«IL Y A DES MENACES QUI PÈSENT SUR LES IDENTITÉS»
Abdoulaye Elimane Kane fait une présentation de son ouvrage « Eloge des identités. De l’universel et du particulier », édité en 2019, par l'Harmattan

La Section des Sciences Sociales et humaines (SSSh) de l’Académie nationale des Sciences et techniques du Sénégal (Ansts) a invité le Pr Abdoulaye Elimane Kane à faire une présentation de son ouvrage « Eloge des identités. De l’universel et du particulier », édité en 2019, par le harmattan. A cette occasion, l’ancien ministre de la Culture a soutenu que des menaces pèsent sur les identités et l’humanité
« Qui sommes-nous ? Que voulons-nous devenir ? Ces deux questions sont au cœur de la réflexion, au fil des 161 pages de l’ouvrage du professeur Abdoulaye Elimane Kane, sur les identités. Dans cette agora qui transcende les sciences, le philosophe a présenté les fondements de « Eloge des identités. De l’universel et du particulier ». Il a précisé d’emblée que le sous-titre est également un avertissement, à savoir qu’il s’agit de chercher dans les rapports entre le « particulier et l’universel » quels sont les problèmes qui se posent. Est-ce qu’il y a des manières de les résoudre ? Etc. C’est des questions philosophiques soulevées par l’enseignant en la matière. Seulement, elles sont abordées en choisissant des thèmes qui concernent le vécu des hommes, tous les jours. A la fois dans chaque société mais également dans le monde. Dans une des parties, il s’agit de voir quels sont les griefs qui sont articulés à l’endroit de la mondialisation. « Griefs qui tournent autour de l’idée que la mondialisation tend à effacer les identités et les particularités. Même si l’on a reconnu des avancées considérables sur le plan technique et scientifique », indique le philosophe qui aborde dans une autre partie, la santé et la maladie. « C’est une question qui m’intéresse, mais aussi, je me réfère à des réflexions d’ordre philosophique sur la manière dont les rapports entre malade et médecin sont perçus. Rapports qui mettent à la fois la généralité et l’universalité des lois scientifiques ». Ce, d’autant que la médecine a rapport à des individus concrets qui sont dans des hôpitaux et des cliniques et qui véhiculent avec eux des « particularités » et une manière de recevoir des médicaments ou de transmettre la maladie. « C’est des questions de normes. Est-ce qu’elles sont universelles ? Est-ce que chaque individu a une manière de les vivre ? C’est la deuxième partie de l’ouvrage », renseigne l’invité de SSSH.
LE DANGER DU TRANSHUMANISME
Poursuivant, il aborde la troisième partie, des techniques et sciences qui portent sur des préoccupations d’ordre futuriste. Il y démontre les dangers de la « science sans conscience ». Le Pr Kane reconnaît que la science et la technique ont rendu d’énormes services à l’humanité notamment dans la médecine, la connaissance des hommes les uns les autres, la circulation des connaissances… «Mais il existe un mouvement philosophique, le transhumanisme qui projette de réaliser quelque chose de plus que l’homme et qui pratiquement ferait oublier l’espèce humaine, en se fondant sur des avancées technologiques très pointues, en particulier les algorithmes », dit-il. Et la question fondamentale reste à savoir : «Quelle société nous voulons devenir ? A la fois en reconnaissant l’importance des sciences et techniques mais en choisissant de rester des humains qui donnent un sens à leurs existences qui ne se réduisent pas aux moyens techniques. Ce sont les questions abordées dans les trois parties de l’ouvrage». æ Sur un autre volet, c’est la naissance de l’école psychiatrique de Dakar, sise à Fann, qui était au centre des débats. « A partir de 1965, les professeurs Colon, Moussa Diop et autres ont constaté que les méthodes psychiatriques occidentales avaient échoué à résoudre des problèmes comme l’hystérie, le délire et ce que l’on appelle les maladies mentales. Parce que précisément ne prenant pas compte des références culturelles, familières et individuelles », souligne Pr Kane avant de déclarer que « l’identité dont il parle n’est pas un repli sur soi. Il y a des menaces qui pèsent sur les identités ; par exemple : la stigmatisation, à cause de la couleur de la peau, la religion, la culture. Même l’identité de l’humanité avec des projets tels que le transhumanisme. Il s’est agi en somme pour le professeur en philosophie d’apporter des réponses aux questions «qui sommes-nous ? Que voulons-nous devenir ?
Deux questions au cœur d'une réflexion sur les identités. L'objectif est double : reconnaître le bien-fondé des craintes suscitées par les manipulations et les usages malveillants de ce concept, sans phobie, ni fétichisme de l'universel et soutenir que le relativisme est compatible avec l'universalisme sans conduire au scepticisme ».