IL EST COMMENT LE DERNIER FELWINE SARR ?
Dans son roman « La saveur des derniers mètres », l’écrivain et universitaire sénégalais raconte les voyages et les visages qui lui permettent de se reconnecter avec lui-même
On y parle d’Afrotopia, son désormais fameux essai. Peut-être parce que c’est l’un des fils conducteurs qui, depuis quatre ans, a mené Felwine Sarr dans plusieurs coins du monde. Des aéroports, des villes, des chambres d’hôtels, des édifices, des monuments, des musées, des salles de spectacles mais aussi des rues qu’il arpente non sans contemplation. Autre fil conducteur : sa routine sportive mêlant jogging – dont les derniers mètres sont le miel de l’existence pour qui a soif de liberté – et le budo, art martial qu’il pratique depuis des années.
Et puis, il y a feu le Vieux colonel, son père, qui repose dans le jardin de Baaback, à Niodior, île sénégalaise où Felwine, « celui que tout le monde aime » en langue sérère, a vu le jour en 1972. Ceux qu’il croise – avec qui il échange en silence ou de vive voix, ceux dont il se souvient ou ceux qu’il jauge – permettent à l’écrivain sénégalais, qui enseigne désormais les humanités à l’université de Duke, en Caroline du Nord, de mieux saisir le rythme du monde dans lequel il se déplace.
« Maintenir la lumière allumée »
Mexico, Istanbul, Lisbonne, Dakar, Niodior, Saint-Louis du Sénégal, Port-au-Prince, Yaoundé, Conakry, Kampala, Naples, Cassis, Le Caire, etc. De la philosophe américaine Judith Butler au poète-éditeur haïtien Rodney Saint-Eloi ; des membres du Bembeya Jazz au joueur de kora Ablaye Cissoko ; du militant camerounais Prince Kum’a n’Dumbe III à l’écrivaine haïtienne Yannick Lahens ; de la chercheuse française Bénédicte Savoy à son compatriote tout aussi écrivain Mbougar Sarr. Pour ne citer qu’eux…
« Partout dans le monde, des femmes et des hommes de bonne volonté travaillent à maintenir la lumière allumée. J’en ai rencontré à Alger, à Lannion, à la Villette à Paris, à Ouaga et ici, à Lisbonne », écrit Felwine Sarr.
La saveur des derniers mètres est un carnet de voyages un peu particulier. C’est qu’en filigrane, le long de ses routes empruntées à pied ou en joggant – car « l’effort est (sa) loi » et la place du Souvenir de Dakar son dojo –, Felwine Sarr se dévoile. Qui est ce héraut de la nouvelle pensée africaine animé par les spiritualités ? Qui est cet adepte d’arts martiaux qui aura compris grâce à feu son instructeur qu’« il faut quitter les lieux en ayant donné toujours plus que l’on a reçu, sans amertume »?