L’INDISCIPLINE ET L’ABSENCE DE SANCTIONS, LES «PARRAINS» DES ACCIDENTS
La recrudescence des accidents mortels sur les routes inquiète au plus haut niveau les autorités étatiques ainsi que les organisations de la société civile
. Au Sénégal, deux personnes au moins perdent la vie par jour dans un accident de la circulation. Des chiffres alarmant qui font froid dans le dos: près de 600 morts par an dans des accidents de route, pour 14 millions d’habitants, c’est excessif.
L ’état des routes, des véhicules et l’attitude des conducteurs sont souvent indexés comme principales causes de l’hécatombe sur les routes. Une situation alarmante qui a poussé la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest, en partenariat avec la radio Sud Fm, à poser le débat à travers un forum public à Pikine, pour une introspection profonde afin de déterminer l’impact des accidents de la circulation sur le plan économique et social, évaluer les différentes campagnes de sensibilisation sur la prévention routière et leur efficacité dans la lutte contre le phénomène, évaluer les mesures prises par l’Etat et leur efficacité sur le terrain et amener les autorités étatiques à trouver des solutions pour réduire les accidents. La salle de délibération de la ville de Pikine a abrité le forum public auquel les acteurs du transport, la société civile, les religieux, les organisations de quartiers et les autorités étatiques ont pris part pour diagnostiquer le phénomène et apporter des solutions afin de réduire les accidents de la circulation. C’est le Directeur général de la radio Sud Fm qui a campé le débat sur la problématique tout en souhaitant la bienvenue aux autorités en charges des questions de sécurité routière.
TEMOIGNAGE EMOUVANT D’UN ACCIDENTE DE LA CIRCULATION AUJOURD’HUI HANDICAPE
A sa suite, Boubacar Dabo, Sg de l’ANPAV qui fait un témoignage émouvant sur sa situation de handicap survenu après un accident de la circulation. «Je suis victime d’accident de la circulation. Et j’ai subi 19 opérations. Voyez-vous comment cela est couteux en terme de prise en charge», a fait savoir M. Dabo à l’assistance, sur la prise en charge des accidentés. Et de poursuivre, pour évoquer l’aspect social: «c’est difficile d’être un accidenté de la circulation si tu n’as pas un bon soutien familiale. J’exhorte les dames à soutenir et supporter leur conjoint malades car il m’est arrivé que ma 1ère épouse me quitte à cause des séquelles de l’accident. Il a fallu qu’on me (re) donne en mariage ma cousine qui est la maman des enfants. Une dame qui m’a beaucoup soutenu dans les moments difficiles», a témoigné M. Dabo, pour expliquer le calvaire des accidentés de route qui sont abandonnés à leur sort. Un témoignage corroboré par Babacar Thiam, chirurgien orthopédiste à HOGGY qui est revenue sur la prise en charge des malades.
VERS L’INTRODUCTION DE L’ENSEIGNEMENT DE LA SECURITE ROUTIERE A L’ECOLE ET...
Le chef de la Division de la circulation et de sécurité routière au niveau du ministère des Infrastructures et des Transports terrestres est revenu en large sur le Plan national de sécurité routière mis en œuvre par l’Etat pour amoindrir les accidents de la circulation. Il sera pris «un décret ou arrêté pour définir le rôle du médecin, des Force de défense, de la Direction des transports, des Sapeurs-pompiers en cas d’accident. Ça sera institutionnalisé pour que chacun connaisse sa part de responsabilité», a indiqué Ousmane Ly. Et de poursuivre sur la sensibilisation et les comportements à adopter sur la route lors de déplacements de masses durant les Magal, Gamou, entre autres, pour réduire les accidents. «Nous avons mis sur pieds, pour mieux sécuriser, une application audiovisuelle du Code la route pour éviter le contact entre l’examinateur et le candidat et une autre application pour toutes les langues codifiées du Sénégal pour les non instruits. Nous avons aussi le Capp karangué pour la sécurisation des permis. Nous voulons aussi introduire l’enseignement de la sécurité routière en milieu scolaire. Nous avons déjà formés 1835 élèves dans 08 écoles», renseigne le chef de la Division circulation et sécurité routière. M. Ly ajoute que dans le cadre du 7e volet du Plan national qui parle de l’application de la loi, des moyens ont été mis à la disposition des Forces de sécurité dans le projet Capp Karangué, des appareils radars entre autres, et même une brigade mixte avec des agents assermentés pour appuyer les Forces de défenses et de sécurité sur le terrain dans les opérations de contrôles et sécurisations, a soutenu M. Ly.
