emporté dès le premier tour, ce qui "place un peu plus le pays dans une position particulière, celle de phare dans une région sahélienne malade des transitions politiques".
Les débuts prometteurs du nouveau président
Dans son discours de victoire, le nouveau président Diomaye Faye a promis de "rassembler" selon Elgas, s'écartant du "triomphalisme trop tapageur" et de la "verdeur radicale" longtemps associée à Pastef. Cette modération était "la suite logique d'une campagne express de pacification" menée avec Ousmane Sonko, qui a "ménagé son principal bourreau, le président sortant Macky Sall, sacrifiant l'invective plus radicale sur l'autel d'une réconciliation à marche forcée".
Si l'euphorie est légitime, Elgas appelle néanmoins à "examiner tout le tableau de cette dernière séquence politique, avec distance et sang-froid". Elle a en effet révélé "des blessures qu'il appartiendra au nouveau régime de panser" afin que "le pays puisse reconquérir ce qu'il a de plus cher sur le plan politique, et qu'il a perdu dans la bataille : sa cohésion nationale".
Un régime sortant responsable de sa propre chute
S'il convient de "mettre au crédit d'Ousmane Sonko d'avoir fermement tenu tête à ce régime", Elgas estime aussi que Pastef a "bénéficié de l'inanité d'un régime finissant". Macky Sall et son entourage ont en effet "multiplié les ratés" et leur "bilan indéfendable" a "condamné le candidat de la majorité à un plafond électoral".
Plus encore, en s'acharnant de manière "disproportionnée" contre Ousmane Sonko, qualifié de "martyr", le régime sortant serait "la première cause d'une fracture nationale". Cet "acharnement répressif" a "beaucoup fait perdre" au Sénégal, à la fois "économiquement" et "en termes de stabilité".
Les zones d'ombre du passé de Pastef
Si Macky Sall porte "la responsabilité première dans le chaos récent", Elgas estime qu'il faut aussi "ne pas oublier ce que ce parti porte comme responsabilité dans la surenchère de la violence". Longtemps, Pastef a en effet "théorisé une défiance radicale contre les institutions" et légitimé "une terreur" basée sur l'idée de "œil pour œil, dent pour dent".
Cette rhétorique radicale s'est aussi traduite par une "logique inquisitoriale" et une "chasse aux traîtres sur les réseaux sociaux". Des excès idéologiques qui ont "étouffé la pluralité du débat". Désormais au pouvoir, Pastef devra "assainir une pratique et un lexique" en abandonnant ces références belliqueuses selon Elgas.
Malgré ces zones d'ombre, l'éditorialiste appelle à ne pas sombrer dans le "catastrophisme" et à laisser "une chance" à ce "coup d'Etat démocratique" qui incarne un espoir pour la démocratie sénégalaise. Les prochains mois diront si ce renversement du pouvoir se conclut par "le chaos" ou sait se révéler "être une des manifestations les plus éclatantes de la démocratie sénégalaise en marche".
LA PAROLE DE DIOMAYE FAYE ATTENDUE SUR LES CONTRATS GAZIERS/PÉTROLIERS
Sa victoire surprise fait entrer le secteur dans l'inconnu. Si les majors craignent pour leurs investissements, le nouveau chef de l'Etat devra concilier réformes et réalités économiques. Une équation délicate à résoudre pour son gouvernement
(SenePlus) - 2024 s’annonce comme une année charnière pour le Sénégal. Après l’élection surprise, dès le premier tour, de l’opposant Bassirou Diomaye Faye à la présidence, le pays d’Afrique de l’Ouest s’apprête à devenir un producteur d’hydrocarbures. Comme le rapporte le journal Le Monde, l’exploitation de Sangomar (pétrole et gaz offshore), opérée par l’australien Woodside, doit démarrer en juin, suivi quelques mois plus tard par le mégachamp de Grand Tortue Ahmeyim, dit « GTA » (gaz offshore), exploité par le britannique BP. Dix ans après la découverte de ces gisements, l’industrie pétrolière naissante est censée booster la croissance, attendue à 8 % dès cette année (contre 5 % sur la dernière décennie), soit l’une des plus fortes du continent.
