AU G20, LE PLAIDOYER DE MACKY SALL POUR L’ALLEGEMENT DE LA DETTE
Olusegun Obasanjo, Macky Sall, Joyce Banda, Jakaya Kikwete, Nana Akufo-Addo et Ameenah Gurib-Fakim, Hailemariam Desalegn et Yemi Osinbajo se sont réunis autour de l’Initiative des leaders africains pour l’allégement de la dette (Aldri)
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Ce 27 février 2025, les anciens présidents Olusegun Obasanjo, Macky Sall, Joyce Banda, Jakaya Kikwete, Nana Akufo-Addo et Ameenah Gurib-Fakim, l’ancien Premier ministre Hailemariam Desalegn et l’ancien vice-président Yemi Osinbajo, réunis autour de l’Initiative des leaders africains pour l’allégement de la dette (Aldri), ont signé «La Déclaration du Cap», pour «une action audacieuse et urgente en vue d’un plan global d’allégement de la dette pour l’Afrique et d’autres pays en développement victimes du fardeau excessif de la dette».
«Plus de la moitié de la population africaine vit dans des pays qui dépensent plus en paiements d’intérêts qu’en éducation, en santé ou en climat.»
En vue de relever les défis des Odd des Nations unies, de l’Agenda 1963 de l’Ua et de l’Accord de Paris sur le climat, l’Afrique a besoin de mécanismes spécifiques, afin de bénéficier de financements innovants, à faible coût et à des conditions favorables à son économie.
Les leaders de l’Aldri proposent deux volets : une restructuration globale de la dette des pays fortement endettés et une réduction du coût du capital pour tous les pays en développement.
Parmi les signataires de la Déclaration du Cap, figure en bonne place le Président Macky Sall dont l’agenda international, durant ses deux mandats à la tête du Sénégal et ensuite dans le cadre du Pacte de Paris pour les peuples et la planète (4P), s’est toujours inscrit dans le cadre d’une refonte du système économique et financier mondial, avec un axe majeur relevant de l’allègement et de la soutenabilité de la dette.
L’aide au développement a montré ses limites ; elle n’est pas efficace pour réduire les écarts entre pays en développement et nations industrialisées. L’Afrique, pour relever les défis de l’émergence, a besoin d’un volume massif de capitaux, qui proviendrait des investissements directs étrangers et d’une dette soutenable.
Encore sur ce sujet de la gouvernance mondiale, le Sénégal, sous Macky Sall, a toujours été au cœur de la réflexion et de l’action pour la transformation des économies africaines. Le lancement du Plan Sénégal émergent, en 2014, répondait à l’impératif de changer la structure des politiques publiques. Jusque-là réduites à l’enjeu de la réduction de la pauvreté, les politiques publiques sénégalaises se structuraient désormais autour d’une vision conquérante, celle de l’émergence dont la condition sine qua non était la création d’une croissance génératrice d’emplois et d’inclusion sociale. Le Pse a pu obtenir un soutien conséquent de la Communauté internationale, avec la tenue de deux groupes consultatifs où le Sénégal a mobilisé des engagements de près de 4000 milliards de francs Cfa pour la phase 1 et 7356 milliards pour la phase 2.
Cette confiance des partenaires publics et privés était due à la crédibilité de la signature du Sénégal, à la solidité et la cohérence de son plan de développement et au sens du leadership qu’incarnait notre pays.
Transformer le visage de son pays, élaborer une ambition de rattrapage notamment infrastructurel, réinstaurer l’espoir face au fatalisme du sous-développement nécessitent une volonté prométhéenne, mais aussi une confiance en interne et en externe. Celle-ci permet d’engager les composantes de la Nation autour d’une politique de l’émergence et les partenaires pour investir et accorder des prêts conséquents. Face aux tenants de slogans d’estrade et aux théoriciens du misérabilisme, il faut rappeler une évidence : il n’y a pas d’alternative à la dette et à l’attrait de capitaux massifs pour relever les défis des infrastructures, de l’industrialisation, de l’emploi en vue de créer les conditions d’une prospérité partagée.
