EN COULISSES : ENQUETE DE CE LUNDI

APRÈS TOUBA ET TIVAOUANE, PARIS SE BRAQUE : Le lobbying perdant de Me Wade
Nous écrivions dans ces colonnes que la France n’allait pas répondre à la missive que Me Wade avait envoyée au Président français François Hollande pour dénoncer de multiples violations des droits humains, particulièrement ceux de son fils Karim Wade, dans la cadre de la procédure spéciale enclenchée contre lui. C’est maintenant limpide que la France a choisi de s’éloigner d’Abdoulaye Wade dans son combat paternaliste pour obtenir la libération de son fils Karim. Une position affirmée sans détour hier par l’ambassadeur de la France au Sénégal, Jean Félix Pagano, dans l’émission “Grand Jury de la RFM” : les Wade n’ont plus l’agrément des têtes pensantes de la politique africaine de l'Elysée, et cela depuis 2011, au summum de la confrontation sur le projet de dévolution du pouvoir à Karim. Malheureusement pour lui, Abdoulaye Wade n’a jamais su tirer les enseignements de cet épisode et se croit jusqu’ici capable de retourner les situations complexes en sa faveur. Visiblement, la France a très mal pris le fait que Wade veuille mettre la pression sur le président François Hollande via une lettre ouverte. C’est pourquoi Paganon a choisi délibérément de s’affranchir de l’orthodoxie diplomatique en assénant de façon bien crue ce qu’il pense de Karim Wade. Et en poussant la galanterie jusqu’à pronostiquer une peine ferme sans risque de chaos pour le Sénégal, le message est très clairement adressé à Me Wade. Le message est aussi clair que personne ne peut accepter qu’on installe le Sénégal dans un tourbillon en pleine guerre contre le terrorisme au moment où Bamako a encore du mal à tenir en équilibre. Il faut savoir que la France n’est pas seule dans cette position. Les Etats-Unis aussi, sans le dire, suivent la situation avec beaucoup d’attention. Déjà, il y a quelques jours, lorsque Me Wade s’est fendu d’une sortie bien volcanique, les Américains sont restés très attentifs aux mouvements de l’opinion. La saisine de la France et des Etats-Unis fait suite au lobbying intense enclenché par Gorgui au niveau africain, aussi bien en Afrique de l’ouest (le président Ouattara) qu’en Afrique centrale et australe. Mais cela n’a pas empêché la machine judiciaire de s’enclencher.
ME SALL DANS TOUS SES ÉTATS
“Jean Félix PAGANON, ambassadeur de France au Sénégal, a tenu des propos qui, incontestablement, vont contribuer à créer durablement un sentiment antifrançais tant ils sont irresponsables et irrespectueux”. C’est le commentaire fait par Me El hadj Amadou Sall, avocat de Karim Wade et membre du Pds. “Son rang et la nature même des relations entre nos deux pays et nosdeux peuples auraient du lui interdire de tenir de tels propos à un moment où nombreux sont les Africains qui réclament des relations plus équilibrées et moins arrogantes.” Pour lui, “Monsieur PAGANON a raté une belle occasion de se taire ! Dans notre pays, même pendant la colonisation, les Sénégalais ne changeaient pas de trottoir lorsqu'ils y rencontraient un “blanc” et ce n'est pas aujourd'hui que cela va changer...”. No comment !
SIDY LAMINE NIASS
“Sauf changement de dernière minute, les membres du Pds devraient entériner le nom de Karim Wade. Un scénario qui devrait être maintenu même si le fils (et exministre) d'Abdoulaye Wade, en détention provisoire depuis deux ans pour enrichissement illicite présumé, est entre- temps déchu de ses droits civiques”. Lu dans la Lettre du Continent qui confirme ainsi ce que la presse sénégalaise a déjà écrit. Mais il y a quelqu’un qui n’est pas d’accord avec cette tendance qui semble se dessiner. Et il s’agit de Sidy Lamine Niasse Pour lui, les primaires que le Parti démocratique sénégalais (Pds) compte organiser pour désigner son prochain candidat à la présidentielle de 2017, sont une façon pour Wade d’imposer son fils à la tête du parti libéral. Le patron du groupe Walfadjri se prononçait sur la question, en marge du ziarra annuel de Léona niassène. Pour Sidy Lamine Niass, Abdoulaye Wade doit laisser son fils se débrouiller tout seul et non essayer de l'imposer. “Abdoulaye Wade veut nous imposer son fils mais ce n'est pas possible. C'est à Karim Wade de descendre dans l'arène politique et de rencontrer les populations pour se faire apprécier ou gagner la confiance des Sénégalais”, a-t-il soutenu. Il a invité Karim Wade à emprunter le même parcours que son père qui a lutté pendant 26 ans avant de gagner le pouvoir. Sur sa lancée, il a appelé “solennellement” Abdoulaye Wade à changer sa stratégie qui, dit-il, “se résume à imposer son fils Karim à la tête du Pds”. Le mieux pour Wade, dit-il, c’est de laisser les responsables du parti choisir “en toute indépendance leur candidat à l'issue des primaires”.
