VERS UNE ÉQUITÉ SANS RENIER NOS VALEURS
Les récents débats suscités par certaines décisions administratives ont révélé, une fois de plus, l’ampleur des inégalités de genre et la difficulté à remettre en question un système qui semble immuable

Les récents débats suscités par certaines décisions administratives ont révélé, une fois de plus, l’ampleur des inégalités de genre et la difficulté à remettre en question un système qui semble immuable. Pourtant, il est essentiel d’engager cette réflexion, non pas dans une opposition aux valeurs culturelles et religieuses qui prônent l’équité, mais dans une démarche de justice sociale.
Au Sénégal, comme dans de nombreux pays, les inégalités entre les hommes et les femmes ne se limitent pas aux lois ou aux textes réglementaires. Elles se manifestent dans les comportements du quotidien, dans les attentes implicites assignées aux femmes et aux hommes, et dans des croyances profondément ancrées dans le subconscient.
Le patriarcat : un système invisible mais omnipresent
Le patriarcat s’incarne dans des comportements, des croyances et des normes qui bien souvent passent inaperçus car ils sont profondément ancrés dans notre quotidien. Beaucoup de femmes ne réalisent pas toujours à quel point le patriarcat façonne leur quotidien, non pas parce qu’elles ignorent les injustices qu’elles subissent, mais parce que ces dernières sont souvent normalisées ou systémiques. On les justifie par des traditions, par des usages ou constructions sociaux ou par des interprétations erronées de valeurs religieuses qui, en réalité, prônent l’équité et la dignité pour tous. Ce système se manifeste à travers :
- Les attentes différenciées en fonction du genre : dès l’enfance, les filles et les garçons sont éduqués selon des normes qui dictent leurs rôles futurs dans la société. On valorise l’ambition et l’indépendance chez les garçons, tandis qu’on inculque aux filles l’obéissance, la discrétion et le sens du sacrifice.
- La charge domestique et mentale qui repose quasi exclusivement sur les femmes : même lorsqu’elles occupent des postes à responsabilité, la gestion du foyer et de la famille leur incombe encore majoritairement
- L’inégalité d’accès aux opportunités économiques et professionnelles : de nombreuses femmes rencontrent des freins pour accéder à l’emploi, au crédit ou à l’entrepreneuriat, non pas par manque de compétences, mais en raison de barrières culturelles et structurelles.
- La banalisation des stéréotypes sexiste, des violences et du harcèlement : qu’elles soient verbales, physiques ou psychologiques, ces violences sont trop souvent minimisées ou justifiées.
Déconstruire les stéréotypes sans renier notre identité
Lutter contre ces inégalités ne signifie pas remettre en cause les pratiques culturelles, traditionnelles et religieuses qui prônent l’équité. Il s’agit plutôt de distinguer ce qui relève des traditions et ce qui est le fruit de constructions sociales injustes. Trois leviers d’action pour un changement en profondeur
1) Remettre en question les stéréotypes et les rôles de genre
Les femmes ne sont pas naturellement prédisposées à certaines tâches ou à certaines professions. De même, les hommes ne sont pas systématiquement destinés à être des leaders ou des chefs de famille. Il est essentiel de déconstruire ces idées reçues et d’encourager une éducation où chacun est libre d’explorer son potentiel, sans contrainte liée au genre. Cela passe par :
- Une sensibilisation dès le plus jeune âge à l’égalité des chances et à la diversité des choix de carrière.
- La valorisation de femmes modèles dans différents secteurs pour inspirer les nouvelles générations.
- Une évolution des manuels scolaires et des médias pour refléter une image plus juste des rôles féminins et masculins.
2) Mobiliser toute la société, y compris les hommes
Le combat pour l’équité ne doit pas être perçu comme une revendication féminine isolée. Il s’agit d’un enjeu collectif qui concerne toute la société. Les hommes ont un rôle clé à jouer :
- En étant des alliés actifs dans la remise en cause des inégalités.
- En partageant équitablement les responsabilités domestiques et familiales.
- En s’engageant contre le sexisme et les violences faites aux femmes.
- Encourager un dialogue ouvert et constructif permettra d’éviter les résistances et de favoriser un changement progressif mais durable.
3) Transformer les structures sociales et économiques
Les normes patriarcales sont entretenues par des structures qui doivent être repensées pour offrir plus d’équité. Quelques actions concrètes :
- Faciliter l’accès des femmes aux financements et à l’entrepreneuriat.
- Assurer une meilleure représentation des femmes dans les sphères de décision (politique, économique, institutionnelle).
- Mettre en place des politiques favorisant l’équilibre entre vie professionnelle et vie familiale.
Vers une société plus juste et équilibrée
Les avancées législatives sont nécessaires, mais elles ne suffisent pas. Tant que les mentalités ne changent, les lois resteront lettre morte ou seront appliquées de manière incomplète.
L’indubitable combat est celui de la transformation des mentalités à la base, du regard porté sur les femmes et des opportunités qui leur sont offertes. Et Ce combat n’incombe pas qu’aux féministes. Ce combat ne doit pas prendre la tournure les féministes contre les autres femmes.
Le changement avéré commence par une prise de conscience collective et un engagement à revoir les pratiques qui freinent l’émancipation et la capacité décisionnelle des femmes.
En ce mois de mars, dédié aux droits des femmes, ne nous contentons pas de dénoncer. Engageons-nous à construire un avenir où les femmes pourront pleinement s’épanouir sans être freinées par des normes sociales injustes.
Parce que l’équité n’est pas une faveur, c’est un droit.
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