L'HORREUR DANS LA FORÊT DE BAYOTTE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le Sénégal peut-il avoir la paix sans solutions à la crise en Guinée-Bissau - Et l’intégration avec la Gambie ? Nos concitoyens de la Casamance ont le devoir de se remettre en cause
Notre premier week-end de janvier 2018 se trouve complètement démoli par cette exécution de jeunes gens dans la forêt de Bayotte en Casamance.
Au fond, le Sénégal n’échappe pas à cette violence multiforme qui sévit en Afrique de l’Ouest depuis plusieurs décennies. Les revendications indépendantistes du MFDC ont transformé la région naturelle de Casamance, parfois en zone de non-droit, en jungle. De revendication politique, on est vite passé à une criminalité transfrontalière.
La région de Kolda vient de payer un très lourd tribut, au moins une dizaine de ses fils ont été froidement assassinés. Il faudra une analyse très fine pour décoder ce qui se cache derrière ces faits. On peut simplement avancer sans se tromper qu’il existe un lien entre cette région et l’émigration clandestine et on ne manque pas de s’interroger sur le financement des départs vers les routes qui mènent à la Méditerranée.
Le MFDC, à travers son communiqué, en se disculpant ouvre des perspectives intéressantes sur la gestion de cette économie souterraine. Seulement la conscience des irrédentistes ne peut pas échapper à son propre tribunal face à ses responsabilités devant la mort gratuite. On oublie souvent dans le rappel des points importants du désastre et des massacres, de citer le naufrage du bateau le Joola. En effet, Il n’y a pas que Babonda, Madina Mancagne et les autres massacres, le MFDC, dans ce drame du Joola a la responsabilité de ce que les historiens appellent la cause lointaine.
La rébellion casamançaise qu’on pouvait voir dans un premier temps comme un rejet de la discontinuité territoriale, une nécessité d’intégration à la citoyenneté et au raffermissement de l’unité nationale, finit par devenir une véritable hydre avec ses tentacules, une gangrène qui ne finit pas de dévorer la chair du Sénégal, surtout lorsque s’y ajoute la manipulation de certains politiques.
Il y a quelques années, nous étions membre du conseil d’administration d’un programme de SWISSPEACE sur la paix, ce qui nous faisait organiser des réunions, assez souvent en Guinée Bissau. Il nous revient une conversation tenue avec un groupe de jeunes soldats bissau-guinéens: ces militaires pouvaient rester des mois sans solde et avaient à leur disposition des armes qu’ils pouvaient utiliser ou louer.
Le Sénégal peut-il avoir la paix si des solutions ne sont pas trouvées à la crise en Guinée-Bissau ou si l’intégration avec la Gambie ne connait pas une accélération? Il est évident qu’il existe des progrès notoires avec le départ de Yaya Jammeh, le système d’alerte précoce de la CEDEAO mais surtout la volonté du Sénégal et du Président Sall de doter l’armée de moyens matériels et humains. Mais les défis restent immenses, malgré l’appui de partenaires au développement.
Depuis plus d’une trentaine d’années, on doit se rendre à l’évidence, la seule voie de connaître une autonomie à l’échelle individuelle est de s’inscrire résolument dans la paix et le développement. On ne peut plus avancer l’idée d’une Casamance, grenier du Sénégal ou fustiger l’accaparement des terres par les Nordistes ; l’instabilité de cette région a mis en évidence les potentialités des autres zones comme le Sénégal oriental avec ses ressources minières, la région Nord du Fleuve qui devient l’avenir de la riziculture, le pétrole et le gaz dans la zone côtière, l’axe Diamniadio Touba et ses infrastructures ou encore le tourisme partout dans le pays avec Saint-Louis et son parc de Djoudj, Saly et ses hôtels, Mbour et Bandja, le Lac Rose, les Iles du Saloum, etc.
Nos concitoyens de la Casamance ont le devoir de se remettre en cause s’ils veulent que cette région constitue le coeur de l’intégration sous régionale.