OXYGÈNE AU MARCHÉ
Babacar Diagne appartient au monde d’avant. Il n’arrête pas de réviser ses jugements. Avec lui resurgissent les démons anciens : censure, coupure de signal, chape de plomb, interdiction et musellement.
Babacar Diagne appartient au monde d’avant. Il n’arrête pas de réviser ses jugements. Avec lui resurgissent les démons anciens : censure, coupure de signal, chape de plomb, interdiction et musellement.
En décidant la semaine dernière de priver le Groupe E-média de la jouissance d’un droit conquis et acquis, le directeur général du brinquebalant Conseil de régulation, rappelle à l’opinion que son geste, dépourvu de toute crédibilité, a partie liée à une intention mal cachée.
Il s’est encloué dans une situation courtelinesque. L’absurdité gouverne son acte, mélange de forfaiture et de trahison d’un serment. Il esquive la question lorsqu’elle lui est posée sur le manquement et se réfugie dans la gêne pour justifier la punition infligée à notre média dans lequel, semble-t-il, il ne compte que des « amis et des jeunes frères… » Passons.
Pour la postérité, la gloire ne sera pas au rendez-vous. Car les droits de télévision, propriété de la Fifa qui les rétrocède à des sociétés étalonnées, étaient soumis à un appel d’offres pour lequel notre groupe a soumissionné en même temps que la RTS et d’autres organes.
La même procédure a prévalu partout en Afrique à l’exception de l’Afrique du sud. Seul le Sénégal s’est encore illustré de la moins brillante des manières où les perdants gagnent et les vainqueurs perdent. Comprenne qui pourra.
Au plan technique, notre dossier se défendait. E-media avait ainsi remporté l’offre technique, avec des preuves irréfutables l’attestant. Donc la Rts était, à ce stade, éliminée. Dès lors s’ouvrait une période de mobilisation de la caution.
Prévenant et ayant l’anticipation chevillée au corps, Mamoudou Ibra Kane, DG de E-Média INVEST, informe par courrier le régulateur, l’invitant implicitement à aviser l’échiquier médiatique de la nouvelle donne. Babacar Diagne ne daigne pas répondre à la lettre de son « jeune frère ». Il prend son temps. Pourquoi ? Mystère.
Le montage financer était sur le point d’être bouclé côté E-Media quand, de l’autre côté, une agitation tatillonne et furtive s’emparait d’une fuite orchestrée au sujet d’un fallacieux défaut de paiement de la caution par E-Media. L’intention de nuire est manifeste.
Toute la hiérarchie de la finance publique est mobilisée aux fins de « prendre le relais » en payant « dans les quarante huit heures ». Ils l’ont fait. Grave. Pire, ils ont surenchéri, en court-circuitant E-Media.
Passé l’effet de surprise, le Top Management tente de comprendre comment a pu se produire le « hold-up ». Entretemps le Président du Collège du Cnra, Babacar Diagne en l’occurrence, se fend d’un communiqué annonçant l’attribution des droits exclusifs de retransmission de la Coupe du Monde Qatar 2022 à la RTS.
En clair, il se sent à l’aise pour protéger le « butin » de la chaîne publique par un soporifique rappel des dispositifs de répression en cas de violation. Sa rapidité à formuler cette note comminatoire contraste toutefois avec la lenteur de sénateur observée lorsqu’il a été saisi par le patron de E-Media.
A l’école de la différence et même de l’indifférence, Babacar Diagne est passé maître. Son attitude et son penchant dénotent chez lui un parti pris délirant. Sa dévotion ostentatoire et sa maladroite complicité des mauvais desseins lui ôtent l’équilibre dont devrait se prévaloir un régulateur des médias. Son soutien à la Rts le disqualifie puisque sommeille toujours en lui le zèle qui ne se remue qu’au moment des « mauvais coups ».
