SÉNÉGAL, LA DÉGRINGOLADE DÉMOCRATIQUE
La situation des droits humains au Sénégal inquiète une organisation internationale. CIVICUS Monitor a dramatiquement dégradé le classement du pays, l'estimant plus répressif que des États sous influence militaire
Les libertés civiles se sont dégradées à un point tel au Sénégal que le pays se classe désormais aux côtés de régimes militaires, selon l'ONG CIVICUS Monitor basée à Johannesburg. C'est ce qu'a annoncé cette organisation de défense des droits humains dans un communiqué publié mardi 5 décembre 2023.
"Le Sénégal, autrefois considéré comme un phare de l'ouverture et de la démocratie en Afrique de l'Ouest, ne l'est plus", déplore Ine van Severen, chercheuse pour CIVICUS Monitor, citée dans le communiqué. L'ONG a abaissé le classement du pays de "restreint" à "réprimé", le plaçant au même niveau que le Mali et le Tchad, dirigés par des juntes militaires, et la Tunisie, en proie aux tensions politiques depuis que le président Kais Saied s'est arrogé des pouvoirs absolus en 2021.
Selon l'organisation, l'administration du président Macky Sall cherche à étouffer toute dissidence à l'approche de l'élection présidentielle prévue en février prochain. Les forces de sécurité ont tué des partisans de l'opposition dans la rue et emprisonné des militants et journalistes critiques "dans un climat tendu", ajoute Van Severen.
Le pays est secoué depuis mars 2021 par des manifestations sporadiques et de plus en plus violentes, après l'arrestation et l'inculpation pour viol du très populaire leader de l'opposition Ousmane Sonko. Depuis, ce dernier a été condamné pour corruption de mineure et fait face à de nouvelles poursuites qui rendent improbable sa candidature à la présidentielle.
Au total, près de 40 personnes sont mortes dans les violences liées à l'arrestation de Sonko selon Amnesty International. En août dernier, les autorités ont bloqué l'accès à internet mobile sur une grande partie du territoire, interdit le réseau social TikTok et dissous le parti de Sonko.
CIVICUS Monitor, créé en 2017, évalue et note annuellement la situation des droits et libertés dans 115 pays.