Cependant, le nouveau président élu, dont les promesses de rupture avec le pouvoir sortant ont remporté 54% des voix dès le premier tour, a fait de la renégociation des contrats pétroliers l’un de ses principaux chevaux de bataille. Comme l’a souligné à maintes reprises son mentor Ousmane Sonko, leader du Pastef (parti dissous en 2023), ces contrats seraient une « spoliation » des Sénégalais.
De quoi créer le trouble au sein du secteur, qui a déjà investi des milliards de dollars. Interrogée par Le Monde, une porte-parole de Woodside souligne que l’entreprise « respecte le droit des gouvernements à déterminer le cadre légal et réglementaire qui régit le développement du pétrole et du gaz », tout en insistant sur « l'inviolabilité des contrats et un cadre sûr pour les investissements. »
Selon une source du secteur pétrolier s'exprimant anonymement, « ce n’est pas du tout la panique ». Bachir Dramé, expert pétrolier et ancien communiquant de Petrosen, la compagnie publique sénégalaise, confirme un certain « attentisme » au Monde. Il juge qu'il sera difficile de renégocier les contrats de Sangomar et du champ partagé de Grand Tortue Ahmeyim, déjà en cours d'exploitation. Des discussions pourraient en revanche s'ouvrir pour d'autres blocs.
Plusieurs analystes cités par Le Monde notaient déjà un certain adoucissement du discours de M. Faye et du Pastef avant le scrutin, notamment sur la question du franc CFA. La réaction positive des marchés après la victoire de l'opposant témoigne aussi d'un certain soulagement quant à la perspective d'un pouvoir « plus pragmatique une fois aux affaires », selon Tochi Eni-Kalu, analyste pour l'Afrique de l'Ouest chez Eurasia Group.
Reste à voir les réformes que mettront en place concrètement le nouveau chef de l'Etat sénégalais. Ses projets de réforme fiscale, de lutte contre la corruption, de développement de la production locale risquent de demander du temps pour aboutir. Comme le note l'économiste Eni-Kalu cité par le quotidien français, la composition du futur gouvernement donnera déjà le ton des réformes à venir dans le secteur pétrolier et gazier.
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UNE CONSTITUTION À REFONDER
Sous l'égide de Sursaut Citoyen promoteur du Pacte de bonne gouvernance démocratique, experts et participants débattent des grandes orientations à donner à la prochaine loi fondamentale inspirée des Assises nationales et des travaux de la CNRI
Dans le cadre de sa campagne citoyenne pour la mise en œuvre des réformes institutionnelles au Sénégal, l'organisation Sursaut citoyen a organisé jeudi 28 mars 2024, une séance de discussions autour de l'avant-projet de nouvelle Constitution proposée par la Commission nationale de réforme des institutions (CNRI). Cet important rendez-vous intervient quelques semaines après la signature par le nouveau président Bassirou Diomaye Faye du Pacte de bonne gouvernance démocratique, un engagement à appliquer les recommandations issues des Assises nationales et de la CNRI.
Au terme de cette conversation citoyenne animée par des experts tels que Alioune Badara Fall, Babacar Gueye, Arame Ndoye Gaye, Maurice Soudiieck Dione et Jean-Louis Corréa, l'ancien ministre de l'Éducation Mamadou Ndoye a présenté une synthèse des échanges, dont voici les points saillants :
Identifier les problèmes à résoudre
La première étape cruciale consiste à définir clairement les dysfonctionnements que la nouvelle Constitution devra corriger. Parmi les principaux maux épinglés : les atteintes aux libertés, le non-respect de la Constitution, l'hyper-présidentialisme et la mainmise du président sur le Parlement, la justice et l'administration.
Déterminer le degré de changement
Un débat de fond anime les participants : faut-il se contenter d'une simple rationalisation du cadre existant ou aller vers des réformes en profondeur, voire une refondation totale avec l'instauration d'une nouvelle République ? Une question cruciale qui devra trouver un consensus.
Choisir le régime politique
La forme de l'Etat fait aussi l'objet de vives discussions : faut-il opter pour un régime présidentiel, parlementaire ou un modèle hybride sur mesure ? L'adaptation au contexte national sera déterminante pour garantir la cohérence du nouveau texte constitutionnel.
