LES VÉRITÉS DU PDS
Déchéance d’Aminata Touré, compagnonnage avec YAW, contact entre Karim Wade et Amadou Ba, deal avec le régime… Nafissatou Diallo, secrétaire nationale à la communication du parti libéral, rompt le silence - ENTRETIEN
Vote de la déchéance d’Aminata Touré, compagnonnage avec Yewwi Askan Wi, contact entre Karim Wade et Amadou Ba, le travail de Karim à Doha, deal avec le régime… La secrétaire nationale à la communication du PDS rompt le silence et crache ses vérités crues aux détracteurs du parti de Wade. Pour elle, le PDS ne siègera jamais dans une plateforme de l’opposition où il y a Mme Aminata Touré.
Le PDS a voté, la semaine dernière, en faveur de la déchéance de Mme Aminata Touré, demandée par la majorité. Est-ce que vous ne donnez pas raison à ceux qui estiment que vous êtes en deal avec le régime ?
Vous savez, si nous ne l’avions pas voté, votre journal et tous les journaux du Sénégal auraient titré, à juste titre, que c’est la preuve qu’en 2009, nous avions déchu Moustapha Cissé Lo et Mbaye Ndiaye dans le seul but de combattre Macky Sall. On aurait donné raison à tous ceux qui estiment que nous nous sommes comportés de la même manière que Macky Sall aujourd’hui, que nous avons utilisé la loi pour combattre des adversaires. Ce qui est archifaux. Cette loi (l’article 60 de la Constitution) dont on parle a une histoire. Elle tire un peu ses origines de l’histoire même tumultueuse du Parti démocratique sénégalais.
Vous savez, notre parcours a été truffé de défections. En 1978 (premières élections législatives du PDS, NDLR), nous avions eu 18 députés. Tous ont été débauchés par le régime socialiste de l’époque. Il en sera ainsi à toutes les élections, jusqu’en 1998. Nous avons été combattus, à chaque fois qu’on sortait d’élections législatives, pour nous empêcher d’avoir un groupe parlementaire.
Quand le président Wade est arrivé au pouvoir, au lieu d’utiliser les mêmes méthodes, il a mis dans la Constitution cette disposition, pour interdire ce genre de pratique, que nous avons vécu dans notre chair. Il faut être un grand seigneur pour penser comme ça. Le président Wade est un grand seigneur. Mieux, il a diminué le nombre de députés pour avoir un groupe parlementaire. Tout ça, c’était dans le but de renforcer l’opposition parlementaire et la démocratie.
En plus de l’avoir votée, nous avons eu à recourir à cette loi dans les cas Mbaye Ndiaye et Cissé Lo. Il faut que l’on soit juste et honnête. Si aujourd’hui, alors qu’on se trouve dans les mêmes conditions, on refuse de voter, on aurait donné raison à nos détracteurs qui ont toujours soutenu que nous combattions Macky Sall. Et vous nous l’auriez reproché à juste titre, c’est-à-dire quoi que nous fassions, les gens nous cherchent toujours la petite bête.
Mais est-ce que cette loi ne pose pas problème dans une démocratie où les députés sont supposés être des représentants du peuple et non d’un parti ?
Comme je vous l’ai dit, cette loi a une histoire ; c’était pour un objectif noble, à savoir lutter contre la transhumance des députés. À mon avis, c’est une bonne loi, dont l’objectif premier est de protéger l’opposition parlementaire, comme je l’ai expliqué. Regardez aujourd’hui, avec la configuration actuelle de l’Assemblée, qu’allions-nous dire si Macky Sall commençait à débaucher des députés de l’opposition ? Qu’allions-nous faire ? Si on a refusé de voter aujourd’hui, qu’aurions-nous fait demain ? Nous avons une bonne loi. On nous dit qu’il n’y a pas de démission. Monsieur Amar, aujourd’hui, si vous cessiez d’aller aux réunions de rédaction de ‘’EnQuête’’ et que tous les jours on vous voit écrire des articles au ‘’Soleil’’, vous n’avez pas besoin de produire une démission ; ‘’EnQuête’’ constatera que vous avez de fait démissionné. Ce sont les règles. C’est ce qu’on avait fait en 2009. Le PDS est un parti de conviction, nous avons voté parce que cette loi c’est nous qui l’avons introduite dans la Constitution, nous avons eu à l’utiliser et c’est une loi juste, c’est le contraire qui aurait dû étonner ; quelle que soit par ailleurs la personne concernée.
