STROMAE, LE ‘’FORMIDABLE’’ BONHOMME EST À DAKAR
POUR SON SPECTACLE PRÉVU CE SOIR AU MONUMENT DE LA RENAISSANCE

Le musicien belge d’origine rwandaise Stromae est à Dakar depuis hier pour son spectacle prévu ce soir au Monument de la Renaissance. En conférence de presse au restaurant Alkimia, il a assuré que ce «Stromae Africa tour» est super important pour lui et qu’il offrira à ses fans du Sénégal et des autres pays africains des moments inoubliables.
Sa seule présence au restaurant Alkimia a suffi pour que l’entrée soit filtrée. La liste des journalistes et partenaires invités, est attentivement scrutée sous le regard intimidant de plusieurs gros-bras préposés afin de dissuader tout esprit malveillant ou tout curieux non invité.
«Nous avons invité un journaliste par organe de presse» notifie-t-on d’emblée, pour retenir au portail certains jeunes confrères envoyés par leur rédaction. Sur place, les noms des titulaires ou chefs de desk Culture sont les seuls retenus sur les listes.
«L’artiste du moment» est déjà au présidium aux cotés de Didier Awadi et de ses partenaires sur le projet. Face à Stromae, on ressent l’étrange impression d’être devant un adolescent qui vient de débuter sa carrière artistique. Il est tout frêle. Pourtant, Paul van Haver (son nom à l’état civil) à 28 ans, est l’un des artistes très en vogue et l’un des plus sollicités sur les plateaux du monde. Ceci explique d’ailleurs le méticuleux dispositif sécuritaire qui accompagne son séjour.
En réalité, sa venue à Dakar est vue par des milliers de fans comme un cadeau du ciel. Stromae en est conscient. Mais pour cet artiste, le plus important est d’être là, pour faire plaisir. «Cette tournée africaine est très importante pour moi... Partout où on a besoin de moi, je viens. Et venir faire des concerts en Afrique a toujours été une priorité» dit-il, avec une simplicité, qui cache mal sa notoriété.
Physiquement, Stromae n’a non plus rien d’exceptionnel. Avec son tee-shirt de jeune garçon, il parle en agitant constamment ses grands bras ou en souriant du coin des lèvres après avoir servi à son auditoire une blague succulente. A ce propos, l’artiste semble bien très taquin.
Il répond spontanément à chaque question des journalistes tout en commençant ou en terminant ses réponses par des tournures de phrases qui font éclater de rires son auditoire. «Qu’il est mignon !!! En plus, il sait faire rire son monde» mentionne une invitée surexcitée et qui venait de prendre place sur une chaise.
Sénégal, le concert de raison
La Stromania s’empare donc à petit feu de la capitale sénégalaise. Même si le New York Times écrivait que «Personne ne sait jamais sur quel pied danser avec Stromae», ici, l’on sait d’avance que l’on dansera sur tous les pieds. Les 12 mille places réservées sont déjà prises.
«Il n’y a plus de tickets de 5 000 francs. Ceux de 10 000 francs sont épuisés aussi et pour les entrées de 25 000 francs, les gens accourent prendre les derniers lots» confie un membre de l’organisation, qui assure que la fête sera belle. Une fête belle, c’est justement ce que souhaite le Studio Sankara, maître d’œuvre de l’évènement.
«Nous savons qu’il y aura beaucoup d’enfants et de nombreuses familles. Donc nous avons mis les bouchées doubles pour sécuriser le spectacle. Nous avons à disposition 300 gendarmes, renforcés par 100 agents privés de sécurité et plusieurs sapeurs-pompiers» affirme Didier Awadi. Il mentionne également que si Stromae a débuté sa tournée africaine par le Sénégal, c’est parce qu’ «il avait aimé son séjour ici et en avait eu de bons souvenirs».
L’auteur de Papaoutai, le tube de l’été 2013, indique lui-même que commencer par Dakar et terminer par le pays de son père qui a perdu la vie lors du génocide rwandais de 1994, est «ce qui est de plus normal». «Je sais qu’ici, il y a la logistique adéquate pour que j’offre un spectacle de ce type...» dit-il.
