L’OMBRE DES FEMMES LEADERS SUR LES FUTURES LEADERS EN DEVENIR
Sans tambours ni trompettes, l’association Shine to Lead est en train d’apporter une touche qualitative à la promotion des jeunes filles en Sciences au Sénégal. Le programme doit son succès en partie à des femmes dévouées, modèles et inspirantes
Sans tambours ni trompettes, Shine to lead/Jiggen Jang Tekki est en train d’apporter une touche qualitative à la promotion des jeunes filles en Sciences au Sénégal. Le mentorat occupe une place prépondérante dans cette initiative. Sans les femmes dévouées, professionnelles, modèles et inspirantes, l’initiative n’aurait pas pu réussir à mener à bien ses programmes et avoir des résultats escomptés. En effet, ce sont ces figures tutélaires qui assure un autre travail personnalisé en termes de conseils, de coaching à leurs filleuls tandis que l’équipe de management de STL fournit les moyens matériels et financiers. Dans la présente interview, les deux co-responsables du programme de mentorat, Ndèye Fatou Diagne, ingénieure Travaux au Consortium d’Entreprises (CDE) pour le chantier de l’extension de l’usine de la Société Africaine de Raffinerie (SAR) et Mame Khady Diouf, experte dans le domaine de la négociation, de la médiation et du dialogue dans le processus de paix expliquent à AfricaGlobe.net comment fonctionne le programme de mentorat. Elles sont les deux piliers du mentorat à Shine to Lead. Alors qu’au début l’initiative a misé sur les professionnelles basées exclusivement au Sénégal, il est vite apparu que même depuis l’étranger, l’on peut assurer fort bien cette charge en faveur des lycéennes. Sélectionnées sur la base de la performance, les lauréates de Shine to Lead, le temps passant, deviennent quelque part des filles adoptives de leurs mentores.
AfricaGlobe.net : Quel est l’objectif du volet mentorat de Shine To Lead/Jiggen Jang Tekki?
Mame Khady Diouf : Le volet mentorat de Shine to Lead a pour objectif d’accompagner les jeunes filles lauréates sur les plans social et scolaire. Les mentores s’engagent à soutenir les lauréates, à faire le suivi avec elles et à les conseiller sur tous les plans. Les mentores doivent s’engager à rencontrer leurs mentorées pour échanger sur leurs progrès scolaires, être en contact avec leurs mentorées au moins une fois par semaine par téléphone ou message – fixer des objectifs académiques avec les mentorées et prendre des mesures pour les atteindre, agir en tant que ressource et guide, mettre en place un accompagnement personnalisé conduisant à leur réussite académique, personnelle et sociale en leur donnant les outils pour développer, entre autres, une estime de soi et une confiance en soi positive. Par ailleurs, les mentorées doivent participer au programme, aux formations, aux camps de vacances et aux webinaires. Elles doivent aussi être assidues dans leurs cours et s’appuyer sur leurs mentores pour avoir les meilleures chances de réussir tant sur les plans personnel, académique et social.
AfricaGlobe.net : Quels sont les critères sur la base desquels les mentorées sont choisis ?
Fa Diagne : Les mentorées doivent avoir une moyenne au-dessus de 13/20, en classe de Seconde à la Terminale, et doivent être dans des conditions désavantageuses pour leur épanouissement scolaire. Concernant la dernière cohorte de l’année 2020-2021, nous avons choisi les élèves les plus assidues de notre grand programme de cours de vacances et de développement du leadership 2020 première édition, qui ont rejoint la cohorte de l’année 2019-2020.
AfricaGlobe : Pourquoi STL a décidé d’élargir sa liste de mentores au-delà du Sénégal ?
Fa Diagne : Au départ, nous ne recherchions que des mentores résidants au Sénégal, à cause de la proximité demandée pour tisser des liens avec leur mentorée. Mais avec l’arrivée de la COVID-19 et des restrictions imposées par le gouvernement pour lutter contre la propagation, les mentores de la cohorte 2019-2020 n’ont pas pu se voir physiquement, et donc, elles ont été dans l’obligation de s’adapter aux appels vidéo et aux messages textes. Vu que cette méthode a été efficace, nous avons décidé d’élargir les lieux de résidence des mentores à l’international.
AfricaGlobe : Que pensent en général les mentores Shine to Lead et jusqu’où sont-elles prêtes à accompagner l’initiative ?
