GUERETI BADJI, ARTISTE MILITANTE DE LA PAIX EN CASAMANCE
Elle a décidé de consacrer sa vie pour que sa patrie retrouve le bonheur - Avec sa voix comme bâton de pèlerin, elle parcourt le Sud pour sensibiliser les populations sur la possibilité d’une vie meilleure - ENTRETIEN
Elle a décidé de consacrer sa vie pour que sa patrie (la Casamance) retrouve le bonheur. Avec sa voix comme bâton de pèlerin, elle parcourt le Sud pour sensibiliser les populations sur la possibilité d’une vie meilleure. Dans cet entretien, elle nous parle de la richesse culturelle de chez elle, de la « nuit du bougarabou » qui se prépare, etc.
Vous êtes une militante de la paix. Qu’est-ce que cela implique pour l’artiste que vous êtes ?
Beaucoup de choses, car le processus est souvent long et demande beaucoup d’actions. J’utilise mon art pour sensibiliser les gens sur la paix en Casamance. Je parcoure tous les coins de la Casamance pour parler aux gens y compris les membres du MFDC dans leurs bases. Je rencontre de jeunes filles et des femmes pour les motiver à s’investir dans le travail pour réussir. Je fais des plateaux pour dire au monde que ma Casamance peut connaître mieux et avoir mieux, car nous avons une richesse culturelle et économique énorme à valoriser.
Vous êtes une sorte d’Aline Sitoé Diatta moderne ?
Je suis déjà une grande fan de cette reine mythique. Pour moi c’est juste continuer son combat pour que ce qu’elle voulait pour la Casamance se réalise. D’ailleurs j’ai eu l’honneur de passer quelques jours avec les membres de la famille royale d’Aline Sitoé et j’ai beaucoup appris au contact de ce gens. J’ai même découvert que la reine était aussi une mélomane et que beaucoup de chansons de Kabrousse viennent d’elle. Nous avons donc des choses en commun elle et moi.
Aujourd’hui, vous préparez la « nuit du bougarabou », une continuité de votre combat ?
Oui, cette nuit est dédié à la promotion de la culture casamançaise, à la reconnaissance des îcones culturelles de la Casamance (l’illustre maître dans l’art du « Bougarabou » Feu Bakary « olé » Diédhiou), à la promotion des jeunes talents de chez nous. C’est aussi l’occasion pour tous les ressortissants du sud de se retrouver pour communier et présenter leur patrimoine à tous ceux qui sont sensibles à la culture casamançaise.
Qu’attendez-vous d’un tel évènement ?
Il y a tellement de choses à faire en Casamance que je ne pourrai pas citer tout ce que nous espérons réaliser au sortir de cette manifestation. Mais retenez que notre souhait est de réunir assez de fond pour accompagner la dynamique de réinstallation des populations des villages impactés par la crise, notamment les villages frontaliers, par un soutien dans l’acquisition de toitures pour couvrir les maisons qu’ils parviennent à construire avec de la terre.
Nous espérons aussi pouvoir organiser une tournée de sensibilisation sur les mutilations génitales. Initier les populations de la Casamance à des activités de développement durable par la capacitation entrepreneuriale de groupements féminins communautaires ciblés. Voilà entre autres les grands projets que nous avons pour nos frères et sœurs de la Casamance.
Vous avez parlé tantôt de la richesse culturelle de la Casamance.
Oui nous sommes immensément riche de ce côté-là. Si on s’arrête à la musique par exemple, je vous apprendrai que la Casamance n’a pas une musique, mais des musiques. Plus d’une vingtaine car chaque cérémonie à une musique propre, chaque ethnie compte plusieurs musiques identitaires. Nous sommes donc riches d’une vingtaine de styles musicaux, et notre rôle est de les faire connaître au monde.
Qu’est qui empêche les rythmes de Casamance de sortir du sud ?
Le manque de plateformes adéquates pour faire de la musique surtout. Nous avons beaucoup de talents, mais pas d’infrastructures pour faire de la musique ou pour la faire connaitre à l’extérieur. Il nous faudrait des studios, des maisons de productions, des promoteurs culturels, de la visibilité médiatique, etc.
Quels sont vos projets musicaux ?
Je suis en train de préparer mon prochain album dans lequel il sera beaucoup question de fléaux comme l’excision, la déforestation, les problèmes fonciers, entre autres. En attendant, je continue mes tournées pour aller au contact des populations.