"TONI MORRISON NOUS RAMÈNE CONSTAMMENT AU MONDE"
La Prix Nobel de littérature en 1993, s'est éteinte dans la nuit du 5 au 6 août, à 88 ans. Christiane Taubira, l'éditrice Dominique Bourgois, la traductrice Christine Laferrière et le journaliste François Busnel lui rendent hommage
Christiane Taubira se souvient avoir découvert Toni Morrison en Guyane, après ses études : "Je suis tombée, ou plutôt je me suis hissée, dans cette littérature qui tranchait complètement avec ce que j'avais déjà lu, y compris en matière de ce qu'on qualifie de littérature africaine américaine". L'ancienne garde des Sceaux évoque sur France Inter une "magnifique, profonde et puissante littérature, à l'esthétique éblouissante" où "la vie bouillonne, effervescente".
Aux yeux de Christiane Taubira, Toni Morrison était une "irréductible optimiste", grâce à une profonde lucidité qui lui permettait de créer des personnages complexes. "Elle est allée au plus profond de l'humanité dans l'esclavage, mais elle nous ramène constamment au monde", souligne l'ancienne ministre.
"Autorité morale"
"Toni Morrison était une autorité morale, mais elle avait l'élégance de ne pas le revendiquer", ajoute l'éditrice Dominique Bourgois. "C’était un modèle pour beaucoup d’écrivains. C’est dans ses livres qu’elle était militante, exigeante. Pas en signant des manifestes".
"Hélas, les derniers mois de sa vie ont été complètement bouleversés par l’élection du président Trump. C’est resté sa rage quotidienne", déclare Dominique Bourgois.
Pour le journaliste François Busnel, directeur de la rédaction de la revue "America", la grande force de l'autrice est "qu’elle a réussi à nous faire comprendre que si nous voulions parler de Trump il fallait revenir à l’écriture et à la littérature".
"Richesse, rigueur, et vigueur"
Comment définir la littérature de Toni Morrison ? Par sa "richesse", sa "rigueur"et sa "vigueur", répond Christine Laferrière, traductrice des quatre derniers ouvrages de l'écrivaine.
Selon Christine Laferrière, Toni Morrison "a réussi à analyser tous les problèmes de l’Amérique, à toutes les époques, sous toutes les formes. Les conflits entre les Blancs et les Noirs, entre l’idéologie et la pratique, les conflits entre les femmes dans leurs relations familiales, intimes et sociales. Pour elle l’art était politique".