LÉGISLATIVES, VERS UNE RECONFIGURATION DES ALLIANCES
Les partis politiques s'engagent dans des négociations pour former de nouvelles coalitions, avec des mouvements au sein de l'opposition et de la majorité. Ces manœuvres visent à redéfinir les alliances et à s'adapter aux enjeux politiques à venir.
Dans un contexte politique sénégalais en pleine effervescence, la gestation des nouvelles coalitions en vue des élections législatives de 2024 ou 2025 prend une importance capitale. La dissolution potentielle de l'Assemblée nationale, un événement qui pourrait redéfinir le paysage politique du pays, a incité plusieurs partis et mouvements politiques à se regrouper pour former des alliances stratégiques.
La scène politique sénégalaise est en pleine ébullition, à l'horizon des élections législatives de 2024 ou 2025. Cette perspective a déclenché un véritable souhait de recomposition du paysage politique où coalitions et alliances se forment, se renforcent ou éclatent dans une course effrénée pour le contrôle du pouvoir Législatif.
La formation du Bloc des libéraux et des démocrates/Takku est un exemple patent de cette dynamique. Cette nouvelle coalition qui a vu le jour la semaine dernière, rassemble plus de quarante partis et mouvements de la mouvance libérale et démocratique. Les principaux objectifs de cette alliance sont d’amplifier l’héritage des décennies de lutte des libéraux, tout en soutenant les valeurs démocratiques et en favorisant la coopération entre les différents acteurs politiques. Le nom de la coalition, ‘’Takku’’, qui signifie ‘’s'unir’’ en wolof, reflète l’intention des membres de transcender leurs divisions pour mieux affronter les défis politiques à venir. Modou Diagne Fada, ancien ministre et député, évoque la création de blocs idéologiques d’abord, suivie de blocs électoraux en vue des législatives. Pour lui, l’unité est importante pour obtenir une majorité à l’Assemblée nationale et potentiellement entraîner une cohabitation avec le régime en place.
Cependant, la nouvelle coalition ne regroupe pas tous les acteurs politiques libéraux. Le Parti démocratique sénégalais (PDS) de l’ancien président Abdoulaye Wade et le parti d’Amadou Ba, candidat de l’ex-coalition présidentielle lors de la dernière élection, sont absents de cette alliance. Ces absences sont significatives, car elles reflètent les tensions et les divisions au sein de l'opposition. Le PDS, qui pourrait rester un acteur majeur sur l'échiquier politique, a des liens compliqués avec d’autres partis libéraux et démocratiques.
Pape Maël Thiam alerte…
Dans cette conjoncture, l’Alliance pour la République (APR) se trouve également à un carrefour crucial. Maël Thiam, administrateur de l’APR, souligne les défis internes du parti. L’ancien parti présidentiel, qui a longtemps été la locomotive de l’ex-coalition présidentielle Benno Bokk Yaakaar (BBY), fait face à des dissensions internes et à un éloignement de certains membres clés. Le parti doit chercher à être actif à travers des périodes de turbulences marquées par des départs et des initiatives politiques qui ne sont pas toujours bien accueillies par la base. Monsieur Thiam appelle à une meilleure cohésion et à un renouveau dans la gouvernance interne, pour éviter des divisions potentielles qui pourraient affaiblir la position de l’APR aux prochaines élections.
Par ailleurs, Amadou Ba, le candidat de BBY lors du dernier scrutin présidentiel, qui a obtenu 35,79 % des voix, a désormais pris ses distances avec Macky Sall. La création d'un nouveau parti par Amadou Ba semble confirmer son opposition à son ancien mentor. Bien qu'il soit encore prématuré d’évaluer l’impact de cette scission, le départ de l'ancien Premier ministre pourrait entraîner des divisions internes et affaiblir la cohésion du groupe.
L’APR a longtemps été centrée autour de la personnalité et du leadership de Macky Sall, et cette dépendance constitue une problématique majeure pour l’avenir de la coalition. L'absence d'un successeur clair pour Macky Sall représente un défi significatif. La forte concentration du pouvoir autour de sa personne pourrait mener à des luttes internes pour le leadership et à une possible érosion de l'unité au sein de BBY. Le premier véritable test pour l’ex-coalition présidentielle sera sans doute les prochaines élections législatives.
Réactions du PDS : vers une alliance potentielle avec Pastef ?
