L’EXPERTE AMERICAINE, AUDRA SHALLAL EXPLIQUE POURQUOI ÇA NE DECOLLE TOUJOURS PAS
PROMOTION DE L’AUTO ENTREPRENARIAT AU SENEGAL
Une assistance insuffisante, une paranoïa liée à la propriété intellectuelle et des jeunes plus préoccupés à travailler pour leurs familles que d’investir sur leur avenir. Voilà des choses qui freinent l’envol de l’auto entreprenariat au Sénégal. L’analyse a été faite par l’experte américaine en entreprenariat, Audra Shallal.
Ils sont nombreux les jeunes et les femmes qui veulent lancer leur propre «business» pour en finir avec le chômage et le sous-emploi. Cependant, ils sont très souvent confrontés à des problèmes innombrables. L’experte américaine en auto-entreprenariat et professeur d’université, Audra Shallal, a tenté de les identifier en marge d’un séjour qu’elle effectue actuellement au Sénégal.
«J’ai noté qu’il y a un vrai gap entre les institutions de micro-finance qui sont très nombreuses au Sénégal et les grandes banques qui doivent souvent s’engager quand il s’agit de plus grand capital. C’est un peu compliqué au Sénégal avec cette fracture», a fait remarquer d’emblée Mme Shallal. Selon elle, des efforts ne manquent pas mais ils ne sont pas poursuivis. «Je vois qu’il y a des efforts pour les groupements féminins et certains jeunes d’accéder à un petit financement au niveau des structures de micro crédit.
Mais le problème c’est que l’entreprise n’est pas en mesure de gravir les échelons en termes de capital. Car il doit arriver un moment où la Pme doit quitter ce stade pour viser un échelon supérieur et c’est là où il y a un vide», a-t-elle déclaré alors qu’elle faisait face à la presse, hier, dans les locaux de l’ambassade des Etats Unis au Sénégal.
La solution proposée par Mme Shallal est de revoir la structure d’accompagnement. Pour elle, l’assistance ne doit plus être seulement financière et revenir seulement aux banques. Mme Shallal de confier : «Ce qu’il faut aujourd’hui c’est des «Business-Angels» pour investir dans des projets qu’ils penseront être rentables».
Encore inexistants dans le jargon sénégalais des affaires, les business-Angels sont définis par l’experte américaine comme étant «des privés personnels ou collectifs qui apportent leur investissement mais aussi un accompagnement en conseils dans toutes les étapes de la vie de l’entreprise».
Tout en précisant que ces «Business-Angels» ne vont pouvoir réclamer un retour sur investissement qu’au bout de cinq ans, le professeur d’université a indiqué que c’était à la mode au Moyen Orient et même en Afrique du nord. «C’est à l’Etat de les encadrer mais c’est des réseaux qui marchent très fort. Et il faut tenir compte des spécificités régionales», a-t-elle précisé.
La famille, l’autre problème
A côté de ce manquement structurel, Audra Shallal a estimé avoir noté certaines pratiques culturelles qui ne facilitent pas toujours l’autoentreprenariat. «La grande faiblesse du Sénégal, c’est ce paranoïa de la propriété intellectuelle. Hier j’étais en visite chez des étudiants et j’ai déjà noté cette pratique», a-telle confié. Pour elle, un projet n’est pas à conserver. «Il est évident que quand on a un bon projet mais qu’on ne fait que s’en vanter, une autre personne va le mettre en pratique à son profit».
L’autre chose qu’elle dit avoir remarqué comme étant un frein à l’auto-entreprenariat, c’est la réalité sociale bien sénégalaise qui consiste à travailler pour «sa famille». «Il y a beaucoup de jeunes qui veulent investir dans des projets et se développer mais ils ne peuvent pas parce qu’il faut qu’ils donnent à leurs familles», a-t-elle regretté.