Fa Diagne : Les mentores saluent l’initiative de Nayé Bathily, et pensent que c’est une initiative très inspirante qui va fortement contribuer à l’évolution de notre pays en coachant les futures leaders. Elles sont toujours prêtes à aider, et pleines de ressources et d’enthousiasme à l’idée de participer au développement du Sénégal. Elles participent aux webinaires de Shine To Lead (les Shine To Lead Talks) en tant que modératrices ou invitées, communiquent leurs idées pour des activités ou encore pour l’amélioration de l’initiative lors des réunions organisées par la coordination.
AfricaGlobe.net : Les mentores sont-elles tenues de parler de temps en temps de leur propre parcours, leurs expériences à leurs mentorées afin de les inspirer, voire les stimuler à en faire autant ou plus ?
Fa Diagne : Effectivement. C’est pour cela que l’on essaie de faire «un matching» basé sur la profession des mentores et l’ambition future des mentorées. Vu l’intérêt commun, cela permet de créer un premier lien entre elles. Dans le cas contraire, l’expérience et le parcours de la mentore dans le monde professionnel et académique sont toujours un plus afin de guider la mentorée dans le choix de sa future carrière.
AfricaGlobe.net : Peut-on dire qu’en fin de compte les mentorées finissent, dans une certaine mesure, par être des filles adoptives de leurs mentores ?
Fa Diagne : Bien sûr, les mentorées deviennent des filles ou encore des petites sœurs. Et c’est le but. Les liens deviennent si forts qu’elles peuvent devenir un membre à part entière de la famille de la mentore. Celles qui habitent à l’étranger auront plus de mal vu qu’elles n’auront pas forcément l’opportunité de voir leur mentorée aussi fréquemment qu’une mentore résidant au Sénégal, mais cela reste une question de volonté.
AfricaGlobe.net : Il y a eu de potentiels mentores approchées qui n’ont pas donné suite à la requête parce que cela implique pour elles des responsabilités ?
Mame Khady Diouf : Nous n’avons pas eu de désistement de potentielles mentores du fait du niveau de responsabilité, mais plutôt des mentors qui étaient déjà engagés, mais à cause de leur emploi du temps, elles n’ont pas pu se consacrer à leur mentorées et ont préféré céder leurs responsabilités à d’autres. Certaines mentores sont parfois incompatibles avec leur mentorées et nous analysons la situation pour voir si elles ne doivent plus faire partie du programme ou si nous devons leur assigner de nouvelles mentores. Il faut comprendre qu’être mentore requiert d’être disponible pour sa mentorée, c’est un engagement assez conséquent.
AfricaGlobe : Quelles sont les ambitions à long termes de Shine to lead/Jiggen jang Tekki pour l’accès et le maintien des jeunes filles à l’école
Mame Khady Diouf : Shine to Lead a pour ambition effectivement l’accès et le maintien des jeunes filles à l’école. A travers nos différents programmes et initiatives, nous encourageons les jeunes filles à persévérer et à continuer dans les filières scientifiques dans lesquelles elles sont. Nous organisons différents webinaires thématiques pour qu’elles puissent avoir confiance en elles, qu’elles sachent qu’elles seront soutenues par leurs mentores pour pouvoir continuer leurs études. Nous envisageons de continuer à vulgariser notre action sur le plan national, d’échanger et de collaborer avec les entités en charge de l’éducation nationale.
AfricaGlobe : Est-ce que Shine to lead a des garde-fous pour préserver ces lauréates des mariages forcés ou même des grossesses précoces dont sont malheureusement victimes parfois des lycéennes et qui freine leur évolution ?
Mame Khady Diouf : Nous n’avons pas de garde fous à proprement dit mais tout passe par la communication. Nous mettons en confiance nos lauréates et leur réaffirmons notre disponibilité à les écouter. Leurs mentores sont également présentes pour les soutenir sur plusieurs plans. Nous avons des webinaires qui abordent plusieurs thématiques dont celles-ci. Nous insistons sur le fait que leurs études sont primordiales. Les mentores sont également appelés à échanger avec les parents de ces jeunes filles et nous sommes convaincus que si ces questions étaient soulevées, les mentors réaffirmeraient notre conviction de voir nos lauréates étudier dans les meilleures conditions possibles.
Propos recueillis par Fred ATAYODI – (AfricaGlobe Dakar)