TOC TOC CHEZ L’ARTISTE !
EXPO "CORPS ACCORD"
Une expo, c’est souvent la fin d’une longue période d’hibernation. Cachées, tenues secrètes jusque-là, toiles et tableaux se dévoilent enfin. Mais entre-temps, il se passe tellement de choses dans l’atelier de l’artiste et dans sa tête. Les choses sérieuses commencent vraiment lorsque le Commissaire à l’exposition choisit l’artiste qu’il «vendra».
Quand on pose le pied dans la galerie, on imagine difficilement combien de jours il a fallu pour que l’artiste y parvienne. Agnès Theureau s’est donné quelque chose comme trois ans : un mois par toile, et le temps que la peinture sèche. La première semaine, elle cherche, elle hésite et elle a «mauvais caractère». 15 jours plus tard, «elle rentre dans (son) sujet». L’artiste travaille à l’aide d’un châssis pour tendre la toile, de la peinture à l’huile, et ses doigts. Elle «n’utilise que très rarement le pinceau ».
Elle explique que pour parfaire sa technique, elle s’est beaucoup exercée à façonner des corps dessinés au crayon, ce qui lui a permis de pouvoir travailler sur une position ou sur une posture. La base de la peinture, comme elle dit, c’est le dessin, «parce qu’il ne suffit pas de jeter ses couleurs ou de se cacher derrière elles. Sinon, on est plus un bon coloriste ou un bon décorateur».
Avec ses œuvres, elle entretient une relation plutôt complexe. Elle qui n’a «pas de toile préférée, parce qu’elles sont toutes différentes», pense qu’un tableau quel qu’il soit, c’est une pulsion, une sensation. Lorsqu’elle peint, par souci d’intégrité, elle ne tient jamais compte de l’aspect commercial des choses.
C’est peut-être pour cela qu’elle évite de se recopier, même lorsqu’elle n’est pas très inspirée, ou de fabriquer des séries. Parce que, dit-elle, « nous ne sommes plus au 19e siècle où les artistes devaient travailler sur commande ». Mais s’appliquer à copier un grand maître de temps en temps est très formateur, même si tout cela ne suffit pas : l’artiste doit avoir sa propre personnalité. «Il travaille d’abord dans son atelier, dans son ombre, et ensuite il sort». Dehors, l’œuvre qui se montre est une œuvre qui s’assume, quelque chose que l’on signe, même s’il est toujours très difficile, comme dit Agnès Theureau, de mettre son nom au bas d’une toile : «de peur parfois de s’empêcher de rajouter quelque chose».
C’est là qu’intervient quelqu’un comme Idrissa Diallo, Commissaire à l’expo et responsable de la Galerie Senghor du Village des Arts. Au début, dès qu’il a les œuvres, il les met par terre, les visualise et se «laisse guider». Puis, il établit des liens, en fonction du format, et de façon à ce que le regard se pose juste «au milieu des tableaux», en fonction aussi de la dimension, des couleurs etc. Il lui arrive aussi de faire des choix, et de changer d’avis ensuite.
Quand il travaille avec un artiste, c’est lui qu’il «vend» plus que ses œuvres. Avec Agnès Theureau, ils ont tout de suite créé une certaine complicité. Le 8 mars dernier, elle faisait partie du groupe de femmes qui exposait au Village des Arts. Agnès y est encore jusqu’au 8 novembre.