Renforcer les droits et libertés
Le renforcement des droits et libertés des citoyens ainsi que de leur pouvoir de contrôle sur les institutions apparaît comme une priorité absolue. Il s'agit de créer de nouveaux espaces démocratiques pour encourager l'initiative citoyenne. Parmi les pistes évoquées : des juges de la liberté, un médiateur renforcé, une évaluation systématique des hauts fonctionnaires, etc.
Instaurer des mécanismes de mise en œuvre
Enfin, au-delà du cadre théorique, les participants insistent sur la nécessité de mettre en place des dispositifs concrets pour assurer l'application effective des réformes.
Cette conversation citoyenne, riche en perspectives, marque une étape importante du processus de réformes institutionnelles réclamées par la société civile afin de sortir le Sénégal du fléau de l'hyperprésidentialisme. Un séminaire national est d'ores et déjà pévoqué pour approfondir les réflexions et produire un projet de Constitution actualisé à soumettre au président Bassirou Diomaye Faye.
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LE SÉNÉGAL, UN LABORATOIRE D'EXPÉRIMENTATION DÉMOCRATIQUE AFRICAINE
Dans une intervention remarquée sur France 24, l'éminent historien sénégalais Mamadou Diouf a qualifié l'élection surprise de Bassirou Diomaye Faye à la présidence de "presque une révolution"
Dans une intervention remarquée sur France 24, l'éminent historien sénégalais Mamadou Diouf a qualifié l'élection surprise de Bassirou Diomaye Faye à la présidence du Sénégal de "presque une révolution". Professeur à l'Université de Columbia, Diouf a souligné le caractère historique et transformateur de ce examen pour la démocratie sénégalaise.
Selon lui, cette élection marque le respect des institutions et de la Constitution malgré les tensions politiques. L'administration a également réussi l'épreuve en organisant des élections apaisées. Diouf y voit l'expression de la "maturité" et de la "culture démocratique" ancrées dans la société sénégalaise.
Au-delà du nouveau président élu, c'est l'émergence d'un leadership renouvelé avec Ousmane Sonko, figure de proue du parti Pastef, qui semble se profiler. Une configuration inédite et pleine de défis selon l'historien.
Enfin, Diouf considère cette élection comme un contre-exemple positif dans une région africaine secouée par les coups d'État militaires. Le Sénégal incarnerait ainsi un "laboratoire" et une source d'inspiration démocratique pour le continent.
Par Fadel DIA
OÙ SONT DONC PASSÉS LES PARRAINEURS ?
La surprise, l’amère pilule pour au moins 13 des 17 candidats, c’est qu’au moment fatidique leurs « parraineurs » se sont fait porter pâle : ils sont allés voter pour un autre !
La divine surprise, ce n’est pas seulement qu’un homme qui était encore en prison une semaine après l’ouverture de la campagne électorale, dont la télévision nationale avait récusé le représentant à l’enregistrement des professions de foi des candidats, sans lui offrir la possibilité de se faire enregistrer à partir de sa cellule, soit devenu président de la République une semaine après sa libération, malgré le gros handicap que constituait pour lui le fait que ce n’était pas lui que les militants de son parti attendaient à ce poste !
La surprise, l’amère pilule pour au moins 13 des 17 candidats, c’est qu’au moment fatidique leurs « parraineurs » se sont fait porter pâle : ils sont allés voter pour un autre ! Alors que celui qui par sa signature vous permet de valider votre candidature est, en toute logique ,plutôt disposé à vous apporter sa voix, les candidats qui avaient déposé des listes de parrains, déclinant les noms et prénoms d’au moins 45000 hommes et femmes majeurs et vaccinés, sains de corps et d’esprit, et qui juraient par leurs grands dieux qu’ils en avaient encore des milliers en réserve, n’ont récolté dans le secret de l’isoloir, à deux exceptions près, qu’entre un huitième et moins de la moitié des promesses de soutien qu’ils avaient engrangées. Avec comme dégât collatéral qu’ils perdaient, par la même occasion, tout espoir de récupérer une caution qui pour beaucoup d’entre eux, représentait un important sacrifice financier !
Qui est responsable de cette débâcle ?
Les candidats eux-mêmes ? Auraient-ils fait preuve de naïveté, ou manqué de sérieux ou de rigueur, ont-ils été bernés par des cokseurs professionnels qui démarchent des signatures dans la rue, ont-ils acheté, en connaissance cause, des signatures qui n’engageaient pas leurs signataires ?
