L'ARME FATALE CONTRE MACKY ?
LE «CONSEIL D'ADMINISTRATION» PRÔNÉ PAR IDY ENTRE DANS SA PHASE DE MATURATION
L'idée que l'ancien Premier ministre Idrissa Seck avait lancé à Podor de mettre en place un «Conseil d'administration du Sénégal au niveau des 552 communes» gagne du terrain. Si cette alliance que prône le président de «Rewmi» venait à se concrétiser, ce serait un coup dur pour Macky Sall qui pourrait ne pas s'en remettre.
THIES - En visite à Podor, le 26 juin dernier, où il était venu prêter main-forte à Me Aïssata Tall, dans le cadre de la campagne pour les Locales, Idrissa Seck avait lancé l'idée d'une forte alliance, en vue des prochaines joutes électorales. L'ancien Premier ministre avait même parlé d'un «Conseil d'administration du Sénégal au niveau des 552 communes» qui devrait se matérialiser au lendemain des élections locales. Cette alliance devrait s'articuler, en dehors de sa personne, autour de grands responsables politiques de la trempe d'Abdoulaye Baldé (Ziguinchor), Khalifa Sall (Dakar), Me Aïssata Tall Sall (Podor), Cheikh Bamba Dièye (Saint-Louis), en autres, et devrait prendre en charge de manière efficiente les problèmes des populations.
S'adressant à Me Aïssata Tall Sall, Idrissa Seck avait clairement déclaré : «Ces gens-là qui t’expriment leur affection, qui courent dans cette chaleur énorme de Podor, derrière ta voiture et qui te saluent, il y a une raison, et c’est quelque chose que l’argent n’achète pas, que seule la relation qu’on a avec les gens achète. Maintenant, une fois que tu as ça à Podor, que j’ai ça à Thiès, que Cheikh Bamba Dièye a ça à Saint-Louis, qu’Abdoulaye Baldé a ça à Ziguinchor, que Khalifa Sall a ça à Dakar…». Il n'avait pas fini que la porte-parole du Parti socialiste (Ps) l'avait interrompu, en lançant : «Président, ça c’est un grand dessin, dessin dans les deux sens : dessin et dessein».
DES LAURIERS A ABDOULAYE BALDE
Ce schéma très ambitieux, le président de «Rewmi» y croit fermement. De même que les responsables avec qui il veut mettre en place ce fameux «Conseil d'administration du Sénégal». En atteste ce qui s'est passé, hier, lors de son installation à la tête du Conseil départemental de Thiès. Cérémonie marquée par la présence d'Abdoulaye Baldé, de Khadim Guèye (président du Conseil départemental de Diourbel), et des représentants de Me Aïssata Tall Sall et de Khalifa Sall.
Et il faut relever que l'ancien maire de Thiès a encensé le leader de l'Union centriste du Sénégal (Ucs). «Lorsque je t’ai découvert jeune commissaire de police brillantissime, dont l’ambassadeur de France est venu louer dans mon bureau de ministre d’Etat, Directeur de cabinet du président de la République, l’intelligence exceptionnelle, je t'ai dit : 'En politique, il y a deux positions. Celle qui dérive des suffrages, c’est la plus sûre et la plus stable, les autres sont dérivées de la volonté de celui que les suffrages investissent du pouvoir. C’est le président de la République qui nomme à tous les emplois civils et militaires. Donc, je te recommande de t’investir en politique. Tu en as le talent et la capacité, et tu m’a dit que tu allais le faire, et tu l’as fait. Tu es investi maire de Ziguinchor, c’est déjà bien. Je suis très satisfait de ton implication dans la politique, et 13 ans d’expérience».
Par rapport à la mise en demeure servie à Abdoulaye Baldé pour prouver l'origine licite de ses biens, M. Seck a tenu des propos réconfortants à l'endroit du député-maire de Ziguinchor. «Les accusations ne fondent rien, elles peuvent rapidement devenir calomnie et aller à l’eau, puisque, de toutes les façons, ce que le Livre a prescrit est immuable. La vérité évolue, le faux a disparu, car le faux est destiné à disparaître. Je suis persuadé, te connaissant et t’ayant eu comme très proche collaborateur, que, non seulement, tu es le meilleur d’entre nous en compétence, mais aussi en vertu».
Des éloges qui sont allés droit au coeur d'Abdoulaye Baldé. «Je suis venu répondre à l’invitation de mon grand-frère, Idrissa Seck, qui a été un proche avec qui j’ai beaucoup partagé, lui en tant Directeur de cabinet du président de la République, et moi, Secrétaire général de la Présidence. Et c’est avec honneur que j’ai accepté son invitation, et je voudrais lui rendre cette courtoisie», a dit M. Baldé.
CLINS D'OEIL A KHALIFA SALL ET CHEIKH BAMBA DIEYE
Se projetant vers l'avenir, le patron de l'Ucs d'indiquer : «2017, ce n’est pas demain. C’est encore trop loin. Nous sommes dans le cadre d’une concertation permanente, essentielle en démocratie, que ce soit entre l’opposition ou entre l’opposition et le pouvoir. Je considère qu’il faut analyser les résultats du 29 juin. A Thiès, Idrissa Seck a réaffirmé son leadership, d’autres aussi ont affirmé leur leadership dans des territoires déterminés».
Ce qui est important, selon lui, c’est qu'ils puissent trouver «des plans de convergence» pour discuter entre eux, et puis voir, quelles perspectives, ils vont donner à tout ça. Sur sa mise en demeure, Abdoulaye Baldé a tenu à rassurer Idrissa Seck : «J’ai un mois pour démentir ce tissu de mensonges qui a été mis sur ma tête. Par conséquent, ne vous inquiétez pas. Je suis en train de produire un mémoire. Je démentirai tout ça, parce que c'est de l’affabulation».
