MANDELA, LE SPORT EN ARME POLITIQUE
Dakar, 6 déc (APS) - Nelson Mandela, le premier président noir d’Afrique du Sud (1994-1999), dans sa quête d'érection d’une nation ‘’arc-en-ciel’’, s’est appuyé sur le sport pour créer les liens distendues entre les différentes composantes raciales de son pays pendant la période de l’apartheid.
Les images du président Mandela à l'Ellis Park de Johanneburg en 1995 aux côtés des Springboks, l’équipe nationale sud-africaine de rugby, ont fait le tour du monde.
Le rugby fut naguère un sport de la minorité blanche. Mais Nelson Mandela, élu en 1994, n’a pas hésité à se mettre derrière cette équipe lors de sa finale contre les All Blacks de Nouvelle Zélande, grandissime favoris de la compétition.
La magie de la présence de Madiba a changé la donne, selon François Pienaar, le capitaine de l’équipe de l’époque. Et le film ‘’Invictus’’ où Morgan Freeman jouait le rôle de Nelson Mandela,a bien campé cet événement.
Cette finale du 24 juin 1995 à Johannesburg a contribué à faire tomber beaucoup des murs d’incompréhension entre une société blanche regroupée autour du rugby et des Noirs dont le sport favori restait le football.
Désignée pour sauver la tenue de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 1996, l’Afrique du Sud a réussi à s’imposer à la grande joie de Mandela et des Noirs de la nation arc-en-ciel qui voyait leur sélection s’imposer sur le continent.
Mandela, boxeur amateur, ne pouvait rester insensible à cette équipe des Bafana-Bafana majoritairement composés de Noirs mais où des stars blanches, le capitaine Neil Tovey, le défenseur central Mark Fish et l’entraîneur Clive Barker, émergeaient du lot par leur talent.
Mandela, décédé ce jeudi à l’âge de 95 ans, voyait à travers cette équipe de football son projet de réconciliation nationale prendre forme avant même les tribunaux ‘’Vérité et Réconciliation’’.
Même s’il voulait accueillir le plus grand événement sportif du continent, la Coupe d’Afrique des nations (CAN) de football, Nelson Mandela est resté droit dans ses bottes dans son combat pour la liberté et la démocratie.
A la tête d’un groupe de pression menée par les organisations de défense de droit de l’homme comme Amnesty International, il a refusé de desserrer l’étau contre le pouvoir dictatorial de Sani Abachi au Nigeria qui venait d’exécuter le chef de file de mouvement des peuples Ogoni, Kan Saro Wiwa.
L’exécution en novembre 1995 de ce militant de la cause Ogoni a donné lieu à une levée de boucliers et une condamnation générale en Afrique et dans le monde.
Ne pouvant goûter à cette prise de position de Mandela, Abacha refusa à sa sélection, les Super Eagles, d’aller défendre, en 1996, en Afrique du Sud, leur titre gagné en 1994.
Ce chantage ne prend pas, puisque le leader sud-africain refuse de céder et la CAN 1996 s’est déroulée sans le champion en titre.
D’autres événements comme les Jeux Africains qui ont eu lieu à Johannesburg en septembre 1999 sont venus conforter aux yeux des Sud-Africains que le sport peut changer beaucoup de choses dans une société.
Avant son décès, ce jeudi, Nelson Mandela qui a quitté le pouvoir en 1999, a réussi à pousser la FIFA à confier à son pays l’organisation de la coupe du monde 2010, la première en terre africaine.
Mieux encore, son entrée sur la pelouse du Soccer City de la capitale économique sud-africaine le jour de la finale de la coupe du monde 2010, est restée comme un des grands moments de cet événement planétaire.
Des jours avant cette finale, les observateurs et les chroniqueurs n’avaient que cette présence de Madiba sur les lèvres à cause des incertitudes.
Mais finalement accompagnée de son épouse Graça Machel, dans une voiturette de golf, son tour d’honneur avait fait parcourir des frissons dans les tribunes de cet immense stade.