L'OPPOSITION DOIT CHANGER DE CAP
EXCLUSIF SENEPLUS - Quand la tyrannie du « roi » conduit aux pires excès, continuer à demander justice à ses valets, c’est de l’accommodement
Par la seule volonté de Macky Sall, Khalifa Sall est en prison. Avant lui, sa majesté avait décidé du sort de Karim Wade. Les deux avaient cru au mirage de l’Etat de droit, à la démocratie plus que jamais menacée aujourd’hui. Le parrainage, avec son corollaire chaotique, est passé comme lettre à la poste. Il est très probable qu’Aly Ngouille Ndiaye organise l’élection présidentielle malgré les récriminations d’une opposition émoussée par les egos. Macky Sall et les troubadours de l’infamie n’ont pas encore fini de briser les ressorts de notre aventure collective. Dans cette grande apathie, s’il gagne en 2019, il briguera un troisième mandat avec l’aide de la nouvelle coterie de juristes flagorneurs. Ne feignons plus l’étonnement.
C’est pourquoi, l’opposition doit réévaluer son approche politique, donner une nouvelle impulsion à son combat qui transcenderait les petites appartenances et les ambitions personnelles quelquefois démesurées. Car, en réalité, cette nouvelle situation créée par le président de la République n’obéit à aucune norme. Se calfeutrer dans une « normalité républicaine » consisterait à maintenir un périlleux statu quo pour le Sénégal. Il faut sonner le branle-bas de combat en rangs serrés. Le dernier sit-in qu’a voulu organiser l’opposition montre plutôt une dispersion des forces, une unité de façade qui ouvre un boulevard au candidat Macky Sall qui n’a pas encore vaincu ses angoisses causées par son avidité. La pathétique danse de la dernière fois du tyran, alors que le peuple patauge dans la détresse, n’était qu’une distraction destinée à tromper son inquiétude et celle de ses ouailles. Mais, le peuple averti appréciera cette écœurante indifférence.
Le président de la République sait bien qu’il ne peut plus compter sur une adhésion populaire à son action de plus en plus outrancière vis-à-vis de ceux qui ont cru à ses harangues d’aspirant. Mais, il pourrait tirer parti d’une opposition minée par les querelles de leadership et un manque de lisibilité des combats qu’elle mène. Il convient, aujourd’hui, de leur apporter une certaine cohérence et de s’affranchir de ce républicanisme « obstructif » qui n’a plus de sens dans un pays où les droits les plus élémentaires sont violés par celui qui est censé les garantir. L’anarchie, ce n’est pas l’opposition qui l’a déclenchée. Elle est provoquée par ceux qui, de manière inconsidérée, foule aux pieds tous les acquis.
Le combat pour la démocratie dessine un univers de permissivité dans lequel devront s’engouffrer les leaders de l’opposition. Quand la tyrannie du « roi » conduit aux pires excès, continuer à demander justice à ses valets, c’est de l’accommodement. C’est faire comme si toutes les institutions s’alignent sur les normes édictées. Rien n’est plus normal dans ce pays. Il faut que tout le monde en soit conscient.
Cependant, on a cette désagréable impression que l’opposition est toujours dans la quête d’une stratégie qui ébranlerait le régime de Macky Sall. Il n’y a que la rue qui pourrait le faire chanceler même si la peur a changé de camp malgré les discours guerriers. Elle est du côté des jouisseurs de la République. La rue a besoin d’un accotoir symbolique pour impulser une dynamique et capter son énergie ; ce que les membres de l’opposition ne semblent pas avoir saisi. Ils véhiculent l’image dégradante d’une opposition dispersée où chaque « faction » exalte le moi de son leader qui espère être le plan Z d’un tel ou d’un autre. Elle n’a pas assez appris des élections législatives. Des résultats de celle à venir, la présidentielle, dépendra l’avenir du Sénégal. Il faut souhaiter des candidatures plurielles. Toutefois, celles-ci ne doivent pas occulter l’essentiel qui est de sauver notre pays aux mains d’un régime dictatorial. Cela vaut tous les sacrifices. Même de mutiler son ego !
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