Le président de «Rewmi» a également fait un clin d'oeil au «maître de Dakar». «Je voudrais remercier la délégation de Khalifa Sall, fils de Senghor, comme je le suis du libéralisme. Mais, nos convictions politiques opposées n’ont jamais altéré nos amitiés, et c’est cela qui a rendu possible la Coalition que nous avons faite ensemble à Dakar».
Idrissa Seck en a fait de même à l'endroit du leader du Fsd/Bj. «Je pense à mon frère Cheikh Bamba Dièye, dont je regrette la défaite, mais c’était prévisible. Je leur avais dit que la dispersion des forces de l’opposition aller favoriser un coup de force. Parce qu’à partir du moment où le candidat au pouvoir avait la possibilité d’être dans le peloton de tête de façon floue, cela ne m’étonnerait pas qu’à la faveur d’une toute petite complicité administrative - qui reste une hypothèse possible ou judiciaire - qu’on puisse faussé le résultat et qu’on puisse faussé le scrutin. En tout état de cause, nous sommes des républicains. Nous serons respectueux de ce que la procédure à l’arrivée arrêtera, mais je regrette que Cheikh Bamba ait perdu du fait de la dispersion des forces de l’opposition». «C’est ça que je souhaitais, qu’on constitue, au-delà de cette Coalition politique qui fut victorieuse, une Coalition qui serve de cadre de concertation à nous servir au sein des Conseils municipaux et départementaux», a conclu l'ancien Premier ministre.
Idy, Macky et le cheval
THIES - Le maire sortant de la ville de Thiès a été installé, hier, à la présidence du Conseil départemental de Thiès. Les 99 conseillers qui ont répondu à la convocation du préfet ont plébiscité l’ancien Premier ministre à la tête du Conseil départemental. Au décompte du vote, Idrissa Seck a obtenu 73 voix. Son suivant, Abdou Mbow de l’Apr, vice-président de l’Assemblée nationale a glané 21 voix. Amadou Tidiane Ba de l’Union centriste du Sénégal ferme le ban avec 3 voix. Yankhoba Diattara, ancien adjoint à la mairie de Thiès et délégataire de signature d’Idrissa Seck a été élu 1er vice-président du Conseil départemental et Malick Ndiaye 2e vice-président. Le poste de 1er Secrétaire élu est revenu à Pape Moussé Diop tandis que le second est réservé à l’opposition.
Après son installation, Idrissa Seck a remercié ses concurrents pour l’avoir félicité, mais aussi pour avoir accepté de remplir «cette mission essentielle en démocratie qu’est la mission d’opposant». Conviction de M. Seck : «l’opposition doit être honorée et respectée en démocratie parce que c’est le siège du dépôt des remarques souvent justes sur les manquements de l’équipe dirigeante et à cet égard, je voudrais vous dire que je souhaite une collaboration franche et sincère avec cette opposition. Ce sera facile puisque elle sera animée par mon jeune frère Abdou Mbow qui a beaucoup de sagesse».
Après ces fleurs à son opposition locale, M. Seck s’est retourné vers le Président Sall à qui il s’oppose au plan national. Saluant la maturité démocratique du peuple sénégalais et sa capacité à attendre le calendrier républicain pour adresser des messages souvent très clairs, sans ambiguïté à la classe dirigeante - Message, selon lui, «de satisfaction ou sanction ou alerte» -, Idy prévient : «Aujourd’hui à l’occasion de ces élections locales, 51% et davantage ont dit au Président Macky Sall qu’il était temps d’accélérer la cadence parce que le rythme est lent et je pense qu’il écoutera ce message-là». Et d’indiquer : «En tout cas, l’opposition sera là pour l’aider en l’aiguillonnant de temps en temps». Le nouveau président du Conseil départemental de Thiès révèle le contenu d’une de ses discussions avec Macky Sall. «Quand il était venu à Thiès, il m’a dit ‘grand, toi aussi, de temps en temps, il faut diminuer les cravaches’. Je lui ai dit : ‘c’est toi qui as choisi le cheval comme emblème et pour qu’il galope, il faut de temps en temps qu’on mette des coups». Mais souligne-t-il : «Je ne lui voue aucune hostilité, parce que naturellement, c’est un jeune frère avec qui nous avons également cheminé à des moments difficiles quand Abdoulaye Wade était accusé dans l’affaire Sèye et que les Ousmane Ngom nous ont quittés. C’est à lui que j’ai confié la gestion des cadres du parti et il s’en est acquitté avec intelligence et loyauté. Aujourd’hui il est Président, moi, je suis dans l’opposition, nous devons tous nous mettre au service du Sénégal».
Fidèle à sa mission d’opposant et à ses sorties critiques, Idrissa Seck en a remis une couche: «Ce qui me rend malade, c’est le fait de connaître le potentiel du Sénégal et de voir l’hésitation, l’impréparation, l’incompétence, la non-droiture, ça m’agace» en soulignant que «le Sénégal a la possibilité d’agir». Quand Wade avait installé le Sénégal dans le Népad, indique-t-il, «on savait que le Sénégal ne pouvait pas être dans un cercle de 4 pays ou il y avait l’Egypte, l’Algérie le Nigeria, l’Afrique du Sud, il n’y avait pas sa place. C’est le génie sénégalais qui a permis d’installer le Sénégal à ce niveau-là. Et Macky est en train de tout dilapider, ça se dilue. La personnalité sénégalaise, ça se dilue. On le sent au niveau des organisations internationales, on le sent au niveau des différents forums, c’est ça que je trouve dommage».