TAHIBOU NDIAYE
Suspendu depuis le 15 décembre dernier, le procès de Tahibou Ndiaye reprend aujourd’hui, devant la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI). Sauf renvoi de dernière minute du fait du délibéré du dossier Karim Wade et Cie, le président Henri Grégoire Diop devrait rendre le délibéré sur les exceptions soulevées par la défense. Les conseils de l’ancien directeur général du Cadastre et ses coprévenues, notamment sa femme Ndèye Aby Diongue et ses deux filles Mame Fatou et Ndèye Rokhaya Thiam, avaient demandé que toute la procédure soit déclarée nulle. Non seulement ils jugent que l’instruction a dépassé le délai légal de six mois mais que les éléments de la section de recherches de la gendarmerie n’étaient pas habilités à mener l’enquête. L’agent judiciaire de l’Etat, les conseils de l’Etat et le parquet spécial avaient tous rejeté les arguments de la défense sous le prétexte que Tahibou Ndiaye est jugé dans un délai raisonnable. La Cour peut également joindre les exceptions au fond et entamer l’ouverture des débats. Ainsi Tahibou Ndiaye et sa famille devront s’expliquer sur les faits d’enrichissement portant sur 3,4 milliards de francs CFA.
COUR SUPRÊME
Restons avec la CREI mais c’est pour parler du dossier Karim Wade dont le délibéré est prévu le 23 mars prochain. D’après nos confrères de La Lettre du continent, les avocats du fils de l’exprésident Wade ne sont pas contents de la Cour suprême. D’après la même source, les six avocats sénégalais de Karim Wade ont écrit, le 6 février, au premier président de la Cour suprême du Sénégal. Ils s’étonnent qu’aucun des cinq recours déposés en faveur de leur client, depuis deux ans, n’ait été examiné. Or, poursuivent- ils dans leur courrier, une éventuelle décision de la juridiction suprême aurait pu changer le cours du procès devant la CREI. Pour les avocats, cette lenteur est “l’illustration d’un traitement injuste et discriminatoire” car, arguent-ils, “au même moment, une procédure diligentée par l’Etat contre Karim Wade auprès de la même Cour suprême a été traitée en moins de 84 jours”. Allusion faite au rabat d’arrêt introduit par le parquet général lorsque la Chambre criminelle de la Cour suprême avait déclaré recevable l’un des recours de la défense. “Les délais habituels de votre haute juridiction sont largement dépassés en ce qui concerne les recours de Karim Wade contre l’Etat du Sénégal, ce qui lui est fort préjudiciable dans le cadre de sa défense, notamment dans son procès devant la CREI”, fustigent les avocats de Karim Wade.
SAES
En mouvement d’humeur depuis plusieurs jours, le Syndicat autonome des enseignants du supérieur (SAES) a décidé hier de suspendre sa grève pour une semaine. Ce, note une déclaration parvenue à EnQuête, “pour démontrer sa bonne volonté et mener des négociations apaisées avec le gouvernement”. Cette décision intervient après une réunion du Bureau national élargi aux bureaux de sections. Le bureau national élargi encourage ainsi le bureau national à continuer à mener les négociations jusqu’à la plénière prévue le vendredi 13 mars 2015 pour la satisfaction de ses revendications. Tout en invitant toutes les bonnes volontés à peser de tout leur poids pour défendre et sauver l’enseignement supérieur public, le SAES dit prendre acte de l’engagement dûment notifié par le gouvernement de modifier les dispositions de la loi sur lesquelles un accord aura été trouvé.
SAES (SUITE)
Il demande ainsi au bureau national de ne pas prononcer de mot d’ordre de grève jusqu’à la plénière du 13 mars 2015 pour donner une chance aux négociations. Aussi, donne-t-il mandat à son bureau national d’aller à la rencontre de toutes les couches de la population, durant la semaine prochaine, pour expliquer pourquoi la loi-cadre en certaines dispositions est liberticide, “autonomicide”, dangereuse et met en péril la stabilité des universités publiques. En outre, le SAES a demandé à ses membres d’ester en justice contre tous les recteurs qui ont eu à bloquer et à suspendre les salaires du personnel enseignants et de recherches des universités de Dakar, Thiès, Saint-Louis, Bambey et Ziguinchor et d’attaquer la nomination du recteur de Dakar qui viole le décret 70-1135 du 13 octobre 1970 notamment en son article 12, alinéa 1. Enfin, le bureau national élargi a appelé tous les militants du SAES, de l’USEQ, de l’UNSAS et les démocrates de tous bords à se lever comme un seul homme pour défendre un Enseignement supérieur public sénégalais de qualité accessible à tous ceux qui le méritent