MÉDINA GOUNASS, VILLE MORTE
Fantôme de sa splendeur passée, Médina Gounass erre dans un calme inquiétant. Ses rues vidées, ses boutiques closes et son économie exsangue témoignent des séquelles des violents affrontements survenus le jour de la Tabaski
Médina Gounass donne l’image d’une ville morte. Les habitants sont terrés chez eux. Il y a une paralysie de tous les secteurs d’activités économiques et les menaces sur la sérénité sociale sont toujours latentes. Bref, la cité religieuse est à la croisée des chemins au lendemain des affrontements sanglants de la Tabaski. Dans la ville, il y a les Fds qui font des patrouilles pour prévenir d’éventuels troubles. Le Quotidien s’est rendu hier dans la cité religieuse qui sonne vide.
Il règne un silence absolu dans la cité religieuse. Loin de l’image d’une ville enfiévrée, qui vit à un rythme frénétique où se confondent activités économiques et religieuses. A l’entrée de Médina Gounass, au centre de santé de la ville communément appelé «Régional», le chauffeur du car est catégorique : «Descendez. Je m’arrête là. Pas question que je rentre dans la ville.» Pourtant, il est l’un des rares à avoir accepté de faire la navette entre Manda Douane et Médina Gounass, situé dans département de Vélingara. Il ne veut prendre aucun risque à cause de la volatilité de la situation, avec une tension toujours en latence. Bien que non habitués à être «déchargés» à l’entrée, les passagers semblent comprendre l’inquiétude du conducteur et de son apprenti. Les voyageurs descendent du véhicule. Mais un autre problème se présente : le moyen de transport pour rallier le centre-ville situé à quelques deux kilomètres de là. Car, à l’instar de bon nombre de travailleurs, les conducteurs de tricycles, qui assurent généralement le transport intra-urbain à Gounass, n’ont pas voulu non plus prendre de risque, au vu des évènements de la journée du mercredi où des véhicules et motos ont été pris pour cible par des fauteurs de troubles, des magasins et boutiques de commerce vandalisés. Ne trouvant pas de moyens de transport, les passagers se voient obligés d’emprunter le «train onze». Une ligne que certains d’entre eux ne veulent pas emprunter, du fait notamment du climat d’insécurité qui règne à Médina Gounass. Mais, la situation oblige tout le monde à se réajuster.
Les populations terrées chez elles
Les commerces sont fermés, les services à l’arrêt. Ça prendra le temps que ça prendra, mais Médina Gounass panse ses blessures à huis clos et pense aux jours d’après-crise. Il faut dire que les habitants de la ville de Médina Gounass ont pris avec beaucoup de sérieux les menaces de violences que se livrent les deux camps à la suite des épisodes du jour de la Tabaski. Depuis les évènements malheureux de lundi, mardi et mercredi derniers, à travers la violence exercée sur des personnes et la destruction de biens, la quasi-totalité de la population de cette cité religieuse s’est retranchée dans les habitations afin de se mettre à l’abri d’éventuelles scènes de violences. Sur les rues autrefois bondées, où les échanges commerciaux notamment sont parmi les plus dynamiques de la région de Kolda, le décor donne l’image d’un désert. C’est le calme absolu. Un silence ! La plus grande démographie et plus grande économie du département de Vélingara est devenue une ville fantôme où seules les Forces de défense et de sécurité font des rondes.
Pour le moment, malgré les appels au calme et à la sérénité du gouvernement, à travers son ministère de l’Intérieur, et les deux guides religieux, et les tentatives de médiation, la bombe n’est pas totalement désamorcée à cause de la peur de représailles.
Paralysie de l’activité économique
Médina Gounass, ce n’est pas qu’une cité religieuse. Il existe un écosystème économique, et depuis les affrontements du jour de la fête de Tabaski, toutes les activités économiques sont paralysées. L’économie florissante de la ville risque d’être mise à mal du fait de la fermeture des boutiques, magasins et autres centres de commerce. Une situation qui ne devrait point perdurer au point d’éprouver les ménages. «Certains appellent même au niveau des boutiques pour se faire livrer des provisions. C’est une situation intenable», note un interlocuteur. Pour l’instant, il n’y a que les chants d’oiseaux et le vent pour animer cette ville à l’arrêt depuis les évènements de la Tabaski qui ont fait un mort et plusieurs blessés.