DERRIÈRE LE BONHEUR MATERNEL, LES RUINES PROFESSIONNELLES
Souvent présentée comme l’accomplissement d’une vie, notamment en Afrique, la maternité porte pourtant les germes d’une césure professionnelle
En moyenne, 24% des femmes dans le monde quittent le marché du travail au cours de la première année suivant la naissance de leur premier enfant. Cinq ans plus tard, 17% restent absentes. Le nombre passe à peine à 15% dix ans après.
C’est ce que révèle un groupe de chercheurs de la London School of Economics (LSE) et de l'université de Princeton dans une nouvelle étude inspirée des travaux de l’économiste américaine, Claudia Goldin, lauréate du Nobel d’Économie en 2023.
Menée dans 134 pays représentant 95% de la population mondiale, l’étude dévoile l’impact dévastateur de la maternité sur la carrière et l’indépendance économique des femmes à travers le monde.
Pour aboutir à cette réalité implacable, les auteurs ont comparé dans chaque pays concerné, des mères et des pères à des personnes sans enfant, du même âge, du même niveau d'éducation et avec le même statut matrimonial entre autres.
De grandes disparités
La situation est particulièrement prégnante dans les pays développés. L’écart de participation au marché du travail entre hommes et femmes s’y explique à 80% en moyenne par le départ de ces dernières après la naissance d’un premier enfant.
Ce taux tombe à 10% dans les pays pauvres. Une telle disparité est due à certains facteurs propres à chaque milieu. Face au coût prohibitif de la garderie et à des horaires parfois peu flexibles, les mères sont appelées à sacrifier leur travail pour le bien-être de l’enfant, au moins temporairement, dans les pays occidentaux.
C’est moins le cas dans les pays pauvres où le principal facteur de départ du travail n’est pas l’accouchement, mais le mariage. L’étude de la London School of Economics relève à cet effet que l’écart de participation au marché du travail à Maurice et en Zambie s’explique pour près de la moitié des cas par le mariage.
"Pénalité de la maternité"
Le phénomène appelé "pénalité de la maternité" (la baisse moyenne de la probabilité d'emploi d'une femme au cours des dix années suivant la naissance de son premier enfant) par les auteurs, contribue aux inégalités salariales entre sexes.
Une différence de salaire hommes-femmes estimée à 14% au sein de l’OCDE selon une étude de PriceWaterhouseCooper publiée en mars 2023. Soit un recul de 2,5 points de pourcentage seulement depuis 2011.
S’occuper de sa progéniture implique bien souvent pour la femme de quitter son emploi, au moins pour un moment. Elle doit par la même occasion faire une croix sur toute perspective d’augmentation de salaire ou de promotion pendant cette période.