«BENNO BOKK YAAKAAR PORTE EN ELLE-MEME LES GERMES DE SA PROPRE DESTRUCTION»
SORY KABA, MEMBRE DU POOL DE PORTE-PAROLE DE L’APR ET PATRON DU FAISE

Spécialisé sur les questions de migration, Sory Kaba est à la tête du Fonds d’appui à l’investissement des Sénégalais de l’extérieur (Faise) depuis quelques mois. Dans cet entretien, il décline sa mission, non sans jeter une grosse pierre en direction de la coalition Macky2012 et dans la coalition Benno Bokk Yaakaar qui selon lui secrète les germes de sa propre destruction.
l’as : vous êtes à la tête du fonds d’appui à l’investissement des sénégalais de l’extérieur (faise). qui êtes-vous et en quoi consiste votre travail ?
Sory Kaba : Je suis spécialisé sur les questions de migration internationale. J’ai fait mon Master2 en migration internationale, spécialisation en conception de projets de développement et là je poursuis également une thèse de doctorat sur la problématique migratoire, précisément le dialogue des territoires et le rôle que le Sénégalais peut jouer dans ce dialogue des territoires. Nous ne sommes plus dans cette logique traditionnelle de coopération entre Etats. Le fonds d’appui à l’investissement des Sénégalais de l’extérieur (Faise), qui est un démembrement du ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, entend jouer sa partition à fond pour que la contribution attendue des Sénégalais de l’extérieur à l’effort de développement national soit plus visible et que son impact soit plus réel. Aujourd’hui, les chiffres en disent long. Quand on nous dit que les remises de fonds des Sénégalais de l’extérieur qui parviennent tournent entre 650 milliards et 1200 milliards par les circuits officiels et les circuits officieux, je pense que c’est très important. Cela signifie que c’est un apport consistant que les Sénégalais apportent à la balance, à l’équilibre social du Sénégal.
est-ce que vous avez les moyens de votre politique ?
Les moyens des ambitions sur le plan humain, oui ! C’était un maillon faible de cette structure. Sommes-nous à un niveau de responsabilité où nous avons l’homme qu’il faut à la place qu’il faut ? Je pense qu’à ce niveau-là, le casting opéré par le président de la République est bon. Là, je ne suis pas venu pour apprendre. Je suis venu pour dérouler, pour mettre en oeuvre. Ce sont des problématiques que j’ai déjà
abordées sur le plan théorique. La mise en oeuvre pratique, je l’ai déjà testée sur le plan de la coopération décentralisée entre deux régions du Sénégal et une région française. Là il s’agit maintenant, à un niveau beaucoup plus élevé, de mettre en oeuvre ma petite expérience et ma capacité théorique à pouvoir permettre aux Sénégalais de l’extérieur de pouvoir participer à l’effort de développement national.
Tout de même, les moyens financiers font défaut. Mais nous sommes dans une logique qui nous permet de pouvoir trouver les moyens financiers pour pouvoir répondre à la demande, à la sollicitation des Sénégalais de l’extérieur qui ont besoin d’accompagnement, qui ont une volonté d’investir.
quel est votre bilan après quelques mois à la tête du faise?
Un bilan serait prématuré en ce qui me concerne. Je suis à la tête de cette structure depuis trois mois environ. Des difficultés se sont pointées systématiquement à moi quand j’ai été nommé à la tête de ce poste de responsabilité. Il s’agissait d’abord de redorer l’image de la structure. Les Sénégalais de l’extérieur avaient tendance à dire que seuls les militants du parti au pouvoir pouvaient accéder aux financements.
Là, j’ai marqué un coup d’arrêt pour dire clairement que nous sommes équidistants des Sénégalais de l’extérieur. Tout Sénégalais de l’extérieur qui porte un projet digne d’intérêt, un business plan bien structuré qui répond aux attentes, aux canevas que nous avons définis au préalable, il n’y a pas de raison que l’on ne le finance pas.
Parce qu’à terme, il faudrait que nous puissions dire quel indicateur visiblement vérifiable nous avons pu réaliser. C’est cela à terme notre bilan personnel. Nous jouons à fond cette carte, de redorer l’image de marque du Fonds. Nous avons un problème lié au recouvrement. Parce que le fonds existe depuis trois ou quatre ans et le taux de recouvrement tourne autour de 9 %, pour plus de 600 millions qui
ont été prêtés aux Sénégalais de l’extérieur. Un passif aussi lourd, vous le portez, vous aurez du mal à avancer. L’autre aspect qui semble important, c’est carrément renflouer le FAISE. En faire un Fonds à milliards.
en tant que membre du pool de porte-paroles de l’apr, que pensez-vous de la démarche du ps depuis un certain temps?
