L’UCAD TIENT DES ASSISES POUR SE REFONDER
Les différentes composantes de la communauté universitaire se penchent depuis deux jours sur la situation de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), fermée depuis juin dernier à la suite des violences qui ont suivi le verdict du procès de SONKO
Les différentes composantes de la communauté universitaire se penchent depuis deux jours sur la situation de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), fermée depuis juin dernier à la suite des violences qui ont suivi le verdict du procès de l’opposant Ousmane Sonko. La sécurité et l’introduction de modules transversaux figurent parmi les points qui seront débattus lors de ces assisses de l’Ucad. La réouverture des campus social et pédagogique de cette université n’est pas inscrite à l’ordre du jour malgré les exigences des étudiants qui menacent de paralyser le système éducatif national dans son ensemble s’ils n’obtiennent pas satisfaction sur cette revendication.
Depuis quatre mois, c’est-à-dire les manifestations du 01er juin dernier, les portes de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar sont fermées. Au cours de ces manifestations, des édifices et des véhicules avaient été saccagés et incendiés. Les dégâts avaient été énormes. Selon les autorités académiques, les conditions actuelles à l’université de Dakar ne permettent toujours pas une reprise des cours malgré les exigences des étudiants qui sont déjà en mouvement et qui menacent de paralyser tout le système éducatif national si cette université et son campus social ne sont pas rouverts. Or, les autorités n’entendent pas céder à la pression des étudiants qui ont annoncé la couleur en délogeant des écoles à Dakar, Diourbel, Kaolack...
Selon le recteur de l’Ucad, Pr Amadou Aly Mbaye, «la réouverture de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar n’est pas à l’ordre du jour contrairement à ce qui a été annoncée». Les assises de l’université de Dakar se tiennent depuis deux jours mais, a-t-il assuré, «la réouverture n’est pas à l’ordre du jour».
Soutenant que cet établissement d’enseignement supérieur a été confisqué, il estime qu’il faut faire en sorte aujourd’hui qu’elle puisse retrouver sa vocation première, c’est-à-dire être un lieu d’enseignement bien sécurisé. «Ces assises ont été convoquées par le recteur après avis du conseil académique autour d’un certain nombre de points. Le premier est relatif à la nécessité d’une plus grande imbrication dans la formation. L’Ucad ne peut pas rester à la marge des évolutions pédagogiques que tout le monde connait. Nous sommes une grande université, aussi reconnue partout à travers le monde comme étant une très grande université. Nous ne devons pas dormir sur nos lauriers. Nous devons faire comme toutes les grandes universités, et entrer de plain-pied dans la modernité. Il faut aussi réfléchir sur les questions de sécurité. Je crois que ce qui se passe à l’Ucad, dans beaucoup de domaines et surtout dans le domaine social, dépasse l’entendement. Une fois, le New York Times a fait un reportage sur le campus social de l’Ucad. Tous les acteurs et tous les diplômés de l’Ucad ont été embarrassés. Cela avait révélé à la face du monde quelque chose qui nous fait honte et nous devons faire face à la réalité. On ne peut plus avoir une institution où les étudiants sont à 10 dans une chambre. Ce n’est pas possible. Il faut qu’on réfléchisse à tout ça. Les conditions de sécurité, les résidents de l’Ucad qui ne sont pas des étudiants, les trafics de toutes sortes autour du Coud et qui sont un champ fertile à ce qui nous est arrivé la fois passée… il faut qu’on réfléchisse à tout ça», a insisté le Pr Amadou Aly Mbaye.
Persistant et signant, le recteur indique que «tous les membres du Conseil académique sont là. Ce n’est pas statutaire, c’est de nature à prendre des décisions. L’université n’a jamais été fermée. Nous sommes passés du dispositif présentiel à celui distanciel. Il faut l’introduction des modules transversaux et la sécurité. Il s’agit de les soumettre aux différents acteurs. Il ne s’agit pas de prendre des décisions sur les activités étant donné que l’université n’a jamais été fermée ».
Pour sa part, le directeur du Coud (Centre des œuvres universitaires de Dakar), M. Maguette Sène, pense que la réouverture du campus social pourrait se faire en janvier. Mais si et seulement si le climat social est apaisé, si la situation le permet et si les travaux sont bouclés. «Il n’est pas question aujourd’hui de réouverture du campus. Il est plutôt question de la mise en œuvre d’un ensemble de mesures qui ont été arrêtées soit par le conseil académique de l’université soit par le conseil d’administration du Coud. Des mesures qui vont dans le sens de préparer la réouverture. Il ne s’agit pas d’ouvrir pour ouvrir mais ouvrir à quelles conditions ! Si on doit ouvrir dans les mêmes conditions qu’on avait fermé le 01er juin, cela veut dire qu’on n’a même pas besoin de rouvrir parce qu’on va fermer à nouveau. Mais ouvrir en prenant la responsabilité de prendre les mesures de sécurité qui s’imposent, faire de telle sorte que, lorsqu’on va rouvrir, qu’il y ait le climat social qu’il faut pour les études. C’est ce qui est le plus important. Parce qu’il ne s’agit pas de faire dans le cosmétique, il est plutôt question de faire des choses viables. L’université a été profondément atteinte, des choses inadmissibles ont été faites dans l’espace universitaire. Il est de notre responsabilité d’y aller avec froideur et de dire qu’on va ouvrir parce que l’université n’a pas été faite pour fermer. Mais pour ouvrir, il y a des mesures à prendre. La sécurité va être renforcée. Le contrôle aux accès doit être règlementé. Les questions d’hébergement doivent être assainies. En tout cas, l’environnement social et pédagogique doit être amélioré de sorte que, lorsque les cours reprendront, on soit sûr que l’espace sera apaisé et qu’on ne va pas ouvrir pour fermer à nouveau».
M. Sène précise que le délai de deux mois annoncé a été très mal interprété. «A l’occasion du conseil d’administration, les gens m’ont demandé si l’ensemble de ces mesures je pense les mettre en œuvre. Je leur ai dit que je suis spécialiste en passation des marchés. Que les procédures normales de passation des marchés pourraient nous prendre six mois. Mais, avec la sensibilité de la question et l’urgence de la réouverture, avec les services compétents du ministère des Finances, notamment la Dcmp, on pourrait avoir des procédures d’urgence. Un raccourci qui devrait nous permettre de pouvoir tout boucler dans un délai minimum ou maximum de deux mois» a confié en conclusion le directeur du Coud, M. Maguette Sène.