LES RAISONS D’UNE DEBACLE POLITIQUE
PARTI DÉMOCRATIQUE SÉNÉGALAIS

La présence des Barbares aux portes de Rome avait dicté aux byzantins un réflexe spontané d’alerte anticipative pour épargner la Cité mythique d’une incursion qui serait alors synonyme de défi majeur.
Autant ce sage dispositif a permis aux Romains de sauver la face d’une inviolabilité historique autant la longue marche du PDS qui aura bataillé pendant presque trois décennies pour l’instauration de l’ouverture démocratique au Sénégal et en Afrique n’aura pas suffit pour Me Wade et ses alliés de relever les défis post électoraux.
Même avec les douze années d’exercice du pouvoir, l’euphorie libérale s’est effondrée en un vulgaire nuage de désillusion sous la cascade de l’arrogance et de l’improvisation mais aussi un manque notoire d’humilité politique. On s’en souvient encore, ce fut une bourrasque de révolte contagieuse qui avait en l’an 2000 balayé l’étouffant régime socialiste dont la dynastie avait accablé les Sénégalais pendant quarante ans.
C’était alors à la faveur d’un sursaut de délivrance que les différentes composantes de l’opposition réunies au sein de la CONACPO, de la société civile avaient entonné le cri du changement.
Comme le label SOPI incarnait déjà ce projet alternatif à travers l’engagement du PDS incarné par le leadership de Me Wade, la trouvaille était bonne pour que le doyen de l’opposition sénégalaise qu’il était eût à présider aux destinées d’une entité comme couronnement d’un tribut de l’histoire à lui rendu par les dures péripéties d’un processus de démocratisation que le parti socialiste était obligé de concéder car l’histoire retient aussi cela de turbulent que le faste des règnes finit toujours par céder à la vérité de l’engagement. Mais, de 1974 à 2012, que d’écueils surmontés !
Que de vacheries subies par une opposition au sein de laquelle Wade et ses militants avaient toujours été la cible du pouvoir. La trame de ces épreuves riches en enseignements aurait dû constituer pour le PDS au sortir de la débâcle électorale du 25 Mars 2012 une source de motivation allant dans le sens d’une consolidation, d’une réorganisation structurelle des bases du parti par un effort systématique d’introspection pour ne pas laisser ses troupes faire de ce moindre mal une fin de l’existence d’une entité que 26 ans d’opposition ont portée au sommet de la République.
En effet, perdre une élection est une étape dans la marge d’un parti de masse comme le PDS mais ne pas privilégier un reflexe de reconquête du pouvoir est un suicide. C’est à ce niveau que la responsabilité historique de Maitre Wade est engagée.
Cette étape qui a été le top d’implosion d’une gestion monarchique qui ne disait pas son nom avait toujours fait du Pape du SOPI le centre d’émergence des idées, des initiatives de concertations dites « démocratiques » mais qui n’en étaient pas unes car le point de chute de toutes les décisions supposées avoir été prises de façon démocratique rimait avec la volonté silencieuse de Me Wade.
Le « boss» tel que l’appelaient ses proches était imperturbablement le manipulateur de coulisse dont les décisions étaient relayées par quelques lieutenants, fidèles compagnons traités de façon spéciale dans l’entourage d’un chef qui ne souffrait pas la contradiction.
Les positions que les uns et les autres occupaient dans les hautes sphères du parti, les postes qu’ils occupaient dans les ministères issues des compromis de compromission que le Secrétaire Général du parti faisait avec le pouvoir étaient attribuées selon des critères de fidélité au Pape et de dé- férence au cercle fermé de son entourage immédiat.
C’est dans ce schéma de gestion opaque de son « personnel politique » que le prophète du SOPI a su contenir et réduire au silence, au risque de se voir virer tous ses compagnons des périodes de dures confrontations.
Les velléités réfractaires et les positions contradictoires affichées par ceux qui installaient le débat a fini par provoquer des défections comme celles de Fara Ndiaye alors numéro 2 du PDS, Serigne Diop, de Famara Manéet de certains ténors du mouvement UJTL comme Médoune Ndiaye du Mouvement des Jeunesses dont l’opposition l’a amené à créer un PDS rénovation etc.
La texture du groupe de choc autour de Wade se résumait alors à des fantassins politiques dont Feu Boubacar Sall, le lion du Cayor, Ousmane Ngom la chair à canon, toujours placé à l’avant-garde des confrontations physiques lors des marches interdites. Téméraire, vindicatif et têtu comme une mule, Ousmane qui est venu au parti à 16 ans avait toujours respiré SOPI et affectionné son Maître d’idéologue Me Wade.
Pour être allé au bagne neuf fois pour le PDS et souvent avec Me Wade. Celui là qui avait tout donné pour ses convictions libérales n’a pas été un Jupitérien. Le bail de confiance qui a très tôt fait de lui un responsable émérite, généreux et engagé le liait non seulement à Me Wade mais à l’ensemble des fédérations.