A moins que ce ne soient leurs « parraineurs » qui auraient signé leurs listes par intérêt, par sensiblerie ou sous pression, qui se seraient prêtés à un exercice qui n’était pour eux qu’une formalité sans conséquence, ou qui auraient, consciemment, décidé de se jouer d’eux, sans état d’âme, parce qu’ils les considèrent comme des marchands d’illusions ?
A moins que la faute n’incombe à l’Etat ! Celui-ci auraitil failli à ses responsabilités, manqué de pédagogie ou fait peu cas des ressources qu’offre l’informatique pour rendre l’opération plus saine? A-t-il mis en place des actions en vue de sensibiliser les électeurs sur le sens de leur engagement ou les risques qu’il courent en monnayant leur soutien à plusieurs candidats à la fois, et d’ailleurs a-t-il prévu des sanctions dans ce cas de figure ? La trahison des « parraineurs » n’est cependant pas la seule surprise de l’élection présidentielle du 24 mars dont on avait fini par croire qu’elle n’aurait jamais lieu. Il y a aussi cette déroute des politiciens professionnels, membres de notre gotha politique depuis des décennies, et chefs de partis qui ont pignon sur rue. Les trois premières places sont occupées par des « débutants », sans aucun mandat électoral, alors que deux anciens Premiers ministres dont l’atout principal était, contrairement au favori de la course, d’avoir exercé des responsabilités au plus haut niveau, se sont littéralement effondrés ! Si l’un d’eux n’a fait que de rares apparitions pendant la campagne, on attendait de l’autre, qui est sur le devant de notre scène politique depuis un quart de siècle et bat campagne depuis vingt ans, mieux qu’une modeste 5e place, avec moins de 1% des voix ! Un autre candidat, qui n’a pas porté le même titre mais est encore plus ancien dans notre paysage politique, a connu presque les mêmes déboires alors qu’il a occupé le poste le plus prestigieux de l’administration municipale dans notre pays. Il avait pour directeur de campagne l’homme qui occupe le même poste aujourd’hui et pourtant la conjugaison de leurs forces et de leurs obligés ne l’a pas empêché de se retrouver à une humiliante quatrième place, et qui plus est, à un point derrière un candidat que personne ne connaissait il y a quelques mois !Il est vrai que ce candidat ainsi que celui qui est arrivé en tête, avaient le privilège d’avoir derrière eux une ombre tutélaire dont l’autorité spirituelle ou l’aura politique leur a servi en quelque sorte de fanion. En tout cas l’échec de ces trois caciques ressemble terriblement à une sortie de piste.
La désertion des « parraineurs » a eu des conséquences dont certaines nous laissent perplexes. Ainsi un « non candidat », puisqu’il avait retiré sa candidature avant le scrutin, a bénéficié de voix qui le classent au 14e rang, sans qu’on sache si ceux qui ont voté pour lui l’ont fait parce qu’ils n’étaient pas informés de son retrait, ou volontairement pour signifier que c’est pour lui qu’ils votent et non pour la formation qui le soutient. Ce non candidat a, au passage, battu de « vrais » candidats dont trois avaient exercé des fonctions gouvernementales !L’un d’entre eux devrait d’ailleurs, logiquement, changer le nom de sa formation, car peut-on, sans friser le ridicule, continuer à s’appeler Grand Parti quand on pointe à la dernière place derrière 16 candidats« officiels », qu’on est incapable de fidéliser les 7/8 de ceux qui vous ont permis d’accéder à la candidature et surtout quand, au bout du compte, à peine plus d’un électeur sur mille a voté pour vous ?
On revient à la question posée au début : qu’est-ce qui a poussé la majorité des électeurs à faire fi de leurs engagements pour donner leurs voix à quelqu’un qui pourtant en avait moins besoin que le candidat qu’ils avaient investi ? On a vu que ce n’était pas l’expérience ou la maturité politiques du candidat qui ont orienté le vote des Sénégalais. Ce n’est même pas, me semble-t-il la qualité du programme, parce que d’une part, je doute fort que ceux qui ont voté pour le vainqueur aient parcouru le sien, qu’ils l’aient disséqué, qu’ils en aient évalué la pertinence et les risques, et d’autre part parce qu’il y en avait d’autres de programmes, si alléchants qu’ils promettaient, sinon la lune, du moins le plein emploi dans cinq ans, la fin de l’émigration des jeunes dans quelques mois et la gratuité universelle !