Dans ce contexte politique, Djibril Sakho, responsable du Parti démocratique sénégalais (PDS) à Saint-Louis, clarifie que le PDS n’a pas encore pris de position formelle d’opposition au nouveau régime. Alors que les élections législatives se profilent à l’horizon, Sakho révèle que les coalitions Wallu et Pastef ne rejettent pas la possibilité de former une alliance politique. Il met en relief que cette collaboration potentielle entre le PDS et Pastef est en ligne avec les recommandations de Maître Abdoulaye Wade, qui a suggéré un soutien à la coalition DiomayePrésident. Sakho précise que compte tenu des besoins du pouvoir en place pour obtenir une majorité confortable à l’Assemblée nationale, des alliances telles que celle entre le PDS et Pastef pourraient s’avérer cruciales.
Sakho, rapporté par Seneweb, fait également référence à des récents événements au sein de l’hémicycle pour illustrer les tensions politiques actuelles. Il note que le blocage du débat d’orientation budgétaire est symptomatique du fait que la majorité de Benno Bokk Yaakaar semble peu encline à faciliter le travail aux nouvelles autorités.
En parallèle, il observe que le président Bassirou Diomaye Faye et Karim Wade sont en communication fréquente, suggérant que le président de la République rende également des comptes à Ousmane Sonko, président de Pastef.
Cette dynamique met en exergue l’évolution complexe des alliances politiques et des interactions entre les différentes factions du paysage politique sénégalais. Loin d'être un simple réajustement stratégique, ces mouvements témoignent également des possibles tensions sous-jacentes et des ambitions qui agitent les différents acteurs politiques du pays, chacun cherchant à consolider sa position dans un contexte de fragilité institutionnelle.
Vers une coalition ‘’Jub-Jubbal-Jubanti’’
Dans ce contexte de recomposition, Ousmane Sonko et son équipe auraient commandité des sondages pour évaluer la meilleure stratégie à adopter en vue des prochaines législatives. Un rapport détaillé a été remis à Sonko, destiné à éclairer les orientations futures du Pastef. L'objectif est de déterminer s'il est plus judicieux de se présenter en solo, c'est-à-dire sous la seule bannière du Pastef ou de former une large coalition avec d'autres forces politiques.
Cependant, selon des sources anonymes, la majorité des militants à la base penchent en faveur d'une candidature indépendante, privilégiant une démarche autonome plutôt que l'ouverture à d'autres alliances.
Pour certains observateurs, la coalition DiomayePrésident doit se repositionner en vue des prochaines législatives. Dans cette perspective, Bassirou Diomaye Faye et son équipe envisagent de créer une nouvelle alliance qui pourrait élargir la coalition présidentielle. Cette révision stratégique est nécessaire pour s’assurer une majorité confortable dans l’hémicycle. Le changement de nom et l’élargissement de la coalition sont en cours de discussion, avec des options comme ‘’Jub-Jubbal-Jubanti’’ qui pourraient être envisagées pour mieux refléter l’objectif de la coalition. Les discussions incluent également des négociations avec des partis comme le Tekki de Mamadou Lamine Diallo et potentiellement le Parti pour l’unité et le rassemblement (Pur).
Khalifa et les socialistes en jeu…
D’un autre côté, l’opposition se restructure également. Khalifa Ababacar Sall, malgré un faible score lors de la dernière présidentielle, cherche à renforcer une opposition forte. Il envisage une large coalition pour raviver le Parti socialiste (PS) et pourrait chercher à s’allier avec des figures de l’opposition comme Amadou Ba et Bougane Guèye Dani.
Les efforts de reconstruction du PS et les tentatives de rassemblement des forces d’opposition montrent une volonté de renforcer une alternative crédible au régime actuel.
La dynamique politique actuelle montre également des signes de fragmentation. Des partis de gauche comme la LD/MPT et le PIT ont déjà marqué leur rupture avec BBY. Ces scissions, combinées aux défis internes de l’APR et aux nouvelles alliances en gestation, illustrent la complexité du paysage politique sénégalais en préparation des prochaines élections législatives.
Les élections législatives de 2024 ou 2025 révèlent un paysage politique sénégalais en pleine recomposition. Les nouvelles coalitions, les révisions stratégiques et les tentatives de regroupement au sein de l’opposition montrent une volonté de s’adapter aux défis politiques actuels. Les prochaines semaines et mois seront décisifs pour observer comment ces alliances se concrétiseront et comment elles influenceront le futur politique du Sénégal.