Comment avez-vous donc accueilli les attaques et accusations, y compris de vos amis de l’intercoalition Yewwi Askan Wi ?
Vous savez, ceux qui nous attaquent sont nés avant-hier, ils ne connaissent pas grand-chose de l’histoire politique de ce pays. Certains ignoraient même que cette loi existe et qu’elle est une garantie pour l’opposition. Cela me fait rire ; c’est de l’ignorance tout simplement. Mais ces gens (les membres de Yewwi) attaquent tout le monde ; ils attaquent le PDS en essayant coute que coute de mettre dans la tête de certains Sénégalais que nous sommes avec Macky Sall, parce qu’ils pensent que la pensée unique peut exister au Sénégal. C’est pourquoi ils essaient de peindre tout le monde comme des monstres pour s’ériger comme la seule alternative.
On a tout compris. Qu’ils comprennent que nous, on ne nous fait pas chanter. Ils peuvent écrire sur tous les murs que nous travaillons pour l’APR, on est quitte avec notre conscience. Les gens de bonne foi sauront que si on travaillait pour l’APR, Karim Wade ne serait pas encore en exil, le président Wade serait déjà dans sa maison du Point E. Il y a des choses qui n’ont même pas de sens. Et puis, si nous avions souhaité entrer dans un gouvernement, je vous assure qu’on n’allait pas s’en cacher. Quand on faisait l’entrisme dans les gouvernements de Diouf, parce que le Sénégal en avait besoin, on l’assumait. Plus récemment, quand il s’est agi d’aller à Conakry à la veille des élections de 2019, c’est nous-mêmes qui l’avons communiqué, de même que quand le président Wade devait rencontrer Macky Sall, c’était au grand jour. Nous, nous sommes transparents, nous ne sommes pas dans les petits calculs, nous ne cédons pas non plus aux chantages. Nous allons continuer à défendre nos convictions.
Avant ce vote, il y a eu la motion de censure. N’est-ce pas trop tout ça ? Ne donnez-vous pas trop d’arguments à vos détracteurs ?
D’abord, vous êtes tous au courant des conditions dans lesquelles cette motion a été préparée et déposée. Quand nous l’avons découverte au même titre que tout le monde, on s’est réuni. Sur les 27 députés de notre groupe, les 24 ont dit librement qu’ils ne vont pas voter. Si la motion avait été bien libellée avec des arguments solides, nous n’aurions aucun problème à la soutenir, même si on n’est pas associé. Mais cela n’a pas été le cas. On ne fait pas voter une motion de censure parce que le gouvernement n’a pas soumis à l’Assemblée un vote de confiance, alors que tous les ministres qui sont passés-là ne l’ont pas fait, dont nos Premiers ministres quand on était aux affaires. S’il y avait une démarche concertée, on aurait pu travailler sur un bon exposé des motifs, parce que les arguments ne manquent pas : la question de l’endettement (c’est du temps d’Amadou Ba), la richesse d’Amadou Ba, comme j’ai eu à lui signaler durant mon temps de parole, etc. Il y a tellement de choses qu’on aurait pu dire, mais pas de vote de confiance. C’est trop léger. Le PDS ne peut pas s’engager dans ces histoires.
Êtes-vous de ceux qui pensent que cette motion ne visait pas à faire tomber le gouvernement, auquel cas elle aurait dû faire l’objet d’une plus large concertation avec les autres blocs dont les libéraux et les non-inscrits ?
Moi, je pense qu’ils ont voulu le faire pour faire croire aux Sénégalais qu’ils sont les seuls opposants. Cela ne marche pas avec nous. Ce que beaucoup de membres de l’opposition et leurs affidés ne comprennent pas, c’est que le PDS est un parti qui est là depuis 1974, un parti qui a vécu les pressions les plus atroces, les persécutions, les tortures. Ce n’est pas le fait d’occuper les médias pour nous dépeindre en judas qui va nous faire reculer. Qu’on nous insulte, qu’on nous diffame, qu’ils disent tout ce qu’ils veulent, rien ne va nous dévier de notre chemin. Le PDS n’est pas un parti qu’on fait chanter. Il faut qu’ils le comprennent. S’ils pensent qu’en disant que nous sommes avec Macky, ils vont nous amener à les suivre comme des béni-oui-oui pour ne pas nous mettre à dos l’opinion, ils se trompent lourdement. La preuve, même après la motion, quand on a jugé bon de voter cette déchéance, on l’a fait, conformément à nos convictions.
