«IL FAUDRA DES ETUDES D’IMPACTS SERIEUSES POUR NE PAS FAVORISER LA REMONTEE DE LA LANGUE SALEE DANS NOS RIZIERES»
MOUSSA BALDE, DIRECTEUR GENERAL DE LA SODAGRI

Au-delà de la fluidité de la navigation, le dragage du fleuve Casamance est nécessaire pour aussi limiter les impacts de la remontée de la langue salée dans les rizières. C’est là le point de vue du Directeur général de la Société de développement agricole et industriel (Sodagri), Moussa Baldé. Dans l’entretien qu’il nous accordé, il recommande par conséquent une étude sérieuse d’impact environnemental. M. Baldé dévoile aussi les grands projets de la société qu’il dirige depuis 2 ans.
Depuis 2013, vous êtes à la tête de la Sodagri. Qu’est-ce que vous avez fait durant ces deux années ?
Quand j'ai pris service et fait ma première tournée dans le bassin de l'Anambé, j'ai pris deux engagements. D’abord réunir, dans les meilleurs délais, les conditions techniques et organisationnelles pour une exploitation optimale des périmètres aménagés. Ensuite, faire de la Sodagri une société de développement rural pour tout le Sud et le Sud-Est du Sénégal. Pour cela, il fallait réhabiliter l'existant, réorganiser les producteurs locaux, ramener la Cncas (Caisse nationale de crédit agricole du Sénégal) pour financer la production et envisager d'autres aménagements pour améliorer la base productive des centaines de vallées et bas-fonds dont disposent ces zones. Grâce à Dieu, nous avons aujourd'hui fait des avancées significatives sur chacun de ces aspects. En effet, trois cinquièmes du bassin sont en cours de réhabilitation et seront disponibles pour cet hivernage. Pour le reste, les marchés sont lancés et nous pouvons dire aujourd'hui que, d'ici à fin 2016, tous les périmètres seront réhabilités, les pistes de productions refaites, les stations de pompage électrifiées et les barrages fonctionnels. La Cncas quant à elle a financé la campagne hivernale précédente à hauteur de 200 millions de francs Cfa pour marquer son retour dans le bassin qu’il avait déserté depuis 2005. Aux dernières nouvelles, la banque est très satisfaite de sa collaboration avec la Fédération des producteurs du bassin de l’Anambé (Feproba) et compte poursuivre et augmenter le financement. Mieux, la Cncas envisage d’ouvrir une agence sur les rives de l’Anambé, à Kounkané. Je dois à la vérité de dire que le renouvellement du bureau de la Fepropa a contribué pour beaucoup à l’amélioration des relations entre la Cncas et nos producteurs. En ce qui concerne l’aménagement des vallées et bas-fonds, nous avons entamé l’aménagement de 500 ha dans la région de Kolda et nous comptons nous rapprocher de tous les projets et programmes du Maer (Ndlr : ministère de l'Agriculture et de l'équipement rural) qui interviennent en Casamance et au Sénégal Oriental pour harmoniser nos efforts, mutualiser et optimiser les ressources disponibles. Enfin, toute cette dynamique sera plus perceptible lorsque le chantier du siège de la Sodagri sera achevé, je l’espère avant fin 2016.
En dehors du programme du gouvernement pour l’autosuffisance en riz en 2017, quelle est la mission de la Sodagri ?
La vocation de la Sodagri, c’est la promotion du développement rural intégré dans sa zone d’intervention. Elle a comme missions principales l’aménagement de l’espace rural, l’appui au développement local, la préservation de l’environnement, l’appui conseil et la formation, la promotion de l’entreprenariat rural. Autrement dit, nous devons cultiver l’autosuffisance, la pérenniser et impulser l’émergence dans notre zone d’intervention.
Y a-t-il un système efficace pour accompagner la commercialisation de la production agricole ?
