LES MAUX D'UN SECTEUR
9% des établissements d’enseignement fonctionnent dans ce pays sans autorisation, et que l’on trouve une pléthore d’enseignants sans diplômes ainsi que des filières inadéquates, ou même sans formateurs
L’audit des établissements d’enseignement privés, restitué le vendredi dernier, a montré que 9% des établissements d’enseignement fonctionnent dans ce pays sans autorisation, et que l’on trouve une pléthore d’enseignants sans diplômes ainsi que des filières inadéquates, ou même sans formateurs. Des chiffres qui révèlent l’étendue du mal qui ronge le système d’enseignement de ce pays.
Les parents devraient bien se renseigner sur les établissements d’enseignement privés avant d’y faire inscrire leurs enfants. D’après les résultats de l’audit des établissements privés à Dakar, «46% des établissements disposent d’autorisations provisoires, 43% ont une autorisation définitive et 9% des établissements ne disposent d’aucune autorisation».
Lors de l’atelier de restitution, le vendredi dernier, de l’audit fait avec l’appui de la Coopération allemande Giz, M. Serigne Modou Niang, le chef de la Division formation privée au ministère de la Formation professionnelle, qui faisait la restitution, a déclaré : «Au Sénégal, nous avons 9% d’établissements qui fonctionnent sans aucune autorisation et 2% d’établissements qui disposent d’actes de reconnaissance.»
Il a ajouté : «Sur le plan administratif, nous savons tous que l’établissement doit être dirigé par un déclarant responsable. Mais nous pouvons aujourd’hui dire, sans risque de nous tromper, que 7% de nos établissements n’ont pas de déclarant.» Une situation qui peut s’expliquer par des cas de décès. «Parfois les déclarants décédés, on ne les remplace pas. Ce sont des établissements qui sont dans une situation administrative chaotique», a-t-il commenté.
Selon toujours le fonctionnaire, 141 établissements fonctionnent sans pilote dans les enseignements-apprentissages. «Un établissement a besoin de directeur pédagogique pour contrôler, veiller, réajuster, remédier le système apprentissage. L’étude a montré que sur tous ces établissements audités, 141 n’ont pas de directeur technique», a-t-il indiqué. Sur la notion administrative, «les documents de gestion ont fait l’objet d’étude, de même que les bulletins de paie et les impôts, et 46 pour cent de nos établissements s’acquittent régulièrement des impôts. La moitié des établissements ne paie pas avec des bulletins. C’est un cas qui peut intéresser l’Inspection du travail, mais aussi qui nous intéresse dans le cadre de la promotion de la qualité du travail», a-t-il déclaré.
Relativement à la planification pédagogique, a-t-il poursuivi, «51% des établissements font des efforts, mais 49% ne planifient pas leurs enseignements-apprentissages sur la base de planning et de chronogramme». Une chose qui n’est pas sans conséquences. «Nous savons tous que la conduite des enseignements-apprentissages nécessite la mise à disposition d’outils d’accompagnement. 27% d’établissements ne gèrent pas correctement les emplois du temps, qui sont pourtant le premier référentiel pour l’organisation pédagogique dans un établissement», a-t-il soutenu.
L’audit a porté aussi sur l’offre de formation. Et à ce propos, les choses ne se passent pas dans les règles de l’art. «Nous avons une répartition un peu inégale de l’offre de formation sur les secteurs porteurs de croissance. Les secteurs qui portent la croissance économique au Sénégal, sont les secteurs qui ont les moyens portés dans l’offre de formation privée. 223 sur l’ensemble des établissements audités sont dans le tertiaire, 96 sont dans le secondaire, 25 sont dans le secteur primaire. Il y a une prédominance de formation dans le secteur tertiaire», a dit M. Serigne Modou Niang. A l’en croire, la conformité des filières a été aussi vérifiée.
«16 pour cent des filières enseignées ne sont pas autorisés. Dans nos établissements de formation professionnelle, il y a beaucoup de filières qui sont enseignées, mais qui ne sont pas autorisées», a-t-il dit tout en précisant que «cela peut bel et bien hypothéquer l’avenir des apprenants. Parfois, il y a des parents qui investissent beaucoup de millions, mais à la fin, le diplôme n’est ni signé par l’autorité compétente ni homologué. Généralement, l’étudiant ne s’en rend compte que lors de son entretien d’embauche. C’est un peu pathétique».
Sur la disposition des formateurs, les audits ont aussi relevé un problème. «Le taux de formateurs intervenant sans diplômes conformes dans les filières enseignées est de 17, 57%», a informé M. Niang, qui pense que «dans les établissements privés, cela devrait attirer l’attention de tous les acteurs». Car «les établissements ouvrent des filières sur lesquelles il n’y a pas de formateurs. Les formateurs habilités à le faire, on n’en cherche, mais on n’en trouve pas. Mais, le fait est réel, il y a 17, 57 pour cent de formateurs qui interviennent sans diplômes conformes aux filières pour lesquelles ils sont recrutés», a-t-il informé.
Mamadou Camara Fall, Secrétaire général du ministère de la Formation professionnelle, a indiqué, à l’issue des travaux, que l’esprit de cet audit n’est pas de tendre vers la répression, mais d’identifier, avec les acteurs, les points à améliorer et les accompagner techniquement et institutionnellement pour qu’on puisse améliorer l’existant. Et d’après lui, d’autres audits seront aussi faits dans les autres régions du pays, en dehors de l’échantillon des 447 établissements audités.