L’Afrique, comme l’a rappelé récemment le Président Sall lors de sa Keynote speech lors d’un panel de l’Atlantic Council, est une terre de ressources incommensurables, notamment par la jeunesse de sa population dans un monde qui vieillit, les ressources naturelles, les immenses espaces de terres arables, les cours d’eau et la vitalité créatrice de ses jeunes et ses femmes. Ce sont autant de potentialités qui peuvent nuancer les défis nombreux mais pas insurmontables. L’heure n’est pas au fatalisme ni au repli sur soi, encore moins à l’apitoiement. Un chef, c’est d’abord la compétence, la crédibilité et le prestige ; c’est aussi un propulseur d’espoir et un embrayeur de récits d’espérance, qui chasse les démons de l’apathie et du découragement.
Pendant douze ans, le Sénégal sous Macky Sall a pesé en Afrique et dans le Sud Global sur la réforme de la gouvernance mondiale. Dakar a été un centre névralgique pour imposer le sujet de la dette, sa structure, les possibilités qu’elle offre, mais aussi les potentialités de développement que son service obère pour des dépenses sociales, notamment dans des secteurs vitaux comme l’éducation, la santé, la culture et le sport. Le Président Sall a plusieurs fois interpellé les pays industrialisés sur des aspects concrets de la dette liés aux taux d’intérêts dont les paiements prennent une part conséquente dans les budgets nationaux.
Il y a également le sujet relatif aux délais de remboursement, car pour des infrastructures qui doivent changer la vie de plusieurs générations, les créanciers réclament des délais de paiement trop courts. Or, aucun pays n’a relevé le défi du développement à travers une stratégie à court terme ; l’architecture de la dette doit épouser les contours du long terme en vue de son efficacité, de son efficience et pour lui permettre d’avoir un impact auprès des populations, notamment les jeunes et les femmes.
Il faut aussi aborder la question lancinante des primes d’assurance très élevées -parfois jusqu’à 15% pour les mieux lotis-, et que rien ne justifie quand il s’agit de l’Afrique. Sur ce sujet précis, il faut rappeler, pour la dénoncer, une grande injustice. La «prime à l’Afrique» est un mécanisme inique qui surévalue le continent en matière de risque. Or, une étude de Moody’s révèle que le taux de défaut sur les projets d’infrastructures est plus faible en Afrique qu’en Asie et en Amérique latine.
Propulser une ambition, faire preuve de leadership et porter la flamme de l’espoir ont aussi une valeur relative à l’atténuation de la perception du risque. Mais le nouveau dogme de gouvernance érigé au Sénégal, qui veut que les autorités en charge vilipendent leur pays, accusent leur administration de maquillage de comptes et entonnent la mélodie sinistre d’un «Etat en ruine», apporte le discrédit, éloigne les investisseurs et soumet le Sénégal à la dure loi de l’ajustement structurel. Ainsi, à la suite de sorties malheureuses des actuelles autorités, Moody’s a immédiatement abaissé à deux reprises la note souveraine du Sénégal. La note B3 promet aux Sénégalais des lendemains troubles, si un infléchissement dans le discours et la pratique ne s’opère rapidement.
Gouverner c’est agir, ce n’est pas la loi du bavardage permanent. Le Sénégal a une tradition d’hommes d’Etat qui, face aux défis de leur époque, ont toujours pris leurs responsabilités, conformément au rôle que le pays a toujours joué en Afrique et dans l’ancien périmètre du Tiers-monde, désormais le Sud Global. En appelant à un Consensus de Dakar, en décembre 2019, au sujet d’une réforme de la dette, en présence de nombreux chefs d’Etat et du Fmi, le Président Sall visait une soutenabilité de la dette africaine pour desserrer l’étau des créanciers sur nos économies fragiles.