Finalement, c’est quoi l’avenir de cette alliance avec Yewwi ?
Ce n’est pas une alliance politique ; c’était une alliance électorale. Vous me permettez de répondre à un de vos confrères qui a dit : C’est grâce au Pastef que nous avons 27 députés.’’ Pourquoi il n’a pas dit que c’est grâce au PDS ou à Wallu que Yewwi a eu 53 députés ? Pastef avait combien de départements au sortir des Locales ? Comment ils se sont retrouvés avec une dizaine de départements ? Les gens croient qu’ils peuvent tromper les Sénégalais comme ça avec des statuts. Il faut qu’on arrête. Cette alliance, c’était du ‘’win-win’’. Et d’ailleurs, c’est eux qui en ont le plus profité. Ils avaient 700 000 voix aux Locales, ils se sont retrouvés avec plus d’un million de voix. Nous, nous avions 459 000 voix, nous nous sommes retrouvés avec 460 000 voix. Rien n’a changé dans nos suffrages. Cela veut dire qu’il n’y a pas eu de report en notre faveur. La politique, ce sont des chiffres, ce n’est pas le buzz.
C’est pourquoi, comme me le disait avant-hier le président Wade, nous surprenons toujours. À chaque fois, nous sommes donnés pour morts ; à chaque fois, on nous voit jouer les premiers rôles. Toujours entre 500 000 et 400 000 voix, alors que nous ne sommes pas dans des mégas coalitions comme les autres. Pendant ce temps, les autres sont non seulement dans des mégas coalitions, mais ils ont des dizaines de leaders de parti et de mouvements citoyens. Yewwi comme Benno. C’est ça la réalité des urnes. Avec Yewwi, c’est une alliance électorale. Sur les grandes questions, si nous devons nous assoir pour nous entendre, nous le faisons. En revanche, il y a beaucoup de questions sur lesquelles nous n’avons pas les mêmes visions.
Pour en revenir à la déchéance de Mimi, au-delà de la constance que vous invoquez, certains estiment que c’était une sorte de revanche, après l’épisode de la traque des biens mal acquis qu’elle a eu à conduire ?
C’est normal, parce que Mimi Touré est allée au-delà de ce qu’on lui avait demandé. Vous savez, quand on a perdu le pouvoir, Macky avait lancé tous les corps de contrôle pour fouiller la gestion de Karim. Tous, ils n’ont rien eu. Madame Aminata Touré est venue dépoussiérer la Crei pour pouvoir l’atteindre. Elle s’est personnellement impliquée pour faire mal à Karim Wade, à Abdoulaye Wade et au PDS, pour avoir une promotion politique. Comme elle a eu à s’en vanter qu’elle a fait mettre en prison Karim Wade, fils du tout puissant Abdoulaye Wade, opposant historique, grand président reconnu un peu partout dans le monde, qu’elle a fait tomber Hissène Habré. Voilà ce qu’elle visait pour sa promotion personnelle. Nous qui l’avons vécu dans notre chair, avec les 71 personnes du PDS qui ont été arrêtées, nous savons quel rôle elle a eu à jouer.
N’est-ce pas un mauvais procès, si l’on sait qu’elle n’était qu’une ministre aux ordres de Macky Sall ?
À supposer même que c’est Macky qui a donné les ordres, elle a la liberté de ne pas exécuter des ordres qui ne sont pas conformes aux lois, à l’État de droit. La deuxième mise en demeure de Karim, qui était illégale, jugée par toutes les organisations internationales, même le parquet de la Crei ne voulait pas le faire. Elle s’est personnellement impliquée, je vous dis, et pour sa promotion personnelle. Il faut qu’on arrête ; il ne faut pas qu’on dénie au PDS ses droits que l’on reconnait aux autres. Cela me fait rire quand j’entends certains membres de Pastef le dire. Dans ce cas, pourquoi leur leader Ousmane Sonko parle de Serigne Bassirou Guèye ? Pourquoi nous parler du juge Maham Diallo ? Pourquoi Antoine Diome ? Ils n’ont qu’à s’arrêter à Macky Sall. C’est parce qu’il pense que ces gens sont en train de faire des choses illégales, en s’acharnant contre sa personne. S’ils reconnaissent ce droit à Sonko, ils n’ont qu’à nous laisser la latitude d’apprécier le mal que Mimi nous a fait.
