"IL Y A CETTE DICHOTOMIE QUI RISQUE DE FAIRE MAL AU PRÉSIDENT"
Abdoulaye Gallo Diao, responsable socialiste, estime que Macky Sall a commis « une erreur monumentale de communication » sur le cas Khalifa Sall, lors de son entretien avec RFI
Le chef de l’Etat est définitivement clair sur le débat concernant la grâce que de nombreux Sénégalais espéraient pour l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall. Devant nos confrères de Rfi, il affirme que » le jour où j’en aurai la volonté ou le désir, je le ferai ».
Ce qui a suscité beaucoup de commentaires du côté des soutiens de Khalifa Sall et même dans son propre camp. C’est le cas d’Abdoulaye Gallo Diao responsable socialiste, membre du Bureau politique du Ps, Secrétaire national adjoint chargé des TIC, un parti allié de la coalition présidentielle. Il estime que le président a commis « une erreur monumentale de communication ». Selon lui, le Président à quelque chose à se reprocher : « en français, l’adage dit que « qui s’explique s’accuse ». Cette sortie maladroite et inopportune du Président prouve à suffisance que Khalifa Sall demeure et reste son otage politique ».
« Et si finalement les mêmes causes produisent les mêmes effets, Macky Sall prendra sa place à Reubeuss et Khalifa Sall la sienne au Palais » ajoute-t-il avant de s’interroger : « comment vouloir réduire la libération d’un prisonnier de droit commun condamné à une peine d’emprisonnement par la justice à la seule signature d’une grâce présidentielle jusqu’à ce que le président Macky Sall se fait le luxe de suspendre la libération de Khalifa Sall à sa seule volonté voire à son bon vouloir ? »
Une question que le juriste Abdoulaye Santos Ndao tente de répondre par des arguments juridiques. Il convoque la constitution : « à la lecture de l’article 47 de la constitution il est le seul détenteur. L’intéressé Khalifa Sall peut introduire un recours en grâce pour en bénéficier c’est ce que l’on appelle grâce individuelle. Ce qui est regrettable c’est du point de vue morale il manifeste ouvertement qu’il a la force de faire ceci et cela. On peut lui reprocher son inélégance communicationnelle ».
Après ces arguments, il est nécessaire de faire une analyse du discours pour mieux comprendre ce « bad buzz ». Pour cela, nous avons demandé au journaliste-analyste Mame Gor Ngom de nous commenter les propos du Président. Sa réponse : « Ce qui est le plus maladroit dans le propos présidentiel, c’est la manière de le dire et le champ lexical choisi. C’est quand il évoque un « désir » et une « volonté » qui devraient guider une éventuelle grâce pour Khalifa Sall. Ce qui est à l’origine des critiques notées ça et là. Sall aurait pu répondre à la question avec beaucoup plus de subtilité. Mais là, il donne l’impression de quelqu’un qui veut montrer une toute-puissance que lui donne sa station qui est une émanation de la volonté populaire. ».
Il va plus loin. Pour lui, « Il donne l’impression de quelqu’un qui est très irrité face un dossier très peu ordinaire. Et cela ne fait que renforcer la popularité de Khalifa Sall qui subit la prison. Cette posture lui donne de plus en plus des habits de martyre d’autant plus que l’ex-maire de Dakar est largement considéré dans l’opinion comme quelqu’un qui broie du noir avec stoïcisme et calme. Il y a cette dichotomie qui risque de faire mal au président, considéré par certains comme le bourreau « pas très à l’aise » et Khalifa Sall comme une « victime à la conscience tranquille ». »