PROTECTION DES FEMMES CONTRE LES VIOLENCES DOMESTIQUES
Deux experts de la Banque mondiale évaluent les lois nationales
La loi est-elle efficace pour protéger les femmes contre les violences ? C’est à cette interrogation qu’Asif Islam, économiste principal et Augusto Lopez-Claros, Directeur exécutif du Forum sur la gouvernance mondiale, ont essayé de répondre. Ces derniers ont d’ailleurs estimé à environ 4 400 milliards de dollars le coût économique des sévices effectués contre les femmes dans les ménages.
La pandémie de COVID-19 a empiré la situation des femmes victimes de violences domestiques. A en croire deux experts de la Banque mondiale, les appels aux lignes d’assistance téléphonique pour les victimes ont augmenté. Asif Islam, économiste principal et Augusto Lopez-Claros, Directeur exécutif du Forum sur la gouvernance mondiale, estiment ainsi qu’il est difficile de mesurer le coût réel de ces violences conjugales, car elles ont des conséquences physiques et mentales qui peuvent subsister très longtemps. Pour autant, soulignent-ils, du point de vue purement économique, le coût de la violence domestique est estimé à environ 4 400 milliards de dollars, soit 5,2 % du PIB mondial, une somme colossale à tout point de vue. Et la hausse des appels de détresse a ainsi poussé ces experts à se demander si les lois sur la violence domestique peuvent protéger les femmes.
Selon Asif Islam et Augusto Lopez-Claros, il y a une relation entre la présence d’une législation sur les violences conjugales et le taux de mortalité des femmes. « Nos travaux montrent que la législation sur la violence domestique joue un rôle effectif. Selon notre hypothèse la plus prudente, ces lois sont associées à une diminution du ratio de mortalité des femmes par rapport aux hommes d’environ 2,27 % de sa valeur moyenne, ce qui se traduit par des centaines de milliers de vies de femmes sauvées », indiquent-ils dans leur étude publiée sur le site de la Banque mondiale. Non sans faire état de la difficulté à trouver des données sur les violences conjugales.
A les en croire, ces informations sont rarement collectées et lorsqu’elles le sont, elles sont fragilisées par le sous-signalement dont ces faits font l’objet. Par conséquent, disent-ils, dans le cadre de leur approche globale, ils ont opté pour des données sur la mortalité qui sont très largement documentées.
Ainsi, déclarent-ils, après avoir complété leurs résultats en analysant les données de l’OMS sur la violence domestique pour 73 pays, ils confirment la conclusion selon laquelle l’existence d’une législation pénalisant la violence domestique est corrélée à une baisse des violences conjugales. En définitive, ils affirment que les femmes représentent environ la moitié de la population mondiale. Et que les lois et les institutions qui améliorent le bien-être des femmes méritent d’être considérées avec une attention prioritaire. «Nos recherches indiquent que l’existence d’une législation sur les violences conjugales peut avoir sauvé de nombreuses vies, peut-être même des millions sur la période étudiée », renseignent-ils.
Il s’agit là d’un progrès remarquable en soi, et qui s’accompagne probablement de bénéfices économiques, laisse-t-il entendre. Bien entendu, ces experts soutiennent que la législation ne règle pas tout et elle doit être envisagée comme un effort parmi d’autres pour protéger les femmes. Au fil du temps, concluent-ils, les lois qui visent à dissuader les comportements nuisibles ou à renforcer des effets positifs contribuent à faire évoluer les normes sociales et, à ce titre, elles constituent un aspect important d’une stratégie globale pour sauver des vies.