ENTRE PRINCIPE DE RÉALITÉ ET URGENCE D’ÉDUQUER
EXCLUSIF SENEPLUS - Même à 10 francs, le chômeur ne pourrait acheté le pain. On dissout les urgences dans la rhétorique populiste. La clé du Projet n’est pas le coût de la vie, mais le goût du travail
« Les jeunes et les citoyens de demain dont nous avons tous besoin devront être autonomes, donc capables de faire des choix et de gérer leur vie sur le plan personnel et sur le plan social, solidaires, parce que capables de se soucier d’autrui, d’agir avec les autres et pour eux, de partager leurs préoccupations, mais aussi responsables parce que capables d’assumer leurs propres actes, de tenir leurs engagements et d’achever ce qu’ils entreprennent, et surtout engagés, parce que capables de s’affirmer par rapport à des valeurs, une cause ou un idéal et d’agir en conséquence ». Quasimodo
Mon ami et brillant passeur d’intelligence, Amadou Tidiane Wone, a dans une de ses récentes chroniques, recommandé aux nouvelles autorités de notre pays de « Rester Focus » sur les demandes des citoyens sénégalais, qui leur ont valu d’être portés aux commandes du pouvoir, forts de cette confiance populaire.
Au demeurant, en un mot comme en mille, le chèque signé par le peuple aux nouvelles autorités investies de sa confiance, pour un premier mandat de 5 ans, n’est pas un chèque à blanc. Il est rempli d’exigences, dont certaines sont livrables immédiatement, et d’autres prendront le temps de réformes profondes qu’il va falloir entamer très rapidement. Autant les changements de personnels aux commandes de plusieurs leviers d’actions sont impératifs, autant le souci de la tenue, stricte, de tous les engagements pris, doit faire l’objet d’une communication gouvernementale millimétrée et d’un souci pédagogique en temps réels. Mieux, les actions liées aux changements de comportements doivent être prises en charge par les 54 % d’électeurs qui ont endossé la responsabilité de la rupture et du changement. Il s’agit, pour chacun et chacune d’entre nous, d’incarner la rupture et de lui donner corps en toutes circonstances. Pour séduire et convaincre les indécis, afin de réduire l’hostilité et la capacité de nuisance des partisans du statu quo ante. En somme, changer, c’est distribuer 17 millions de miroirs aux Sénégalais.
Cela doit être la nouvelle feuille de route du FOCUS 2024. Il faut l’endosser et la conduire.
Au lieu de cela, l’impression se diffuse que le chèque est toujours en blanc, que les tenants du pouvoir seraient encore dans leurs habits d’opposants, et amuseraient la galerie avec des polémiques et menaces inutiles et superflues à éructer lorsqu’on tient les rênes de la décision…. Un tigre ne hurle pas sa tigritude.
Les choses se mettent en place, certes, à la présidence, petit à petit incarnée par le titulaire de cette haute charge, Bassirou Diomaye Faye, qui gagne en sérénité quand son premier ministre Ousmane Sonko, continue à se battre contre, comme Don Quichotte, des moulins à vent. Pourtant le Projet semblait ficelé depuis des années, imaginé et mis en musique par des milliers de Sénégalais Patriotes à travers le monde. Ce Projet, aux allures d’Os de Mor Lam, attend d’être servi…
Au lieu de mettre les Sénégalais au travail, nous nous complaisons encore et toujours dans ce qui les rassure démagogiquement, satisfaire leurs goûts à la quasi gratuité, à savoir baisser le coût de la vie, vieux serpent de mer, qui symbolise nos incapacités chroniques à persuader nos concitoyens que la clé du Projet, n’est pas le coût de la vie, mais le goût du travail. Le pain à 10 francs ne sera pas pour autant acheté par un chômeur. Donc, l’urgence, c’est éduquer, former, outiller et insérer, devise d’un ministère central de cette révolution attendue, celui de la formation professionnelle, pierre angulaire de la construction de ce nouveau pari : Eduquer et former, urgemment.
La seule urgence qui vaille : Eduquer notre jeunesse.
Par quel mécanisme de la pensée, l’idée-même de faire une impasse sur l’avenir de nos jeunes gens, peut-elle s’imposer à des esprits responsables ?
Je pense à ceux qui gouvernent cette jeunesse ni éduquée, ni instruite, ni informée, qui est affalée toute la journée contre le mur qui soutient leur colonne vertébrale, à deviser sur Mbappé, Sadio Mané, Wally Seck ou Bathio Ndiaye, ou mieux à agonir d’injures les nouvelles autorités, seules responsables selon eux de leur inactivité et de leur désœuvrement endogène, et me dis que ces hommes qui auront donc à gérer ces zombies sont vraiment dans le brouillard. Aucune formation professionnelle, aucun rêve de vivre dans leur pays, pour la plupart déjà pères de 3 ou 4 mômes dont ils ignorent jusqu’au prénom, ces jeunes qui revendiquent deux cerveaux dans les biceps et un muscle dans le cerveau sont la poudre de la bombe qui va nous péter à la gueule dans une dizaine d’années. La mèche est allumée déjà. On le sait. Mais on ne veut pas voir. On repousse les urgences, on les dissout dans de la rhétorique populiste. Face à cette mèche qui approche du détonateur, un « Homme d’Etat » se doit de gouverner pour les générations futures, alors qu’ils ne savent endosser que le costume étriqué de l’homme politique qui n’est préoccupé que par sa réélection. Se faire rattraper par les principes de réalité, est en fait une bonne chose.
Cela leur permettra de mettre l’accent sur l’agriculture qui va conditionner notre indépendance alimentaire, ou sur l’éducation et la formation, qui vont garantir l’emploi ? A-t-on décidé que ces plans tirés sur la Comète devaient être réalisés par une jeunesse mieux formée, citoyenne, éduquée et patriote, et qu’il fallait mettre le paquet sur une jeunesse instruite et en bonne santé ? Comment va-t-on remettre les Sénégalais au travail, et surtout dans les champs ? Comment va-t-on persuader ce jeune homme ou cette jeune fille qu’ils peuvent retourner dans leurs villages, où les attendent des vrais projets de développement, ce qui leur éviterait de passer leur vie à être pourchassés par ceux qui rêvent naturellement et très justement d’avoir des trottoirs et des rues dignes d’une capitale ? Comment va-t-on faire croire au jeune homme amoureux d’une jeune fille, que pour espérer l’épouser, il ne se sentira pas condamné à prendre les « pirogues de notre plus dramatique échec » ?
Mais il y a longtemps qu’ils ne transpirent plus nos dirigeants. Quand vous voyez, Obama, Macron, qui six mois après leur élection, être couverts de cheveux blancs, du fait de leurs responsabilités les engageant à chaque signature, on est tenté de les comparer aux nôtres, qui tout au contraire, grossissent, claircissent et dégagent de la tranquillité, celle de l’irresponsabilité assumée… Depuis Abdou Diouf, qui avait eu à gérer les ajustements structurels, et dont la chevelure avait subitement blanchi, Wade étant hors concours du fait de calvitie permanente, aucun des hommes en responsabilité dans notre pays ne porte les stigmates du stress de la gouvernance…
Soyons encore plus proches et convaincus de nos talents et travaillons juste à remettre les choses à l’endroit pour que ce pays soit un des plus beaux du monde. Parce qu’il y fait bon vivre. Mais il faut de la Culture pour le savoir.