LE CASSE-TÊTE DES MOUTONS INVENDUS
La Tabaski est terminée mais la situation reste difficile pour de nombreux éleveurs sénégalais. Certains moutons amenés des régions n'ont pas été vendus. Cela engendre des coûts de transport supplémentaires et le risque d'un nouvel endettement
(SenePlus) - Les rues de Dakar retrouvent peu à peu leur calme après les célébrations de la Tabaski, la fête musulmane du sacrifice marquée par l'abattage ritualisé de moutons. Cependant, pour de nombreux éleveurs venus de différentes régions du Sénégal, la fête a laissé un goût amer, celui des pertes financières liées aux animaux invendus. Selon un reportage de RFI, ils doivent maintenant affronter le défi de ramener chez eux des centaines de moutons, engageant des frais supplémentaires de transport conséquents.
Djibril Oumar Tall, éleveur originaire du Fouta dans le nord du pays, exprime son amertume : "Ça ne marche pas bien. On n'a pas vendu beaucoup de moutons. Je n'ai fait aucun bénéfice, bien au contraire." Après avoir chargé ses bêtes invendues dans un gros camion, il entame le long voyage de retour, conscient des dépenses qui l'attendent.
Le cas d'Ousmane Dia, venu avec 320 moutons et repartant avec 201 bêtes sur les bras, illustre l'ampleur du problème. "À l'aller, j'avais payé 600 mille francs CFA (environ 915 euros) en transport pour les acheminer à Dakar. Pour le retour, je ne sais pas encore. Je risque de payer entre 700 mille et 750 mille francs CFA (entre 1070 et 1145 euros) pour ramener les moutons chez moi", confie-t-il à RFI. Et les difficultés ne s'arrêtent pas là. "Si nous n'arrivons pas à rembourser les dettes d'aliments de bétail, une fois de retour chez nous, nous serons obligés de vendre certaines de nos vaches pour pouvoir les rembourser", ajoute-t-il, soulignant la spirale d'endettement dans laquelle ces éleveurs risquent de s'enfoncer.
Face à cette situation préoccupante, certains tentent de limiter les dégâts. C'est le cas de cet éleveur qui préfère, pour l'instant, ne pas rentrer directement chez lui à Ndioum. "Je vais plutôt me rendre aux foires à bétail. Sûrement là-bas, j'en écoulerais encore quelques-uns", explique-t-il à la radio française, dans l'espoir de vendre le maximum de bêtes avant d'entamer le périple du retour.
Au-delà des pertes financières immédiates, cette situation soulève des questions sur la durabilité de ce modèle d'élevage transhumant et les défis auxquels sont confrontés ces éleveurs chaque année lors des grandes fêtes religieuses. De nombreuses voix s'élèvent pour appeler à des réformes et à un soutien accru de l'État, afin de préserver ce pan essentiel du patrimoine culturel et économique sénégalais.