Est-ce pour cette raison que vous avez dit que vous n’allez pas partager une même plateforme avec elle dans l’opposition ?
Sur cette question, on est très clair. Et ça, je le dis en tant que chargée de communication du PDS. La ligne du PDS et de la hiérarchie qui m’a instruite de le dire est très claire. Que Mimi Touré se mette à la disposition de la justice, que Macky Sall déclassifie le rapport de l’IGE, mais également, nous ne partagerons aucune table avec Mme Aminata Touré. C’est très clair à ce niveau. Nous ne serons dans aucune plateforme de l’opposition où il y a Madame la néo opposante. Les autres peuvent y aller s’ils le veulent, mais nous non. Elle ne peut pas, après avoir attaqué vertement les gens pendant toutes ces années, revenir cheminer ensemble comme si de rien n’était, parce que simplement elle n’a pas été présidente de l’Assemblée nationale.
D’ailleurs, ce n’est même pas éthique. Moi Nafissatou Diallo, le jour où je serai en contradiction avec Karim Wade ou Me Wade, je vous assure, je ne garderai pas mon poste de député. Même si je suis une députée du peuple, j’ai été portée par un parti, une bannière. Je ne peux pas aller dans un autre groupe. C’est une question de dignité et de valeur. Si elle veut avoir une virginité ou rejoindre l’opposition pour l’ériger en bouclier, parce qu’il y a un rapport contre elle, ça ne passera pas. Nous rappelons à Mme Aminata Touré ce qu’elle disait à l’époque. Quand on parlait de chasse aux sorcières, elle disait que s’il y a des sorcières, il faut les chasser.
C’est aussi simple que ça. Cette femme nous a fait tellement de mal et tout le monde le sait. Comment des gens qui se disent alliés du PDS peuvent s’allier à quelqu’un qui nous a combattus, qui a essayé de détruire le PDS, d’humilier son leader Abdoulaye Wade, détruire sa famille biologique ? Aujourd’hui, on veut qu’on s’assoie avec cette personne ! Ce n’est pas possible ! Ce ne serait pas de l’élégance de la part de nos alliés. C’est comme si des gens comme Mame Mbaye Niang, Mamour Diallo ou même Adji Sarr décidaient, d’un coup, de se battre contre le régime, parce qu’ils n’ont pas eu ce qu’ils voulaient et qu’on les accueille à bras ouverts. Je pense que ça n’allait pas plaire à quelqu’un comme Sonko. Dans la vie, on ne fait pas à l’autre, surtout à un ami, ce qu’on ne souhaite pas pour soi-même.
Cela fait quand même beaucoup de divergences avec Yewwi, de contradictions… Cela ne remet-il pas en cause la sincérité de votre alliance, si on peut parler d’alliance ?
Encore une fois, c’était une alliance électorale, pas politique. Si c’était le cas, on serait dans un même groupe parlementaire. Nous sommes des partis avec des parcours et des histoires différents. Il faut avoir l’honnêteté de le reconnaitre. Maintenant, sur certaines questions, je pense que nous avons les mêmes positions et cela fait l’ombre d’aucun doute. C’est le cas par exemple en ce qui concerne l’instrumentalisation de la justice, qu’Ousmane Sonko, Khalifa, Karim Wade, Bougane, tout le monde doit pouvoir participer à l’élection. Mais sur beaucoup de points, on n’a pas les mêmes positions. Par exemple, le cumul des mandats ; nous ne sommes pas contre alors qu’eux sont contre… Et c’est cela la démocratie. Chacun gère sa maison comme il l’entend et on se bat ensemble sur les autres points.
Où en sont les tractations pour faire recouvrer à Khalifa Sall et Karim Wade leurs droits civiques et politiques ? Est-ce que votre refus de l’amnistie ne complique pas les choses ?