Le meilleur atout pour une bonne commercialisation, c’est une bonne transformation du paddy. Conformément aux directives du chef de l’Etat, lors de son passage à Anambé, la Sodagri va tout faire pour installer des unités performantes de transformation en Casamance. Pour le reste, le Président Macky Sall est en train de prendre des mesures sans précédent pour faire du consommer local une réalité.
Le ministre de la Pêche et des affaires maritimes, Oumar Guèye, a annoncé le démarrage, sous peu, du dragage du fleuve Casamance. Kolda est-t-il prévu si l’on sait que son lit est devenu un dépotoir d’ordures ?
Je n’imagine pas un dragage du fleuve qui exclurait la haute Casamance. Nous comptons sur ce projet que le défunt Conseil régional de Kolda a toujours porté et défendu pour profiter du fait que la capitale du Fouladou soit traversée par un fleuve. Cela dit, il faudra des études d’impacts sérieuses pour ne pas par exemple favoriser la remontée de la langue salée dans nos rizières.
Vous êtes également le président du Conseil départemental de Kolda. Est-ce qu’il y a des projets communs avec la mairie dirigée par le ministre de l’Environnement et du développement durable, Abdoulaye Baldé, pour sortir le département de la pauvreté ?
Comme vous le savez sans doute, nous avons élaboré notre programme de campagne ensemble et nous avons battu campagne ensemble. Donc, cela va s’en dire que nous avons des projets communs, comme nous avons des projets communs avec les 14 collectivités rurales du département de Kolda. Je rappelle aussi que le ministre et maire de Kolda, Abdoulaye Baldé est conseiller départemental.
Vous êtes aussi le coordonnateur national du Réseau des universitaires de l’Apr. L’enseignement supérieur est traversé par une grave crise, depuis le début de l’année. Que proposez-vous pour sortir de cette situation ?
Disons que suite au vote de la loi cadre organisant le fonctionnement de nos universités publiques, des perturbations ont commencé au sein de l’espace universitaire. Le Réseau des universitaires républicains (Rur) a toujours offert ses bons offices pour un pacte de stabilité entre toutes les composantes du monde universitaire et le gouvernement. Le président de la République, à la suite des concertations nationales qu’il avait commandées, a montré toute sa volonté de moderniser notre enseignement supérieur pour que notre pays puisse jouer pleinement son rôle de leader en matière de formation universitaire dans notre sous-région voire dans toute l’Afrique francophone. Ce n’est pas un hasard si la formation est un des piliers du Plan Sénégal émergent (Pse). Je pense que nous devons reconnaître également au Syndicat autonome de l’Enseignement supérieur (Saes) d’avoir, depuis sa création, œuvré pour une amélioration de l’environnement et des conditions de travail dans nos universités. Donc, il ne peut pas y avoir de problème insurmontable entre le Saes et le gouvernement du Sénégal. Au Rur, nous avons toujours prôné un dialogue permanent entre l’Etat et le Saes. C’est pour cela que nous saluons la mise en place d’une commission technique entre le gouvernement et le Saes.
Quel bilan tirez-vous de la tournée économique du chef de l’Etat dans la partie sud du pays ?
Je pense que nous, en Casamance, on a définitivement compris que Macky Sall n’a pas juste déclaré la Casamance comme zone prioritaire, mais qu’il est en train de poser des actes qui vont radicalement changer notre région sous peu. En effet, en plus des deux bateaux, le pont de Kolda et la réhabilitation de la RN6, il a pris trois décisions fortes. Le dragage du fleuve Casamance, la diminution, voire l’annulation des taxes sur les billets d’avion sur la destination Casamance, l’extension de la Sodagri dans toutes les cinq régions du Sud et du Sud-Est du pays et même celle de Fatick et de Kaffrine. C’est l’occasion de féliciter le président de la République pour les efforts qu’il ne cesse de fournir depuis qu’il a créé l’Apr pour rester au contact des populations de nos villes et villages pour un échange permanent entre lui et le Sénégal. J’espère que bientôt, il nous rendra encore visite pour qu’on renouvelle une fois de plus les moments de communion que nous avons vécus pendant une semaine dans notre belle Casamance.