Non sans cacher ses appréhensions sur sa prestation à Kigali qui se présente comme un retour aux sources. Il disait à Jeune Afrique, «face à cela, je ne serai personne, je ne serai pas Stromae, juste le petit Paul, à la recherche de son papa, juste un fils qui veut renouer le dialogue avec son père mort».
Aujourd’hui à Dakar, il cherche encore ses mots, lorsqu’on l’interpelle sur le sens qu’a pour lui, son concert final. Sur ce seul sujet, Stromae balbutie presque ému et cherche ses mots : «Je ne sais pas ce qui m’attends. A part le concert que je donnerai là-bas, il y a de la famille à voir sur place. Je sais que pas mal de choses vont ressortir... Des choses personnelles...»
Kigali, l’étape du cœur
Toutefois, poursuit-il, «C’est aussi important pour moi que tous les autres pays qu’on va faire. Ça ne sert à rien d’essayer de prévoir ce qui va arriver. On va vivre ça, on va voir ce qui va se passer. On va essayer de faire au mieux pour le concert. Après, personnellement, j’avoue que je ne sais pas ce que je vais vivre, ce que je vais ressentir... Je ne sais pas prévoir, mais forcément je me sens mal. Mais bon, c’est la vie», a-t-il conclu.
Non sans omettre d’ajouter qu’à Praia au Cap-vert également, «il y aura forcément un truc particulier par rapport à Cesaria Evora». Mais à quoi doit-on s’attendre pour le concert de ce soir ? «Ici, il y a des attentes. Ce qu’on me raconte, c’est qu’il y a des gens qui connaissent Papaoutai (son premier grand succès), mais pas forcément Stromae. Il y en a qui connaissent Stromae. Il y a tout ça.
Je vais essayer de rencontrer ce public, de le saluer, de m’entendre avec lui et de le convaincre. Je n’ai jamais fait de concert ici, je dois faire mes preuves en fait», a-t-il affirmé. Avouant qu’il appréhendait cette première rencontre avec un public du continent africain, l’artiste confesse qu’il a «peur de l’inconnu».
«J’appréhende un peu, pour être honnête, comme chaque continent sur lequel on a été et qu’on connaissait moins bien que celui où j’ai grandi (l’Europe)», a-t-il dit avant de poursuivre : «J’ai peur de l’inconnu, étant donné que je suis assez rigide et calculateur, forcément, dès que je suis face à l’inconnu. Je perds un peu mes moyens. C’est cet inconnu qui me fait un peu peur. Mais c’est l’excitation, évidemment. Comme chaque excitation lorsqu’on monte sur scène.
C’est l’imprévu, c’est positif, c’est super ». Cette «peur» en effet, est surtout liée à son caractère personnel. «J’aime bien savoir ce qui va se passer. Et forcément, quand je ne sais pas ce qui se passe, j’appréhende un petit peu (...) Comme tous les publics que je découvre, j’appréhende, parce que je ne sais pas comment il va réagir. Je ne sais pas s’il (le public dakarois) va réagir à mes blagues.
En général, s’ils ne rigolent pas, je suis plutôt content. J’appréhende, même s’il y a un vrai enthousiasme. Il y a quand même pas mal de gens qui promettent le déplacement. On ne sait jamais comment ça va se passer». Il insiste : «J’appréhende, comme quand on a été aux Etats-Unis. Mais c’est encore différent, parce qu’aux Etats-Unis, c’était un projet en développement».
Les autres dates
Outre Dakar et Praia au Cap-Vert, le musicien belge sera en concert à Douala, au Cameroun (19 mai), à Abidjan, en Côte d’Ivoire (23 mai), à Libreville, au Gabon (6 juin), à Brazzaville, au Congo (10 juin), à Kinshasa, en Rd Congo (13 juin) et à Kigali, au Rwanda (20 juin).
Mais pourquoi ces pays africains et pas les autres ? «C’est plus des rencontres entre les promoteurs locaux et Karim (son manager), et puis des choix et des réalités de planning aussi, qui font qu’on ne peut pas passer partout», a relevé Stromae.
Il conclut tout de même que «si on pouvait passer partout, on l’aurait fait. On a essayé de passer plus ou moins partout. Evidemment, la priorité pour nous, c’était des pays francophones. C’était une façon de résumer le passage ici de la meilleure manière, en essayant de ne déplaire à personne. Avec le temps qui était imparti, évidemment».