Nous avons toujours été constants sur cette question. Nous n’avons jamais voulu, nous n’en voudrons jamais. Ce n’est pas aujourd’hui que Karim Wade a recouvré ses droits qu’il va courir derrière une loi d’amnistie. Depuis octobre 2020, Karim Wade n’est plus concerné. À l’époque, le juge n’avait pas prononcé la perte des droits de Karim Wade. Il est alors allé s’inscrire légalement au Koweït. C’est là qu’ils ont convoqué l’Assemblée pour changer les règles du jeu et l’empêcher d’être candidat. Sauf que dans la loi électorale, on a dit qu’ils ne peuvent perdre leurs droits pour cinq ans. Nous, la décision de la Cour suprême est sortie en octobre ou novembre 2015. C’est donc fini depuis fin 2020. En conséquence, Karim recouvre naturellement ses droits. Et le collectif des avocats avait fait un communiqué pour le rappeler. Même quand le juge prononce la perte des droits, ce n’est pas advitam aeternam ; c’est pour 10 ans maximum. Mais avec ce qu’ils ont visé pour l’exclure, c’est pour 5 ans.
Votre leader est allé quand même jusqu’à menacer de démissionner, si un député du PDS vote l’amnistie, si l’on en croit vos propres propos. Qu’est-ce qui justifie cette radicalisation ?
Vous savez, moi, quand je parle, je parle au nom du parti. Quand je dois exprimer mes positions personnelles, je le précise. Si j’ai dit ça, c’est parce que la personne concernée m’a demandé et m’a instruite de le dire et de le répéter. Il a dit et réaffirmé qu’il n’est pas question que le groupe PDS vote cette éventuelle loi, parce que lui le bénéficiaire il n’en veut pas. Quand on a parlé d’amnistie, tout de suite certains sont sortis pour nous attaquer pour dire que c’est le deal. Vous avez entendu à l’époque Mme Aminata Touré sur RFI, elle n’avait même pas parlé de Khalifa Sall, parce que son problème c’est le PDS. Depuis que nous nous sommes montrés fermes, ils ont compris que nous n’en voulons pas. D’abord, parce que c’est ce que nous avons toujours dit, mais aussi parce qu’on n’est plus concerné. Au vu de la loi, on a recouvré nos droits civiques et politiques.
Quand on regarde l’espace politique et médiatique, on a l’impression d’assister à une sorte de dualité entre Yewwi et Benno. Qu’est-ce qui l’explique, selon vous ?
C’est normal, c’est parce que nous n’avons pas de leader présent au Sénégal. Notre leader est en exil depuis six ans. Le président Wade, pas question qu’il aille en campagne, nous n’avons pas de leader, nous. C’est nous qui sommes allés à la base chercher plus de 400 000 voix, même aux Locales avant que vous ne disiez que c’est avec Yewwi. Alors qu’on avait arrêté toute activité pendant deux ans à cause du Covid ; alors que nos dernières élections remontaient à 2017. Ça veut dire que nous, on dort on se réveille et on a plus de 400 000 voix. Même en 2017, on avait 19 députés et on nous avait volé beaucoup de voix à Touba, sinon on se serait retrouvé avec 23 députés. C’est pourquoi certaines analyses nous font rire. C’est ce qui devrait étonner les gens.
C’est donc normal qu’il y ait cette dualité. Le jour où notre leader sera là, vous allez voir.
Est-ce que vous ne souffrez pas aussi du vide laissé, parce le départ de certains grands responsables comme Oumar Sarr et les autres ?
Je vous dis une chose, le PDS n’a pas de grands responsables. Le PDS, c’est l’esprit Wade. Les gens, quand ils partent, à quelques exceptions près, ils partent seuls. Regardez ce que sont devenus tous ceux qui sont partis. Les gens suivent Nafi, parce que c’est Wade qui l’a mise là. Le jour où je quitterai le PDS, je vous assure : même mon fils qui est au PDS ne me suivra pas. Voilà ce que les gens ne comprennent pas. Ces départs ne nous ont pas trop ébranlés. Dites-moi au Sénégal ou même en Afrique quel est le parti qui perd le pouvoir et qui continue d’être roi ou faiseur de rois ? Un président disait qu’il est très étonné que malgré la chute du président Wade, que le parti puisse rester 2e ou faiseur de rois. Aujourd’hui, le maitre du jeu, c’est le PDS. Si on ne gagne pas, on fait gagner.
Cheikh Yérim Seck a parlé dans son livre d’un contact entre Karim Wade et Amadou Ba, quand il faisait sa traversée du désert. Êtes-vous en mesure de le confirmer ou de l’infirmer ?
