LES ACTEURS PLAIDENT POUR UNE GESTION CONCERTEE DE LA SARDINELLE
Au cours de ces 10 dernières années, la sardinelle ronde a diminué de 86% au Sénégal. Ce qui fait que petit à petit on assiste à la mort programmée de cette espèce.
À l’instar des communautés de pêche du monde entier, l'Institut Universitaire de Pêche et d'Aquaculture (IUPA) a célébré hier la Journée mondiale de la pêche au Sénégal. Elle se caractérise par un contexte particulier marqué par une raréfaction de la sardinelle. C’est pourquoi les acteurs qui se sont réunis à cette occasion ont interpellé les autorités pour une gestion concertée de cette espèce.
Le manque de poisson inquiète de plus en plus les pêcheurs et les ménages sénégalais. Depuis des années, la sardinelle se fait rare et est devenue presque introuvable. Au cours de ces 10 dernières années, la sardinelle ronde a diminué de 86% au Sénégal. Ce qui fait que petit à petit on assiste à la mort programmée de cette espèce.
Conscient de cette situation, l'Institut Universitaire de Pêche et d'Aquaculture (IUPA), en partenariat avec le programme EAF Nansen de la FAO, a profité de la Journée mondiale de la Pêche au Sénégal pour lancer l'alerte pour la énième fois. C’est ainsi que cet événement a été placé sous le thème : «Importance d'une gestion concertée des stocks de sardinelles pour le bénéfice des communautés qui en dépendent». Ce, pour mettre en lumière l'importance de la gestion durable des ressources halieutiques et de la coopération régionale pour préserver les stocks partagés de sardinelles, essentiels à la sécurité alimentaire et au développement économique des communautés côtières au Sénégal et en Afrique de l'Ouest.
Selon le Pr Alassane Sarr, Directeur de l’Institut Universitaire de Pêche et d'Aquaculture (IUPA), de l’Ucad, le thème de cette année a une particularité car «comme nous le savons tous, le poisson devient de plus en plus rare. Cette situation est due à plusieurs facteurs, mais le facteur le plus déterminant, c’est la surexploitation des ressources halieutiques au Sénégal. Il y a la surpêche qui fait qu’aujourd’hui, la ressource devient de plus en plus rare. Le thème porte sur un stock qui est particulier. Il s’agit de ressources transfrontalières qui concernent le Sénégal, mais aussi les pays de la sous-région tels que la Mauritanie, la Gambie et ça va jusqu’au Maroc. Cela veut dire que nous devons prendre des mesures concertées pour avoir une gestion durable. Ce qui est extrêmement important car ça nécessite d’avoir des organes de gestion mais également des discussions entre nos différents partenaires», a-t-il déclaré.
Représentant le ministre de la Pêche à cet événement, Sidya Diouf, membre de la Division de Pêche artisanale à la Direction des Pêches Maritimes, a souligné que cette journée est une occasion pour discuter de beaucoup de thèmes mais aussi de revoir tout ce qui est impact sur la ressource, notamment sa raréfaction. «Aujourd’hui, nous notons de plus en plus une raréfaction des ressources halieutiques, spécifiquement des sardinelles qui sont de petits pélagiques et qui sont partagées au niveau de l’Afrique de l’Ouest. Aujourd’hui, cette espèce emblématique qui était plus accessible aux populations devient de plus en plus inaccessible et cher», se désole M.Diouf qui pense qu’on ne peut pas parler de stock de sardinelles pour le Sénégal parce «qu’on a un stock partagé, donc c’est un stock sous régional. Et donc chaque pays, en fonction de ses objectifs, met un dispositif pour capturer un maximum de poissons et c’est ça qui rend la gestion de cette espèce extrêmement difficile». A l’en croire, avant, les usines ne transformaient pas cette espèce mais aujourd’hui, c’est une espèce qui est congelée et vendue dans la sous-région. «Donc en termes d’entrée de devises on sait que c’est important et si on regarde un peu les exportations du Sénégal en termes de produits halieutiques, c’est beaucoup plus tournés vers la sous-région. Et pour cela, ce sont les petits pélagiques qui sont concernés», dit-il.
SIDYA DIOUF : «LE DEFIS ACTUEL, C’EST DE TOUT FAIRE POUR REGENERER CETTE ESPECE»
Pour lui, le défi actuel pour le monde de la pêche, c’est de tout faire pour régénérer cette espèce, réhabiliter les écosystèmes dégradés, mais également favoriser la résilience parce que c’est une espèce très sensible aux variations climatiques. «Et on sait qu’aujourd’hui, avec l’acidification des océans, cette espèce a tendance à migrer. Donc même si on ne peut pas prendre des mesures, on peut prendre des initiatives d’adaptation», prône M. Diouf.
Venu prendre part à cette rencontre, le représentant de l’association des animateurs en pêche dans les radios communautaire, Saliou Ba, estime que cet appel à la gestion concertée de la sardinelle est une urgence puisqu’«aujourd’hui la raréfaction de cette espèce a un impact sur la vie des acteurs de la pêche. Cette situation vient renforcer la pauvreté, car une bonne partie des entreprises qui travaillent dans ce secteur à savoir les mareyeurs, les transformateurs entre autres commencent à fermer boutique. C’est un secteur vital qui permet à des milliers de personnes de travailler. Donc nous demandons à l'État de tout faire pour sauvegarder ces ressources».