CES MAUX QUI FREINENT LE DEVELOPPEMENT DES ENTREPRISES DU BTP
Difficulté d'accès à la commande publique, prolifération d’organisations, entreprises non qualifiées... le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) demeure jusque-là le parent pauvre de l’entrepreneuriat économique
Le syndicat national des entreprises du bâtiment et des travaux publics (SNBTP) a tenu son assemblée générale hier, sous le thème «Partenariat public privé, la préférence nationale en action». une occasion saisie par le secrétaire général dudit syndicat, Abdel Kader Ndiaye, pour lister les maux qui freinent le développement des entreprises du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP) et d’inviter l’État à privilégier la préférence nationale.
Occupant une part importante dans l’économie nationale, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) demeure jusque-là le parent pauvre de l’entrepreneuriat économique. En effet, cette locomotive de l’économie sénégalaise dont le développement reste fortement arrimé à la croissance globale de notre économie contribue, rien que par la branche construction, à hauteur de 3% du PIB en 2018 et 12,3% de la valeur ajoutée du secteur secondaire. Ce qui en fait un secteur incontournable au vu des nombreux liens avec d’autres secteurs économiques connexes à qui il offre de fortes consommations, particulièrement l’industrie. Toutefois, il faut reconnaître que cette embellie ne profite pas aux entreprises sénégalaises, et surtout aux PME / BTP, même si l’Etat, avec l’aide de ses partenaires au développement, constitue son plus gros client à travers ses grands donneurs d’ordre (agences) et acheteurs publics qui absorbent plus de 50% de la commande publique. Une situation que déplore le Syndicat National des Entreprises du Bâtiment et des Travaux Publics (SNBTP).
Tenant hier leur assemblée générale, son président indique que la part moyenne cumulée de marchés des entreprises étrangères, dans les marchés immatriculés entre 2019 et 2021, équivaut ou dépasse le budget national en valeur.
De l’avis d’Abdel Kader Ndiaye, l’un des freins au développement des entreprises sénégalaises du secteur et surtout de la Pme reste lié aux conditions d’éligibilité et au système d’allotissement de la commande publique, surtout en matière de grands travaux. Pour lui, il s’agit là des raisons qui expliquent l’affaissement de nos entreprises et les difficultés de développement du secteur privé malgré l’affichage des taux de croissance moyenne de 6,6% publiés sur la période 2014-2018 et des taux de croissance respectifs du PIB réel estimés à 5,1% en 2020 et 6,1% en 2021.
De plus, il précise que le volume d’investissement cumulé de 9 685,7 milliards dans cette période a peu profité à l’entreprise sénégalaise. Occasionnant ainsi des difficultés de développement du secteur face en partie à des politiques qui ont généré une croissance extravertie. Revenant en outre sur les faiblesses de la filière BTP, M. Ndiaye indique qu’ils ont comme nom un cadre institutionnel désorganisé avec l’absence de dispositif de qualification et de classification des entreprises, la prolifération d’organisations professionnelles, la diversité des corps de métiers (bâtiments et travaux publics), une pléthore d’entreprises non qualifiées et de faibles capacités, caractérisées par des insuffisances en matière de formation. A cela s’ajoute un déficit de financement de l’activité remarquable par les difficultés d’accès au crédit et sa cherté, les créances non recouvrées et les longs délais de paiement soulevés par les acteurs de tous les sous-secteurs confondus etc. Une plainte qui, dira-t-il, reste en contradiction avec les statistiques officielles publiées qui affichent le respect des délais contractuels de paiement par les autorités contractantes.
LA PREFERENCE NATIONALE COMME MOTEUR DE RELANCE DU SECTEUR BTP
Sur le choix du thème «partenariat public-privé, la préférence nationale en action», Abdel Kader Ndiaye révèle que c’est un prétexte pour prendre part activement aux débats de l’heure, à travers une démarche participative et un esprit de concertation, de dialogue serein et constructif. En outre, il offre également l’opportunité aux acteurs de contribuer positivement à la réflexion sur les grands défis de notre développement, par la pertinence de leur force de proposition.
Revenant sur le partenariat entre l’Etat et les acteurs du BTP, il invite les nouvelles autorités à définir le statut de l’entreprise nationale qui demeure la première grande orientation, surtout de son contexte de promotion du contenu local. Mais aussi à relancer l’économie post covid en investissant dans le «produire local, construire local et consommer local» afin de promouvoir un véritable développement endogène.
Sans oublier de donner la priorité à la formation, à l’emploi des jeunes et des femmes, orienter l’économie vers la diversification et éviter l’emprise d’une économie de rente malgré notre nouveau statut de pays pétrolier et gazier, relancer le BTP avec le programme des 100 000 logements en facilitant l’accès au foncier aux constructeurs et aux promoteurs. Sur ce point, il salue l’acte du gouvernement d’affecter le site de Mbour 4 aux promoteurs.
Entre autres mesures, il invite l’Etat à engager et valider en urgence les réformes foncières, d’une part en réservant exclusivement la terre aux nationaux, comme le font bon nombre de pays, et d’autre part en résolvant les difficultés réels d’accès au foncier économique, proposer un pacte national sur l’utilisation de nos ressources qui va garantir que les richesses de notre pays profitent effectivement à nos entreprises et à nos ménages
Dans les domaines d’intervention où la compétence nationale est avérée, il est demandé aux autorités de ne pas recourir à une compétence extérieure. Mais aussi de rétablir le déséquilibre qu’il y a en matière de parts de marché en mettant en avant la préférence nationale et en réservant les ressources budgétaires aux entreprises communautaires, surtout à la Pme, véritable moteur de la croissance endogène. Par ailleurs, le SNBTP invite l’Etat à mettre en œuvre son engagement affiché d’inscrire le développement du secteur privé national en priorité absolue dans les nouvelles politiques publiques. Car la souveraineté politique repose sur le socle de la souveraineté économique, qui ne saurait être sans un secteur privé national fort et soutenu dans son rôle fondamental de moteur et de fer de lance de notre développement économique et social.