L’impression qui se dégage du bouleversement qui a secoué notre pays et qui est la première vraie alternance que le Sénégal ait connu depuis l’indépendance, c’est que la principale motivation des électeurs a été le vote utile, celui qui permet de forcer le destin et de renverser le cours de l’histoire. C’est en cela que le candidat élu a une très lourde charge : porter sur ses frêles épaules les espérances de toute une nation…
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DIOMAYE FAYE A COMMENCÉ SES CONSULTATIONS
Le nouveau président est à l'oeuvre pour la formation de son gouvernement annoncé pour le 5 avril. Le mot d'ordre sera la compétence, avec la nomination notamment de technocrates et de membres de la diaspora
Le nouveau président Bassirou Diomaye est à l'oeuvre pour la formation de son gouvernement annoncé pour le 5 avril. Le mot d'ordre sera la compétence, avec la nomination de technocrates et de membres de la diaspora, selon des indiscrétions de TV5 Monde.
BASSIROU DIOMAYE FAYE PRÊTE SERMENT MARDI
La cérémonie prévue au Centre international de conférences Abdou-Diouf (CICAD) de Diamniadio sera suivie de la passation de pouvoir avec le président sortant, Macky Sall, au Palais de la République
Le président élu Bassirou Diomaye Faye prête serment, mardi à partir de 11 heures, au Centre international de conférences Abdou-Diouf (CICAD) de Diamniadio, lors d’une cérémonie suivie d’une passation de pouvoir avec le président sortant, Macky Sall, au Palais de la République; a appris l’APS de source officielle.
Bassirou Diomaye Diakhar Faye a été déclaré vainqueur de l’élection présidentielle avec 54, 28 %, selon les résultats officiels provisoires proclamés mercredi.
Le président élu a été reçu jeudi en audience par Macky Sall. Les deux hommes ont discuté des grands dossiers de l’Etat et de la cérémonie de prestation de serment et de passation de pouvoir, a fait savoir la présidence. Ousmane Sonko, leader des Patriotes africains du Sénégal pour l’éthique et la fraternité (PASTEF), dont est membre le président élu, a pris part à l’audience.
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RUPTURE ET RENAISSANCE AU SÉNÉGAL
À contre-courant des élites déconnectées, Faye et Sonko ont su réveiller les aspirations de changement de la jeunesse. Sauveront-ils le Sénégal de l'emprise néocoloniale ? Analyse et commentaires avec René Lake, Niakala Goké et Kalvin Dark sur VOA Afrique
À 44 ans, Bassirou Diomaye Faye vient de réaliser l'impensable. Cet inspecteur des impôts devenu figure de la contestation a été propulsé à la présidence du Sénégal dès le premier tour. Porté par une vague de jeunesse en quête de changement radical, son élection marque une rupture historique avec le vieux système politique.
Diomaye Faye, avec son mentor Ousmane Sonko, incarne une nouvelle génération panafricaniste déterminée à briser les vieilles chaînes néocoloniales. Leur discours à contre-courant, prônant l'indépendance vis-à-vis des puissances étrangères et la renégociation des contrats léonins, a renforcé les masses.
Mais ce vent de rupture soulève de nombreux défis. Comment concrétiser les promesses de moralisation sans provoquer de crises ? Réformera-t-on vraiment le système éducatif pour « dé-coloniser » les esprits ? Sonko conservera-t-il son influence au risque d'éclipser le président ?
Analyse et commentaires avec René Lake, Niakala Goké et Kalvin Dark dans l'émission hebdomaire Washington Forum sur VOA Afrique.
par Nioxor Tine
ALTERNANCE OU ALTERNATIVE ?
Il n’est pas trop tard pour rejoindre, dès maintenant, un vaste front pour la mise en œuvre de ruptures fondamentales dans la manière de gérer l’Etat, et de mettre leur expertise avérée au service de la Nation
Nous ne laisserons rien, ni personne, nous gâcher l’immense joie que nous procure la cinglante défaite électorale subie par la Coalition Benno Bokk Yakaar ! En attendant d’être édifié sur le fait de savoir s’il s’agit d’une simple alternance, la troisième de notre histoire politique ou d’une véritable alternative sociopolitique, réjouissons-nous, au moins de la fin du régime antidémocratique de Macky Sall !