De « béances en urgences », Babacar Diagne ne perçoit plus les dynamiques en cours dans le secteur des médias. A tout le moins sa lecture reste biaisée par sa permanente quête de confort. Mais songe-t-il au réconfort ? A-t-il écho du monde d’après qui se profile ? Que reste-t-il d’un journaliste qui n’entend ni ne voit ?
En prévision de la présente Coupe du monde de football au Qatar, E-Media s’y était préparé méticuleusement avec un alléchant dispositif de promotion de contenus. Certaines entreprises, moins connues mais très volontaires, nous avaient choisi pour « gommer » leur déficit de notoriété. Notre projet de couverture de l’événement se profilait comme une bonne affaire avec des ventes d’espaces qui affichaient un attrait par des tarifs conséquents.
Nos écrans publicitaires se prêtaient au… jeu avec une grille réaliste et des hypothèses basses à l’appui. Bien entendu, nos simulations s’ajustaient au gré des performances des Lions et notre maîtrise des plateformes digitales ainsi que le positionnement de nos Fan’s zones dans des endroits éprouvés complétaient notre stratégie de proximité pour davantage agréger des publics qui s’identifiaient à notre politique éditoriale.
Le rapport du public à une chaîne de télévision donnée relève d’un choix souverain. Idem pour la fidélité qui se construit sur la longue période pour asseoir des audiences confortables. Né il y a quatre ans, E-Media a très vite gagné la confiance de l’opinion grâce à la diversité de ses offres éditoriales, à la progression de sa grille et à une production soutenue. Couper son signal c’est une atteinte à la liberté de choix du public qui saura s’en souvenir…
Ces facteurs crédibilisent notre approche qui rencontre une attente auprès de publics en quête d’éclairage, de loisirs, de détentes, de découvertes, d’analyses et de clés pour comprendre un monde en perpétuel mouvement. Le public ne veut plus broyer du noir. En clair, il a besoin d’offres alternatives de qualité. C’est à se demander si, par ce désir ardent, il ne décrète pas la fin des complaisances, la routine, en un mot, la médiocrité.
Le secteur privé des médias peut ne plus s’apitoyer sur son sort dès lors que le marché fonctionne avec des règles de transparence qui écartent toutes les connivences pour laisser prospérer la compétition et la performance. Un tournant majeur s’annonce avec la fin des « coins pépères » et d’un cycle lénifiant. Place à l’âpre bataille des contenus.
Déjà les médias occidentaux s’installent chez nous. Ils anticipent l’arrivée des grands groupes industriels dans les secteurs très disputés des hydrocarbures dont regorge le Sénégal.
Le temps est donc venu de regarder autrement le fonctionnement des médias dans notre pays. Tout l’écosystème est interpellé à cet effet. Si la chaîne publique bénéficie de fonds publics, elle doit renoncer aux ressources privées dédiées, elles, aux médias privés. Faute de quoi, le déséquilibre qui en résulte fausse la concurrence en raison des distorsions engendrées.
Exposée à des déficits chroniques et toxiques, la RTS, par son actuel statut, perturbe les règles du jeu concurrentiel. Elle doit son salut à la perfusion financière qui lui est administrée. Pour autant, elle demeure vulnérable malgré les appuis nombreux et divers.
La RTS doit être sauvée d’elle-même en se recentrant sur son périmètre. Faudra-t-il envisager son démembrement par une rectification de sa mission allégée de charges destructrices. L’ère des liquidités abondantes s’achève. Le nouvel environnement pénalise les groupes dépourvus de vision, de créativité ou d’anticipation. De ce fait, la Rts se montre incapable de s’adapter à la situation ; voilà pourquoi elle se réfugie chez des puissants pour conquérir injustement des parts de marchés.
Ses incursions dans le secteur privé alors qu’elle bénéficie du parapluie étatique irritent fortement les milieux professionnels du journalisme et de la communication. Le CNRA est mort. Vive le HARCA !