SANDAGA EST FERMÉ
MENAÇANT RUINE
Depuis hier soir à minuit, le marché mythique dénommé Sandaga est fermé pour des raisons de sécurité. Décision du Préfet de Dakar Alioune Badara Diop par arrêté portant fermeture provisoire du marché.
Ce n’est pas pour cause d’absentéisme du aux fêtes de tabaski. Cette fois, c’est pour de bon. C’est sur les antennes de la télévision nationale que le préfet de Dakar, Alioune Badara Diop, a annoncé hier vendredi, la fermeture (à partir de minuit) du marché Sandaga, « Pour un problème de sécurité », a fait savoir le Préfet. Celui-ci d’expliquer que « C’est pour préserver notre pays d’une éventuelle catastrophe ».
Une nouvelle qui ne sera pas toutefois pas forcément du goût des commerçants dudit marché, mais le Préfet de faire savoir que « Nous avons un site au niveau du camp Lat Dior pour recaser ses commerçants. » Des commerçants qui pour la plupart ne sont pas encore de retour des fêtes mais qui, ne devraient pourtant pas être surpris par la décision dans la mesure où, selon le Préfet, ils en étaient avertis.
Le dernier avertissement en date émanait d’ailleurs du chef de l’Etat Macky Sall, lui-même, lors du conseil des ministres du 3 octobre dernier. Abordant alors le premier point de sa communication consacré à la situation d’insalubrité des marchés sur l’ensemble du territoire national, le Président de la République avait exprimé sa préoccupation face à ce phénomène, qui constitue un risque sanitaire majeur pour les populations. Le président Macky Sall avait ainsi invité le Gouvernement à veiller « scrupuleusement » à l’amélioration du cadre de vie dans les marchés, en veillant « surtout à la sécurité civile des bâtiments », en engageant un audit technique, sans délai, de l’édifice principal du marché de Sandaga, afin d’entreprendre, en rapport avec la ville de Dakar, les travaux de réhabilitation et de sécurisation appropriés. De toute évidence, ces directives du président Sall ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd.
Autant de Sandaga que de marchés
Connu pour être un haut lieu de négoce de la capitale sénégalaise, le marché Sandaga devrait son nom à un arbre appelé « sand » en wolof, qui se dressait, précisément à l'endroit qu'occupent aujourd'hui les marchands d'or. D'abord occupée par des peuls qui y écoulaient leurs produits laitiers, l'ombre de cet arbre, pris d'assaut par des vendeurs de poissons, avait fini par devenir un lieu de négoce. « Sand ga », désignait finalement l'arbre et son environnement immédiat. Le « sand » serait ainsi un arbre dont le fruit ressemble à celui du baobab.
C’est en plein centre ville, entre les avenues Lamine Gueye et Emile Badiane que la bâtisse principale du marché Sandaga de Dakar a été implantée. Vieux d’environs 80 ans, ce vieil édifice est en état de délabrement avancé. En septembre 2012 déjà, les faibles quantités de pluie qui étaient tombées dans la capitale avaient révélé la fragilité de l’édifice. Les gouttes d’eau infiltraient le radier du bâtiment pour stagner dans les ruelles du marché. Les murs fissurés, la peinture jaunâtre défraîchie, insalubrité, odeur nauséabonde, fissures profondes, toiles d’araignées, campent le décor de ce marché tandis que des ornières et des caillasses remplissent une dalle, « principal problème du marché », véritable « bombe », qui risque de s’effondrer à tout moment.
La vieille bâtisse qui se désintègre chaque jour davantage, avait bien fait, en 2006, l’objet d’un arrêté signé par l’ancien maire Pape Diop. Dans cet arrêté n° 407/Vd/Dau/ds, daté du 22 février 2006, le maire Pape Diop avait bien saisi, à l’époque, le préfet de Dakar Mamadou Dia, pour l’inviter à « faire prendre les dispositions nécessaires aux services compétents de l’Etat pour l’évacuation du bâtiment abritant le marché qui risque de céder, à tout moment ». Cet arrêté, envoyé au préfet d’alors avec ampliation au chef de l’Etat, au Premier ministre, au ministre de l’Intérieur, ainsi qu’au ministre en charge de la Culture et du patrimoine historique classé, de même qu’au gouverneur de Dakar, était malheureusement resté lettre morte. Les occupants de ce marché en ruine ont toujours opposé un niet catégorique à cette même autorité.
Cheikh Guèye, le premier adjoint à l’actuel Maire de Dakar, réagissait récemment quant aux directives du président Macky Sall qui réclamait «un audit technique, sans délai», en estimant que cela « soulageait beaucoup la mairie de Dakar ».
Estimant par ailleurs qu’au Sénégal et comme partout dans le monde, il y a des édifices qui contribuent à la sauvegarde du patrimoine national, il jugeait préférable de les entretenir et réfectionner, ne serait-ce que la configuration architecturale.
Dès lors, la question est qu’en fera-t-on après ? Car s’il faut conserver le marché, étant donnée sa situation en plein centre-ville, il y a de fortes chances que les mêmes causes produisent les mêmes effets.
Au-delà du marché Sandaga, l’action des autorités devrait s’étendre à tous les édifices publics qui menacent ruine dans la capitale et même à l’intérieur du pays. C’est le cas du marché central de Kaolack dont le président Macky Sall, dans le même contexte du conseil des ministres du 03 octobre dernier, avait également demandé au Gouvernement d’engager, « dans les meilleurs délais », les voies et moyens de la réhabilitation et de la modernisation.
Il en va de l’état des abattoirs, les abattages clandestins d’animaux, la vente illicite d’aliments périmés et de médicaments dans les rues et dans certaines boutiques, bref, tous ces phénomènes qui exposent les populations à des risques élevés.