Certains esprits malintentionnés parlent déjà d’un soi-disant deal entre le président sortant et les dirigeants du Pastef. En fait de deal, il pourrait simplement s’agir de négociations finales (comme celles entre l’ANC et les tenants du système d’apartheid sud-africain, en 1991) entre un régime en fin de course et des forces politiques émergentes censées être porteuses de changements sociopolitiques venus à maturité. Il faudra seulement éviter de passer, par pertes et profits, tous les crimes économiques et de sang ainsi que les innombrables forfaitures politiques commis par le régime du Benno-APR, ces dernières années. Le faire, c’est courir le risque, que les mêmes causes (absence de reddition de compte, clientélisme politique, transhumance…) produisent les mêmes effets, à savoir une nouvelle caste de prédateurs, peu soucieux des droits et libertés.
Une véritable réconciliation nationale devra reposer sur le socle de la justice et de la vérité. Il faudra éviter que des préoccupations politiciennes et électoralistes comme celles observées lors de nos deux premières alternances viennent parasiter l’exaltante œuvre de justice sociale, de libération nationale et de reconquête de nos souverainetés confisquées.
Certes, les contextes de 2012 et de 2024 ne sont pas superposables et les prémisses semblent, cette fois, plus propices. Le président Macky Sall venu accidentellement au pouvoir, suite à l’éclatement de la coalition Benno Siggil Sénégal, était parti d’un score de 26,58% au premier tour. Cela l’avait conduit à user de combines et de stratagèmes politiciens pour maintenir la cohésion de sa coalition, aux dépens de son propre parti, l’APR, non structuré jusqu’à ce jour. De plus, les ruptures nécessaires identifiées par les Assises nationales avaient été sacrifiées sur l’autel de la désastreuse continuité néocoloniale.
Le duo présidentiel Sonko-Diomaye du Pastef, quant à lui, proclamant urbi et orbi, sa volonté de détruire le système (néocolonial), accède au pouvoir, dès le premier tour, avec un score flatteur, devançant son adversaire et suivant immédiat de près de 20 points, auréolé d’un parcours prestigieux voire héroique et bénéficiant d’une adhésion populaire sans précédent.
De fait, tout observateur sérieux se doit de reconnaître, en toute objectivité que le Pastef a joué les premiers rôles, fait preuve de résilience, de constance et a payé un lourd tribut dans cette confrontation politique épique avec le régime du Benno-APR, qui a abouti à l’éclatante victoire électorale du 24 mars 2024 ! Cela est dû aussi à la clarté des positions de ce parti, qui vient de célébrer ses dix ans, sur le fléau de la mal-gouvernance illustrée par de multiples scandales à répétition et sur les méfaits de la dépendance néocoloniale.
A tel point que son leader Ousmane Sonko, dont le charisme ne fait pourtant l’objet d’un doute, a, depuis toujours, mis en avant une démarche collective, basée sur un projet commun, visant une véritable alternative au système néocolonial et reposant sur une pleine participation des masses populaires. Cela lui a permis, quand il a été arbitrairement évincé de la compétition électorale, de se faire remplacer, au pied levé, par son camarade de parti, Bassirou Diomaye Faye. A contrario, la plupart des autres candidatures se réclamant, à tort ou à raison, de l’opposition, reposaient sur des approches individualistes, selon la fameuse formule mystificatrice, de « rencontre d’un Homme (providentiel ?) avec son peuple » et n’ont récolté que des scores lilliputiens, qui ne reflètent très certainement pas la valeur des postulants.
Il n’est pas trop tard pour rejoindre, dès maintenant, un vaste front pour la mise en œuvre de ruptures fondamentales dans la manière de gérer l’Etat, et de mettre leur expertise avérée au service de la Nation. Cette unité des forces patriotiques autour de l’essentiel devra privilégier les convergences programmatiques sur la massification tous azimuts et surtout sur les déplorables marchandages autour de quotas et de strapontins. C’est à l’aune de ces critères, que le peuple vigilant saura si nous entrons dans l’ère d’une véritable alternative sociopolitique ou d’une simple alternance.