Abdoulaye Faye actuel Directeur des structures du Parti, les Joseph Ndong du Mouvement de l’UJT etc. L’observatoire politique est aujourd’hui en droit de s’étonner qu’aucune de ces figures emblématiques n’est candidat à la candidature du PDS là où le nom de Karim Wade, seulement arrivé au PDS à la faveur de l’alternance survenue en 2000 semble être plébiscité par de larges franges libérales favorables à la famille de l’ex président.
C’est là un malaise profond qui surgit comme une incohérence des logiques de rétribution de la valeur militante. La candidature d’un Ousmane Ngomou d’un Idrissa Seck s’il était encore au PDS n’aurait point été jugée inconcevable au regard du vécu militant dont ils peuvent se prévaloir.
Le contexte de relâchement de la dynamique originelle du PDS-combattant a été largement explicatif du faiblissement des spontanéités réorganisationnelles. Ce phénomène, antonyme de réplique sur le front politique résulte d’un manque de motivation de la composante politique au niveau des différentes fédérations dans la mesure où les douze années d’exercice du pouvoir libéral avaient suffit pour créer un sédiment de frustration qui a fini par envahir tout le tissu organisationnel.
Dans le souci d’une massification qui, du reste est le propre de tous les partis d’envergure, la recette de Me Wade a été fondée sur une massification sélective au grand dam des militants de la première heure. Ceux de la 25ème heure comme on aime à les appeler ont souvent été cooptés, investis de confiance et de pouvoir et ont bénéficié des largesses du «boss» à un moment où de nombreux militants qui avaient toujours combattu à ses côtés triment dans le dénuement le plus absolu.
L’effervescence de la période de campagne pour le second tour avait transformé le quartier général du PDS en une véritable foire de recherche de fonds. La course poursuite derrière des responsables détenteurs du jackpot que Maître Wade leur avait laissé pour aider les différentes fédérations et les grands électeurs avait été gérée sur la base d’une véritable opération de charme par ces Messieurs de la 25ème heure qui se faisaient désirer sur les lieux.
Ce qui aura contribué à approfondir le tunnel des frustrations. Les signes avant-coureurs de la débâcle électorale du 25 Mars 2012 étaient devenus ainsi perceptibles. La cacophonie autour du pactole pour la Campagne a fini par être la source de démobilisation des potentiels électeurs choqués par leur marginalisation au profit du lustre inconnu qui se sont placés dans la bonne grâce du prophète du SOPI. Au sortir d’un échec politique ainsi prévisible, l’impossible réorganisation du parti avec les appétits de positionnements qui se dessinent ça et là, l’image emblématique du chef de parti qu’incarnait Me Wade est sensiblement entamée.
A l’image d’un Maître Solfège qui se perd dans ses notes en plein concert, un désaveu silencieux s’installa autour de Wade car désormais ses lieutenants osaient lever la tête et même à travers des murmures dénonçaient les actes qu’il posait.
Ce nonagénaire qui souffre aujourd’hui le martyr d’une malédiction politico juridique consécutive au destin de son fils n’est peut être pas à même de porter la voie du rassemblement pouvant permettre à ses troupes de cheminer dans le sens des plans qu’il leur aura tracés.
On retiendra peut être que le PDS en déconfiture est le gibier assoupi de Me Wade mais la bête intrépide qu’il aurait pu constituer comme alternative républicaine a été domptée par le laxisme des militants responsables, le manque d’ambition du personnel des cadres politiques orthodoxes qui, la peur dans le ventre de perdre les fragiles avantages qui leurs sont faits ou des promesses calculistes qu’on faisait miroiter à leurs yeux ont toujours différé leurs ambitions légitimes dans l’attente que les humeurs bienveillantes du Maître tourneraient en leur faveur.
Ce schéma calculiste est la cause profonde du réveil brutal des ambitieux encagoulés qui, après avoir été longtemps des disciples disciplinés du SOPI ont fini par jeter le masque pour se positionner en alternatives pour le PDS dans l’opposition soit à travers un parti ou un mouvement citoyen.
Et dans ce débat, d’écartèlement de sa pesanteur politique, Me Wade qui a toujours eu deux fers dans le feu se trouve placé en face de deux logiques divergentes.
- Aller jusqu’au bout et par tous les moyens pour que la candidature de son fils soit le mot d’ordre unique de tout le parti à travers des candidatures retenues qui finiront par désister au profit de l’hôte de Rebeuss. –
Et celle d’empêcher les antis Karim qui existent au sein du PDS de s’arroger l’électorat libéral et dans lequel cas une alliance avec une tierce personne serait une solution pour croiser le fer avec Macky Sall et ses alliés pour les battre.
Sûre de sa certitude, la majorité silencieuse des libéraux rumine son rejet de la phagocytose annoncée ( candidature de Karim) et se réserve le légitime droit de trouver son candidat alternatif dans un contexte où les libéraux orthodoxes comme Maître Ousmane Ngom qui sont plébiscités par une majorité silencieuse semblent afficher un dégout face au bouillon libéral et la question reste de savoir si les consciences libérales qui ont accompagné le mouvement SOPI dans son histoire voudront bien laisser ceux-là qui ont écrit une page significative de l’ouverture démocratique avec le SOPI en marge la Présidentielle 2017. La fin des calculs et des positionnements n’est encore pas pour demain.