...UN CENTRE DE REGULATION POUR OPTIMISER L’ORIENTATION DES VICTIMES VERS LES URGENCES
En termes de perspectives, ce dernier décline un programme ambitieux: «nous allons renouveler le parc interurbain, après l’avoir fait avec les Tata, nous sommes en pleine discussion avec les exploitants. Un 2e Centre de visite technique à Dakar est en bonne voie. Mieux un Appel d’offres est lancé pour construire des Centres de visites techniques dans toutes les régions du Sénégal, le financement est déjà acquis», a fait savoir M. Ly. Se prononçant sur les services d’urgences post-accidents Ousmane Ly annonce un Centre de régulation pour optimiser l’orientation des victimes vers les services d’urgences. Selon lui toujours, un document est en train d’être paraphé, de concert avec les acteurs du transport, pour limiter l’âge d’exploitation du véhicule de transport avec des conditions d’accompagnement pour l’exploitant, a-t-il rassuré.
L’INDISCIPLINE SUR LES ROUTES ET L’ABSENCE DE SANCTIONS, LA BASE DES ACCIDENTS
Général Mansour Niang, officier de la Gendarmerie à la retraite, déplore l’indiscipline sur les routes et l’absence de sanctions. «L’indiscipline est à la base de tous ces accidents, aucune règlementation n’est respectée. La voiture est un outil extrêmement dangereux, extrêmement rapide et lourd. Son utilisation est assujettie à une réglementation très précise, très sérieuse et très stricte qui est le Code de la route. Ici au Sénégal, personne ne respecte le Code la route», a regretté le général. Se prononçant sur les sanctions, il dira: «il faut voir le nombre d’infractions sur les routes simplement, si elles étaient sanctionnées, il y aurait moins d’accidents. Le Code de la route interdit le dépassement sur le passage piétions, les motos dépassent sur les passages piétons et c’est une infraction très grave. C’est réservé exclusivement aux piétons et elles s’y engouffrent à tout moment. Et surtout éviter de dépasser un véhicule qui laisse passer des piétions, ça peut créer des accidents mortels. Et j’ai demandé aux gendarmes et aux policiers s’ils en relèvent, mais personne ne relève ça», s’est indigné le général.
POUR UNE REGLEMENTATION DE LA CIRCULATION DES MOTOS ET L’INTERDICTION DES CHARRETTE ET POUSSE-POUSSE
Sur la question des motos qui pullulent, le général préconise le retrait de ces engins pour ensuite tendre vers une nouvelle règlementation. «On voit des motos qui empruntent des passerelles, qui font des queues de poisson sur la route, qui dépassent les passages piétons, qui dépassent même les feux rouge et personne ne les réprime. Et le charretier, il sort de son village avec sa charrette, il roule, on ne lui demande rien; alors que nous, on nous exige de faire le code, la conduite et la visite technique. C’est inconcevable ! Les charretiers, tout comme les pousse-pousse ne doivent être acceptés dans la circulation. Les pousse-pousse ne doivent être acceptés que dans des espaces fermés comme le port, la gare, les marchés; ils ne peuvent rouler sur la chaussée, c’est interdit. Il faut réprimer. Si on ne réprime pas, les accidents vont continuer. Sensibiliser des gens qui sont indisciplinés, c’est perdre son temps, il faut les sanctionner. A Dakar, on a des lignes continuent qui ne servent à rien, les gens marchent dessus. Pédagogiquement, on ne peut pas mettre des lignes continues et accepter que les gens les franchissent. C’est comme le stop, en ville. C’est une aberration», a tonné le général Niang.
PRES DE 600 MORTS PAR AN DANS DES ACCIDENTS, POUR 14 MILLIONS D’HABITANTS, C’EST ExCESSIF
Awa Sarr de Laser International, préconise comme solution, «le respect du Code de la route. La 2e solution, c’est l’application de toutes les dispositions et les dispositifs règlementaires. Que tout le monde aille changer son permis et tous les autres titres de transport et pouvoir respecter le dispositif du véhicule, qu’il soit en état de rouler, mais également de respecter les dispositions qui font que la route se partage. C’est un devoir de citoyen de respecter les dispositif mis en place par l’Etat pour la sécurité routière», a fait savoir Awa Sarr. Poursuivant sur l’hécatombe sur les routes, elle rappellera que «la moyenne sur les 3 derniers année est de 550 morts sur les routes. Nous sommes vers 600 morts par année et c’est excessif pour une population de 14 millions de personnes. Nous lançons un appel à tous les citoyens pour leur dire que la route n’est pas un espace de violence, mais un espace de partage». A l’endroit des Forces de défense, elle appellera à une collaboration avec les populations et veiller à l’application stricte de la loi sur les route. Le forum a enregistré la participation des acteurs du transport qui ont magnifié cette rencontre d’échanges pour des solutions durables afin de réduire les accidents de la circulation.