PLUS DE 20 MILLE SENEGALAIS ONT FRANCHI LA FRONTIERE DU MEXIQUE
Les chimères de l’eldorado sont parsemées de difficultés insoupçonnées. Les candidats au périple par la voie de l’Amérique du Sud, Brésil, Nicaragua ... en direction des Etats-Unis vivent le martyre.
Les chimères de l’eldorado sont parsemées de difficultés insoupçonnées. Les candidats au périple par la voie de l’Amérique du Sud, Brésil, Nicaragua ... en direction des Etats-Unis vivent le martyre. Dr Seydi Sarr sensibilise les jeunes sur les difficultés et quelquefois la déception des migrants.
«Si tu ne sais pas où tu vas, retourne d’où tu viens» exhorte une sagesse populaire. Seulement, la tentation de l’aventure à la recherche d’un avenir meilleur pousse les jeunes, adolescents et adultes à braver les difficultés, l’incertitude et les pièges avant de franchir la frontière des États-Unis. Dr Seydi Sarr, fondatrice de l’Ong Bureau Africain pour l’Immigration et les Affaires Sociales (ABISA), dévoile les illusions de la réussite facile en Occident. «Ces derniers mois, on a rencontré pas moins de 20 mille sénégalais qui ont traversé le Mexique », déclare-t-elle.
L’organisation a commencé sous forme d'association d’entraide pour donner plus de chance aux immigrés. «Au moment où je vous parle, nos correspondants au Mexique nous informent que plus ou moins mille sénégalais sont bloqués entre le centre du pays et le sud. On aura des problèmes d’auberge puisque le Mexique est en train de confiner les africains», indique l’activiste. Au bureau d’ABISA sis à Détroit, «de septembre à décembre, tous les jours, on reçoit en moyenne 35 Sénégalais qui viennent chercher des renseignements. On a convié à une réunion publique et 500 sénégalais se sont présentés à Keur Serigne Touba. On était choqué parce qu’on ne s’attendait pas à voir autant de personnes. En novembre, à New York, on a fait un appel aux jeunes de moins de 24 ans et on a fait un tri de 175 personnes. En mai, on y était pour rencontrer un avocat, il a reçu 186 personnes en deux jours», détaille Dr Seydi Sarr, en marge de la diffusion d’un film de sensibilisation sur la question de la migration irrégulière. A l’en croire, le phénomène du mouvement du Nicaragua a démarré depuis des années.
«C’EST EN 2015 QUE J’AI REÇU LE PREMIER APPEL M’INFORMANT QUE 25 SENEGALAIS ETAIENT A TIJUANA»
La dernière vague date d’entre 2013 et 2016, venant du Brésil et de l'Argentine. «C’est en 2015 que j’ai reçu le premier appel m’informant que 25 Sénégalais étaient à Tijuana, la frontière avec l’Arizona. Ils ont marché pendant 03 mois, traversé 11 pays à pied. Au mois de mai 2016, 500 Sénégalais ont traversé la frontière de Panama en provenance de Brésil», se rappelle Dr Sarr.
Pour l’assistante, « c’est un parcours du combattant à mener. Mais si on ne dit pas aux gens voilà les écueils du parcours, à quoi ce parcours ressemble, ils ne peuvent pas se préparer. Une personne qui traverse les frontières des États-Unis en infraction ne peut pas travailler légalement une année, durée d'introduction d'une demande d’asile. Arriver à destination ne signifie pas réussite car 90% de chaque dollar gagné ne sort pas du pays, il est recyclé dans le système», détaille la résidente aux Usa. Le Dr Seydi explique les différentes étapes franchies par l’Ong pour soutenir les jeunes. «On a commencé par monter des dossiers, faire de l’interprétation dans les tribunaux. Et puis, ABISA s’est structuré pour pouvoir trouver des solutions aux ressortissants Ouest africains et noirs par extension. L’organisation s’est ainsi lancée dans un plaidoyer actif pour l’équité sociale en posant la question de savoir : «pourquoi les documents de l’immigration sont traduits en espagnol pour les latinos mais pas en français pour les migrants venus d’Afrique de l’Ouest ? Comment se fait-il que les documents sont traduits dans toutes les langues et pas en français ?» interpelle Dr Sarr. D’autant qu'à Détroit, il y a plus de «15 mille immigrés ouest africains et c’est rare de voir un document traduit en français. Les documents sont en arabe, et même en Bengalie. L’État du Michigan ne traduit pas de document en français. Ce sont des questions qui font qu’on prenne conscience et qu’on se dise qu’il faut qu’on s’organise». ABISA fait un suivi socio-économique, moral et psychologique des migrants de retour.