QUAND LE VENT TOURNE
Le Sénégal est plus vieux que l'histoire politique du président et il continuera d’exister après le départ des acteurs du moment. Aucun d’entre eux n’incarne à mes yeux la figure de l’homme providentiel
Jeter l’opprobre sur Ousmane Sonko a été un pari perdu. Presque un coup d’épée dans l’eau. Non seulement cela a discrédité Macky Sall, mais il a conforté les Sénégalais dans leur idée de se dresser vent debout… Mais il faut savoir que, malgré les apparences, ce n’est pas le président Sall qui a fait Sonko. Le type est un marqueur générationnel. Il était simplement au bon endroit, au bon moment. Et, bien sûr, Macky Sall a soufflé dans ses voiles, par manque de discernement et par péché d’orgueil.
Pendant des décennies, une succession de mauvaises politiques, d’accaparement du pouvoir, de sa concentration entre les mains d’un petit nombre, de son utilisation envers et contre les intérêts du plus grand nombre (j’en passe des meilleurs) ont fini par causer le délitement de la classe politique. En conséquence, le changement radical est devenu une demande populaire. Il faut bien que quelqu’un l’incarne. « Yafi seuss moy takha fallou ». Et ce ne sera sûrement pas celui qui manifestement tente un passage en force. Plus il insistera, plus il ouvrira une voie royale et triomphante à Ousmane Sonko.
Pour ma part, je ne m’en cache pas, je ne supporte pas Ousmane Sonko, encore moins ses idées. L’attitude de ses affidés me dérange en ce sens qu’ils lui accordent un crédit sans réserve, une dévotion qui ne dit pas son nom. Au poids des arguments, ses adeptes préfèrent celui des poings, la menace et les invectives étant chez eux érigées en doctrine. Peut-être pensent-ils que «…la modération est une chose fatale. Rien ne réussit comme l’excès ».
Ousmane Sonko a une vision manichéenne du monde, une approche très candide des situations qui à l’épreuve du pouvoir (s’il est de son destin de diriger ce pays), finira fatalement par mesurer la distance qui sépare ses lubies de leur mise en exécution dans un contexte de pression (locale et mondiale). C’est cela la vérité ! Nous ne vivons pas en vase clos et nous ne pouvons pas faire fi de ce qui se déroule autour de nous.
Au Sénégal, nous ne votons pas pour un projet, nous votons contre un système. Puisqu’ainsi est la coutume qui nous a valu les alternances que nous clamons à cor et à cri, j’exhorte à choisir le moindre mal lorsque viendra l’heure de désigner notre prochain président. Ceci étant dit, actualité oblige, je ne m’identifie pas à une liste dont les représentants sont Ameth Aïdara, Assane Diouf, Dame Mbodj, Maimouna Bousso et j’en passe. Pas plus qu’à une autre où je retrouve les noms de Farba Ngom, Aliou Dembourou ou autres valets dont le seul soutien au régime se justifie par l’appartenance ethnique !
Pour terminer, je ne chercherai pas non plus d’arguments pour défendre la position du président si d’aventure il venait à jouer sur la sémantique et l’interprétation des textes pour briguer un autre mandat que le droit et la décence ne lui autorisent pas. Le Sénégal est plus vieux que son histoire politique et il continuera d’exister après le départ des acteurs du moment. Aucun d’entre eux n’incarne à mes yeux la figure de l’homme providentiel auquel leurs laudateurs veulent nous faire croire. Donc, j’observe, j’écoute et je fais le choix dont j’espère souffrir et regretter le moins !