Ce que je sais, c’est qu’à l’époque, des gens avaient contacté Karim pour qu’ils se voient ; ce que Karim Wade avait formellement refusé. Il ne l’a jamais rencontré. Parce que comme je l’ai dit avec Mimi Touré, nous ne sommes l’outil de promotion de personne. Quand ça va avec Macky Sall, on nous attaque. Pour Amadou Ba, il oublie tout ce qu’il a vécu avec Karim Wade, parce qu’il était tout le temps au Micatti (ministère dirigé par Karim Wade). Maintenant, quand ça ne va pas, ils veulent l’utiliser pour leur promotion. ‘’Karim dafa am fouleu’’. Il ne l’a jamais accepté. Parce qu’il ne sera l’arme de qui que ce soit.
Vous confirmez donc qu’Amadou Ba a été membre de la Génération du concret ?
Ce que je sais, c’est que des membres de la Génération du concret nous le disent. Beaucoup qui sont là, qui étaient du cabinet de Wade, ils disent qu’il était tout le temps là-bas. Et je vous dis : vous savez, la seule fois où les organes de contrôle ont eu à demander à Karim Wade des justifications, ça avait rapport avec Amadou Ba. Parce que l’Anoci avait acheté des billets d’avion pour Amadou Ba et beaucoup de membres de la DGID pour qu’ils aillent dans le pays du Moyen-Orient pour négocier la levée de la double imposition avec le Sénégal. Cela nous avait fait gagner beaucoup de milliards. On lui demandait pourquoi l’Anoci a payé les billets. Quand il a répondu, ils ont compris. Parce que c’est l’Anoci qui en était l’initiateur. Pas le Sénégal. C’est la seule fois où on lui a demandé de se justifier sur sa gestion qui a été fouillée de fond en comble. C’est dire qu’ils se connaissaient très bien.
Certains ont estimé que Karim manque de courage, c’est pourquoi il reste se calfeutrer là-bas à Doha au lieu de revenir, quitte à braver les difficultés ?
Il le fera très bientôt. Moi, ce que j’ai appris avec le président Wade, c’est que la politique, ce n’est pas une course de vitesse ; c’est du fond ; c’est du souffle ; savoir attendre les moments propices. Quel est l’intérêt pour Karim de venir ici trainer, alors qu’il a son travail. Il travaille beaucoup pour vivre, faire vivre sa famille, soutenir son père qui est quand même un ancien président avec des charges importantes ; aider le Parti démocratique sénégalais à vivre. Il va venir en temps opportun, faire la tournée : d’abord dans les foyers religieux, au Sénégal, dans la diaspora et se présenter. Je vous assure, même s’il revient la veille de l’élection, le vote sera bouleversé. Ça, tout le monde le sait, c’est pourquoi certains membres de l’opposition s’entêtent à faire du PDS leur cible.
Vous avez été récemment au Qatar. L’avez-vous rencontré ?
Bien sûr ! J’aime certes le football, mais si je suis allée au Qatar, c’était aussi, en plus de supporter l’équipe nationale, pour rencontrer Karim Wade, discuter avec lui sur beaucoup de choses et l’accompagner dans sa première apparition publique.
Quelle est sa vie là-bas ?
Ce que je peux dire c’est qu’il travaille. Ça, il ne me l’a pas dit, mais je le sais. Il gère, pour le Fonds d’investissement qatari, tout ce qui touche aux investissements en Afrique. C’est lui qui dit OK, on peut investir ici. Quand vous le voyez là-bas, vous vous rendrez compte combien il est patriote. Moi, je lui ai dit : à votre place, je me demande si je continuerai à regarder le Sénégal. À sa place, je tourne le dos à la politique avec ces ‘’tessanté’’, ces injures, ces coups bas. Mais lui il a un nom à porter, un père dont il défend le legs et c’est un homme de conviction qui porte le Sénégal au cœur. Il a la conviction qu’il doit être au service de son pays.
Quid du président Wade. Quelles sont ses nouvelles ?
On s’est vu hier. On y est allé avec Saliou Dieng, chargé des structures. On lui a d’ailleurs vendu sa carte. Il l’a acheté à un million F CFA. Et puis on le voit maximum tous les 15 jours avec Lamine Thiam, pour discuter sur l’actualité, la position du PDS. C’est pourquoi je vous dis que tout ce que j’aurais à dire sera en droite ligne avec la ligne du président, du chargé des orientations.