Je pense en effet qu’il y a problème à ce niveau-là. Avec la durée du mandat du Président qui va être de 5 ans, il faut qu’il fasse l’impossible pour réduire la durée de réalisation des projets pour lesquels les Sénégalais l’ont élu. Si les procédures de passation des marchés ne sont pas réduites, cela va de soi qu’à terme, les Sénégalais regretteront d’avoir élu le Président Macky Sall. L’orientation qu’il a
donnée est allée dans ce sens-là. Mais malheureusement, il y a eu un commentaire excessif qu’en a fait le Parti socialiste en voulant jouer un rôle d’avant-garde. Je pense que la loyauté aurait bien voulu qu’ils interpellent directement le président de la République. D’autant qu’ils ont la possibilité d’aller le voir et de discuter avec lui entre quatre murs, au lieu d’en faire un débat d’opinion. Un tel compagnonnage
me laisse perplexe quant à l’avenir. (…) Nous sommes dans un pays où l’exclusivisme à la tête de l’Etat n’est plus une règle de bonne gouvernance. Il faut s’ouvrir aux autres. Il faut permettre à l’ensemble des fils et filles de la République de participer au développement du pays. D’ailleurs, c’est une exigence citoyenne car nous vivons l’époque de la démocratie délibérative. Le citoyen a envie et exige sa participation à l’effort de développement. Donc, le Président reste ouvert à l’ensemble des membres de la coalition Bby. Il n’y a pas de raisons que le Ps rue dans les brancards, et cherche à vouloir accuser le président de la République de faire dans l’opacité ou de jouer dans des règles de bonne gouvernance plus ou moins obscures. Ce n’est pas gratuit si le Président Macky Sall a été élu à la tête de ce pays en 2012. Je ne pense pas aujourd’hui que le Président ait droit à un tel mauvais procès.
pour vous donc, on ne doit pas donner son opinion en dehors du cadre de la coalition….
Certainement ! Et convenez avec moi que dire ce qu’on pense n’est pas une chose interdite dans le cas d’espèce. Le Président Macky ne dira jamais aux partis membres de la coalition de ne pas dire ce qu’ils pensent. Ils sont pleinement associés à la gestion de l’Etat. Leur responsabilité est pleinement engagée. Ce dont il s’agit, à mon niveau, c’est de ne pas en faire un débat public. Ils peuvent aller voir le président de la République pour discuter directement, lui faire des suggestions et donner des avis par rapport à la manière dont le pays marche. S’ils prennent à témoin l’opinion, c’est comme s’ils préparaient leur sortie par rapport aux joutes électorales à venir. Et ça, ce n’est pas de la bonne foi.
vos camarades de macky 2012 demandent aux alliés de ne pas présenter un candidat en 2017. dans ce contexte, pensez- vous sérieusement que c’est le genre de discours qu’il faille tenir ?
Évidemment pas. Il nous faut un discours d’apaisement. Le Président aujourd’hui a besoin d’une forte coalition autour de lui et autour des problèmes du Sénégal. Les propos tenus par les membres de la coalition Macky 2012 sont inappropriés. On ne peut pas déclarer la mort politique de quelqu’un. Je le dis haut et fort, tout revient aux citoyens. On est dépositaire de la légitimité populaire. C’est le citoyen qui, à terme, choisira celui qui présidera aux destinées du Sénégal. N’allons pas plus vite que le temps. Nous ne sommes pas encore à la veille d’une élection présidentielle, nous sommes à la veille d’élections locales.
certains pensent que macky 2012 doit disparaître…
Je ne suis pas de cet avis. Pour moi, il n’y a pas d’opposition au Sénégal. C’est la coalition au pouvoir, à savoir Bby, qui porte en elle-même les germes de sa propre destruction. C’est ellemême qui est l’opposition. C’est elle-même qui fait l’opposition dans ce pays et la sortie de nos camarades le prouve. On n’a pas besoin, en l’état actuel des choses, de se crêper le chignon et de se tirer dessus. Nous nous devons davantage de soutenir le Gouvernement, de faire face à l’opinion et de lui dire exactement ce qui se fait à l’intérieur et qui n’est pas visible. Tout le monde n’a pas la possibilité de savoir ce qui se passe dans le Gouvernement. (…) Je pense que nos camarades sont en train de se tromper de combat. Et c’est mal connaître le Président Macky Sall que de jouer sur ce registre-là. La coalition Bby doit être renforcée. Je souhaite vivement qu’en 2017 la coalition décide de celui qui sera le candidat de la coalition BBY et en 2022, idem. Que la coalition tende carrément vers un parti politique, vers un grand parti politique où l’on verra un ensemble de courants, où les idéologies vont s’exprimer toujours dans le respect de l’autre.