LE TOURISME PAYE LE PRIX DE LA CRISE ÉLECTORALE
Annulations en cascade, fermetures de chantiers, emplois menacés... C'est tout un pan de l'économie sénégalaise qui vacille. De Kédougou à Saly, plongée au coeur des destinations désertées malgré les atouts intactes du terroir
D'après un reportage du quotidien français Le Monde, la crise politique née du report de l'élection présidentielle en février a durement impacté le secteur touristique, deuxième pourvoyeur de devises du pays.
"Il faut sauver la saison touristique avant qu'il ne soit trop tard !", alerte Moussa Yero Dansokho, gérant de trois hôtels trois étoiles à Kédougou, dans l'article. Depuis l'annonce du report, son activité s'est effondrée, avec une perte sèche de 70 millions de francs CFA (106 714 euros). D'ordinaire, sa clientèle internationale et familiale afflue pour profiter du parc national du Niokolo-Koba. "Quand ils ont vu les images des manifestations, les clients étrangers ont annulé", déplore-t-il.
Le secteur de la chasse, manne importante pour l'hôtelier de janvier à avril, a également été durement touché. Sur 47 réservations en février, seule une dizaine a été maintenue. "Quand un amateur de chasse annule un séjour de quinze nuitées, c'est l'équivalent de 2 300 euros qui s'envolent", explique M. Dansokho dont l'établissement emploie 50 personnes.
Sur la Petite Côte aussi, les professionnels du tourisme tirent la sonnette d'alarme. À Saly, station balnéaire prisée des Français et Dakarois, Boubacar Sabaly gère un hôtel quatre étoiles qui a perdu sa clientèle internationale en février. "Même s'il n'y a pas eu de violences à Saly, le climat de tension effraie les étrangers", déplore-t-il.
Au niveau national, le président de l'Association des professionnels de l'hôtellerie et de la restauration estime à 30% le taux d'annulation des réservations d'hôtels en février. L'hôtellerie d'affaires de Dakar a aussi connu une baisse drastique de son taux de remplissage, autour de 15% contre 85-90% habituellement selon le directeur du Terrou Bi.
Le secteur touristique, qui doit déjà se relever de la pandémie de Covid-19 et des émeutes de 2021 et 2023, craint des faillites si la crise politique persiste. "Combien de temps pourrons-nous tenir ?" s'inquiète le directeur du Terrou Bi, qui emploie 700 personnes.
Au-delà du tourisme, ce sont les perspectives de croissance du pays, estimées à plus de 8%, et les projets d'exploitation du pétrole et du gaz qui pourraient être compromis si les incertitudes politiques perdurent, analyse le journal.