Comme président en exercice de l’Union africaine, le Président Sall a multiplié les discours et actions en faveur de la facilitation de l’accès aux capitaux, pour construire des infrastructures de développement ; et ceci conformément au sens de l’histoire car l’Europe, après la Guerre, a été reconstruite grâce à un volume de prêts à des conditions avantageuses. L’Allemagne, par exemple, a pu asseoir une économie forte et dynamique du fait, entre autres, de la restructuration et la réduction à 62% de sa dette dans le cadre de l’Accord de Londres de 1952.
Au surgissement de la pandémie du Covid-19, Dakar a pris le leadership de la campagne internationale pour l’annulation de la dette des pays africains. Selon un rapport de la Banque mondiale, «les pays en développement ont dépensé un montant inédit de 1400 milliards de dollars au titre du service de leur dette extérieure, la charge des intérêts ayant atteint en 2023 son niveau le plus élevé depuis vingt ans. Les paiements d’intérêts ont augmenté de près d’un tiers et se sont élevés à 406 milliards de dollars, grevant dans de nombreux pays les budgets pouvant être alloués à des domaines critiques tels que la santé, l’éducation et l’environnement».
Pour la Banque africaine de développement, «l’Afrique a payé 163 milliards de dollars au titre du service de la dette en 2024». Ce chiffre était de 61 milliards de dollars de 2010. L’institution précise que «la structure de la dette africaine a changé de façon spectaculaire. Alors que la dette bilatérale représente désormais 27% de l’endettement, contre 52% en 2000, la dette commerciale compte pour 43% de l’endettement total (20% en 2000)».
Pour finir, un mot sur l’actualité sénégalaise qui, avec ce régime, prend les allures d’un fait-divers permanent, loin des grandes concertations mondiales en ce moment à Cape Town. Le rapport de la Cour des comptes, en dépit d’une méthodologie douteuse et des conclusions hâtives et confuses, n’est point alarmant sur le sujet de la dette, que même le ministre de l’Economie a jugé «soutenable», malgré les harangues vaines de son Premier ministre.
Le Sénégal s’est endetté non pour des dépenses de prestige, mais pour financer son développement. La dette utile du pays est visible et matérialisable partout. Elle est dans les rames du Ter, les bus du Brt, les amphithéâtres des universités, les salles d’urgence des hôpitaux, les 2000 MW d’électricité produite en douze ans -le Sénégal était à 500 MW en 2012-, les milliers de kilomètres de routes, d’autoroutes, de pistes rurales de production, les navires et avions qui désenclavent la Casamance, les Datacenter… Le Sénégal, sous le Président Macky Sall, s’est donc endetté pour financer des investissements structurants dont la finalité exclusive est la transformation structurelle de l’économie, la croissance et la génération d’un capital humain capable de conduire notre pays à l’émergence. Le Sénégal de ces douze dernières années a ainsi pu inspirer une respectabilité sur la scène internationale au regard de l’ambition qu’il a propulsée à la face du monde.
C’est cette respectabilité, acquise successivement depuis le Président Senghor jusqu’au Président Sall, qui confère à ce dernier cette place au cœur de la réforme de la gouvernance internationale.
«L’allègement de la dette n’est pas une charité. C’est un investissement dans un avenir prospère, stable et durable -pour l’Afrique et l’économie mondiale.»
C’est à Cape Town, au G20 présidé pour la première fois par un pays africain, que se joue actuellement le destin du monde, dans un moment de fractures et d’incertitudes dans le Sahel, de retournement américain sur l’Ukraine, d’inquiétude sécuritaire européenne et de promesse africaine de prospérité.
Macky Sall, théoricien du «multilatéralisme inclusif», est partie prenante d’un monde où toutes les cartes se rebattent, loin, très loin des querelles picrocholines partisanes. Et c’est toujours le Sénégal qui gagne, n’en déplaise aux esprits étriqués mus uniquement par la négation du Sénégal.
Hamidou ANNE
Militant de l’Alliance pour la République