LA DÉFAITE DE MACKY SALL
Le président sortant a multiplié les faux pas. Ces "égarements" selon certains de ses propres soutiens, ont profondément altéré le modèle démocratique sénégalais et éloigné de nombreux sympathisants
D'après les premiers résultats de l'élection présidentielle du 24 mars au Sénégal, rapportés par le journal Le Monde, le candidat du principal parti d'opposition Bassirou Diomaye Faye serait largement en tête au premier tour. Cette avance surprise de l'homme qui prône un "changement radical de système" marquerait un coup de tonnerre dans le paysage politique sénégalais et pourrait sonner le glas du règne de Macky Sall.
En effet, les premiers chiffres donnent Bassirou Diomaye Faye, dauphin d'Ousmane Sonko à la tête du mouvement Pastef, bien devant Amadou Ba, candidat du parti au pouvoir Alliance pour la République (APR) fondé par Macky Sall. Selon les estimations rapportées par Le Monde, le candidat de l'opposition parviendrait même à l'emporter dès le premier tour;
Cette première place surprise est déjà qualifiée de "tour de force" par le journal, Bassirou Diomaye Faye étant encore méconnu du grand public il y a un an. Sa popularité ne fait que de s'accroître depuis qu'il a été emprisonné puis libéré seulement 10 jours avant le scrutin par le pouvoir, aux côtés de son mentor Ousmane Sonko, figure de proue de l'opposition incarcérée pendant plusieurs mois suite à des accusations de "atteinte à la sûreté de l'Etat".
Avec le slogan "Sonko c'est Diomaye, Diomaye c'est Sonko", le candidat a su remobiliser les partisans de l'opposant derrière son nom. Dans les rues de Dakar, ce sont des scènes de liesse qui se sont produites peu après l'annonce des premières estimations donnant Bassirou Diomaye Faye largement gagnant. Selon Le Monde, la victoire de l'opposant marquerait ainsi un "référendum anti-Macky Sall".
En effet, le président sortant Macky Sall, qui achève son second et dernier mandat, semble être le grand perdant de ce scrutin. Depuis trois ans, il a multiplié les actions répressives à l'encontre de ses opposants, emprisonnant manifestants et opposants, dont son ennemi juré Ousmane Sonko. Il a également suspendu le premier tour initialement prévu le 25 février, plongeant le pays dans l'incertitude et générant des tensions qui ont fait plusieurs morts.
Tous ces "égarements" selon ses soutiens cités par Le Monde, ont profondément altéré le modèle démocratique sénégalais et éloigné de nombreux sympathisants. Le choix tardif d'Amadou Ba comme dauphin, combattu au sein même de son camp, n'a pas convaincu. Et la libération soudaine d'Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye à seulement 10 jours du vote interroge.
S'il est confirmé, ce séisme politique marquerait ainsi la fin de règne laborieuse du président Sall, qui laisserait un pays fracturé après avoir "tout fait pour tenter d'arrêter la trajectoire" de son ennemi juré Ousmane Sonko, selon une source diplomatique citée par Le Monde.
Bassirou Diomaye Faye devra désormais transformer l'espoir suscité en réalités durables, dans un contexte économique et social difficile.